Alors que le coronavirus a fait sa première victime française cette semaine et que l’épidémie progresse en Italie, des médecins généralistes déplorent de ne pas être informés par les pouvoirs publics. Comme le prouvent plusieurs articles parus dans la presse, mercredi.
Le Parisien révèle ainsi que Ludovic Toro, maire de Coubron (Seine-Saint-Denis) et généraliste de formation, « vient de suspendre les cours de natation de trois classes de sa commune ». Une décision prise à la suite du retour en France d’un groupe de nageurs de l’AS Chelles Natation d’un stage de perfectionnement en Toscane, région figurant parmi les zones touchées par le virus. Ce groupe s'entraînant à la piscine intercommunale de Chelles (Seine-et-Marne), où ont d'ordinaire lieu les cours de natation suspendus, l'édile a invoqué le « principe de précaution » afin d’éviter toute contagion.
« Je lèverai ma décision quand les autorités m'auront assuré qu'il n'existe aucun risque », indique Ludovic Toro, qui affirmait mardi« n’avoir reçu aucun message » de celles-ci jusqu'à présent. « En 2009, pour le virus H1N1, les mesures de protection ont été disproportionnées. Pour le coronavirus, c'est tout le contraire », appuie l'édile. Selon un article paru jeudi, les 1 200 maires d'Île-de-France ont reçu mercredi après-midi un « kit méthodologique rédigé par l'Agence régionale de santé (ARS), recensant les bons comportements à adopter, afin d'être en mesure de retransmettre à leurs administrés une information fiable, et qui soit la même dans toutes les communes ».
Les généralistes « abandonnés »
De son côté, La Voix du Nord a interrogé le Dr Bertrand Legrand. Le secrétaire général de la CSMF pour le Nord et le Pas-de-Calais, réputé pour son franc-parler, égratigne lui aussi la gestion de la crise par les autorités. « Dès le départ, on savait que ça allait être une pandémie mondiale », confie le généraliste au quotidien. « On met des moyens démesurés pour endiguer quelque chose qui ne s’endiguera pas, poursuit le généraliste de Tourcoing (Nord). Si l’épidémie ne s’éteint pas d’elle-même, ce qui reste malgré tout possible, elle atteindra la France. Et même si la mortalité est faible, il faut avoir le courage de dire qu’il y aura des décès. Comme à chaque grippe. »
Le Dr Legrand estime également que les omnipraticiens sont « abandonnés dans la nature ». Et ce alors qu'ils seront en première ligne en cas d'épidémie.
Un constat partagé par un généraliste manceau, interrogé par le Maine Libre. Affirmant que la France devrait « forcément être concernée d’ici une semaine ou deux » par l'épidémie, ce confrère se dit « pris de court face à une épidémie proche et très éparpillée géographiquement ». D'autant que l'Agence régionale de santé des Pays de la Loire ne s'est « toujours pas manifestée » auprès des généralistes selon lui. « Autant l'épidémie de SRAS de 2003 avait bien été anticipée, autant nous sommes démunis face au Covid-19 », remarque-t-il.
À court de masques
Un sujet en particulier préoccupe ces trois médecins : celui des masques de protection FFP2, qui sont aujourd'hui en rupture de stock (le ministère de la Santé a lancé une commande auprès des fabricants basés sur le sol français). Ludovic Toro indique ainsi avoir envoyé mardi un courrier au ministre de la Santé pour réclamer un « stock conséquent » de masques. Le Dr Legrand confie quant à lui ne disposer que d'un « vieux stock de masques offerts par Roselyne Bachelot ». « Je peux tenir trois jours. Je n'ai que 20 masques à donner aux patients alors que mon cabinet en reçoit près d’une centaine par jour », souligne-t-il.
Son confrère manceau est lui aussi à court de masques chirurgicaux et appelle donc l'ARS à « équiper au plus vite les médecins de kits pour les patients ». « Cela va devenir indispensable pour éviter la propagation du virus », prévient-il.
Les syndicats de médecins se mobilisent
Jusqu'ici plutôt discrets, les syndicats de médecins libéraux commencent à s'emparer du sujet. Dans un communiqué paru mercredi, la CSMF invite ainsi l'État à passer « aux actes » en dotant « au plus vite les cabinets de médecins libéraux de toutes les protections possibles (masques, blouses jetables, lunettes) et de solutions hydroalcooliques ». « C’est la moindre des choses pour notre profession qui, comme d’habitude, remplira son devoir vis-à-vis de la nation », fait valoir la CSMF.
Un vœu également formulé par le SML, qui confie avoir « demandé au ministère (...) d’accélérer le déblocage de matériel en lien avec les pharmaciens d’officine dans le cadre d’une coordination de proximité. » « Ségur [nous] a fait savoir qu’il prenait ses dispositions pour lancer cette distribution », précise-t-il. « Des kits de protection sont actuellement acheminés pour être distribués aux médecins de ville », affirme ce jeudi après-midi MG France.
L'organisation indique par ailleurs qu'elle va organiser une campagne de formation dans les départements et invite les médecins libéraux à s'inscrire à la liste de diffusion de DGS-URGENT, afin de pouvoir recevoir les informations sur le coronavirus en temps réel.
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