Est-ce parce que la France, avec ses 17 %, est le pays d’Europe où la couverture vaccinale contre le papillomavirus est la plus faible ? Ou parce que ces dernières années, le cancer du col de l’utérus est devenu en France le seul cancer dont l’espérance de vie diminue ? Ou encore parce que l’ouverture des données de santé de l’Assurance Maladie, permet des exploits statistiques ? Ou les 40 procédures en cours contre Gardasil ? Ou pour toutes ces raisons à la fois… ?
Plus de deux millions de jeunes filles observées
Toujours est-il que cinq autorités de santé et institutions – Ansm, Cnam, INCa, InVS et Insitut Pasteur – étaient réunies autour du directeur général de la Santé pour présenter les résultats positifs de la plus vaste étude, française, jamais menée au monde sur la sécurité de la vaccination anti-HPV. Ce travail qui a passé au crible les données de plus 2 millions de jeunes filles, avec pas moins de 6 millions d’années de surveillance, a permis d’exclure la sclérose en plaques (SEP) du risque post-vaccinal pour ne retenir qu’une relation faible, mais statistiquement significative, de syndrome de Guillain-Barré (SGB) avec un sur-risque de l’ordre de 1 à 2 cas pour 100 000 jeunes filles vaccinées.
Dans le détail, l’étude menée est de type observationnel longitudinal exposé (au vaccin anti-HPV)/non exposé. Elle a inclus toutes les jeunes filles relevant du régime général de l’Assurance Maladie et âgées de 13 à 16 ans de janvier 2008 à décembre 2013, soit au total, 2 256 716 jeunes filles représentant 78 % des adolescentes résidant en France. Ces jeunes filles ont été au moins suivies sur 4 ans, « ce qui représente une longue durée », a précisé Alain Weill (Direction de la stratégie, des études et des statistiques à la Cnamts). 14 pathologies pouvant être dues à un processus auto-immun ont été sélectionnées pour être observées. Deux sources de données ont été exploitées, celles du SNIIRAM et du PMSI, toutes tarifantes, donc d’un niveau réputé supérieur à des données déclaratives. Enfin, l’exposition a été définie par la délivrance en officine d’au moins une dose d’un des vaccins.
Résultats : le tiers des adolescentes a été vacciné contre le HPV pendant la période suivie dont la majorité (93 %) par Gardasil®, a expliqué Mahmoud Zureik (Direction scientifique et de la stratégie européenne à l’Ansm).
Un cancer totalement évitable
Au final, 2 978 cas de maladies auto-immunes (MAI) ont été identifiés chez les non-vaccinées et 996 chez les vaccinées. Si globalement, aucune augmentation significative du risque de MAI n’a été mise en évidence, une association statistiquement significative a été identifiée chez les vaccinées « avec un risque relatif de 4 », ont expliqué les experts, tant avec Gardasil® qu’avec Cervarix®. Cette association est très marquée dans les 3 mois qui suivent la vaccination. Les 19 SGB post-vaccinaux n’étaient pas plus graves que les 21 survenus hors injection. Selon Benoît Vallet, directeur général de la Santé, « tous ont été spontanément résolutifs, 40 % ont nécessité une hospitalisation pour assistance ventilatoire et 5 à 10 % ont souffert de séquelles résiduelles ».
Pour les autorités de santé, l’enjeu est effectivement ?de taille. La présidente de l’INCa, Agnès Buzyn, rappelle que « le cancer du col de l’utérus est le seul cancer totalement évitable et c’est aussi le cancer le plus inégalitaire car intimement lié à la précarité ».
Contrairement aux autres oncopathies, le cancer du col a vu sa survie à 5 ans passer de 68 % dans les années 1990 à 64 % dans les années 2000 et ce en raison d’un diagnostic tardif. Ce vaccin est désormais remboursé à 65 % et « il est en accès gratuit dans un grand nombre de centres », ajoute l’oncologue dont les propos trouvent un écho auprès des virologues. Pour Isabelle Heard, experte du papillomavirus à l’Institut Pasteur, « en population générale, la protection virologique conférée par le vaccin tourne autour de 70 % ».
Forte des conclusions de cette étude, l’INCa va donc relancer ses campagnes de vaccination grand public pour tenter d’atteindre une couverture vaccinale plus proche de ses voisins d’Europe : « 79% au Danemark, 82 % en Suède, 81 % au Portugal, 80 % au Royaume Uni, 77 % en Espagne et 83 % en Belgique », a énoncé François Bourdillon, directeur général de l’InVS. Et, bien entendu, tous les experts réunis ce jour-là, ont placé tous leurs espoirs entre les mains des généralistes qui vaccinent. La prochaine mouture de la ROSP devrait, selon Dominique Martin, directeur de l’Ansm. intégrer cet acte de prévention.
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