Les drogues plus dangereuses chez l’ado

Publié le 06/02/2014
A la demande du gouvernement, l’Inserm et la MILDT (Mission interministérielle de lutte contre la drogue et les conduites addictives) ont établi un bilan scientifique sur les vulnérabilités des adolescents à l’usage d’alcool, de tabac, de cannabis et de jeux vidéos. Un travail qui a également analysé les stratégies de prévention et d’intervention efficaces pour cette tranche d’âge.

Crédit photo : WILL & DENI MCINTYRE / BSIP

L’expertise de l’Inserm met en exergue une modification de certains modes de consommation de drogues, notamment avec l’alcoolisation ponctuelle importante qui tend à se développer chez les adolescents. Ainsi à 17 ans, le binge drinking est en hausse continue, passant de 46% en 2005 à 53% en 2001. « De plus, nous avons observé que les filles étaient plus sensibles au binge drinking : elles font plus d’erreurs et leur capacité de mémorisation est plus réduite », indique le Pr Mickael Naassila (université de Picardie, Amiens). Par ailleurs, les experts soulignent la plus forte sensibilité des ados aux effets neurotoxiques de l’alcool et du cannabis par rapport aux adultes. « Le processus de maturation du cerveau se poursuit en effet jusqu’à 25 ans, ce qui entraîne une vulnérabilité exacerbée de l’adolescent vis à vis de la neurotoxicité des substances psychoactives. A cet âge, l’alcool par exemple, tue plus de neurones que dans un cerveau adulte » avance le Pr Naassila.

Aussi, les experts insistent-ils sur la dangerosité d’une consommation précoce : plus le sujet expérimente jeune les produits, plus les risques de dépendance et les dommages qui en découlent sont importants. Ainsi, à 10 ou 11 ans, le risque de dépendance est multiplié par deux et celui d’accidents liés à l’alcool par cinq.

En ce qui concerne le tabagisme quotidien, il n’a guère régressé depuis 2008 : à 17 ans, un tiers des adolescents fume chaque jour, relève le Dr Alain Dervaux (CHU sainte Anne, Paris). Côté cannabis, l’usage régulier concerne 7% des élèves de terminale. Enfin, les jeux video, très chronophages, « peuvent détourner les élèves plus plus fragiles d’autres activités et de la scolarité », relève le Dr Olivier Phan (centre Pierre Nicole, Paris).

Les stratégies de prévention

Plusieurs stratégies ont montré des effets bénéfiques sur la prévention ou la diminution de psychoactifs. En particulier, trois types d’intervention sont le plus souvent présentés dans les programmes étrangers qui se sont avérés efficaces. Le développement des compétences psychosociales des jeunes (gestion des émotions, prise de décision, estime de soi) et de leurs parents (amélioration de la communication, gestion des conflits) ; les stratégies à composantes multiples (associant aux deux premières techniques l’intervention au niveau local d’autres acteurs que l’école et les parents).

Le groupe d’experts recommande ainsi de sensibiliser le public à la vulnérabilité de l’adolescent aux dangers associés à une initiation précoce. Il faudrait également développer les compétences psychosociales des adolescents (activités de groupe en milieu scolaire aux âges où l’entrée en consommation se fait),

informer régulièrement les parents et les aider à adopter l’attitude la mieux adaptée à la situation de leur enfant. Et aussi, renforcer la formation des intervenants en milieu scolaire.

En cas d’usage problématique et afin d’éviter l’installation d’une conduite addictive, le groupe d’expert préconise de renforcer les consultations jeunes consommateurs et d’améliorer la coopération entre professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice pour optimiser l’orientation et la prise en charge. Beaucoup de pistes qui ne demandent plus qu’à être développées au sein du Plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017 adopté en septembre dernier...

Charlotte Demarti

Source : lequotidiendumedecin.fr