LE QUOTIDIEN : L'assurance-maladie attend de la Fédération des médecins de France (FMF) une double signature pour avaliser les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et les assistants médicaux. Quel est votre état d'esprit ?
Dr JEAN-PAUL HAMON : Nous allons faire voter tous nous adhérents à jour de cotisations (soit 1 500 médecins) entre le 14 et le 18 juin, récolter leurs voix et nous prononcer défintivement ensuite.
Nous constatons d'ores et déjà des points de blocage sur les CPTS, qui représentent pour beaucoup de médecins, dont moi, une victoire de l'hyper administration. Quand vous voyez la liste des obligations, on se demande quand les gens vont avoir le temps de soigner leurs patients, entre le nombre de protocoles à monter, à respecter, le nombre de réunions à tenir…
Sur les assistants médicaux, même combat ! La CNAM impose aux médecins une hausse de la productivité et l'appartenance à une organisation territoriale, c'est inacceptable ! À la base, on demandait des assistants pour aider à prendre en charge les soins non programmés ou la partie secrétariat du cabinet médical. Au moins cela avait du sens ! Là, les objectifs d'augmentation de patientèle sont complètement délirants… Tout cela ne donne pas très envie.
On vous sent désabusé. Au point de ne pas signer ?
On penche plutôt vers une non-signature des CPTS et des assistants. Mais dans les régions, certains adhérents sont farouchement opposés aux deux dispositifs, d'autres y sont au contraire favorables. D'ailleurs, quelques médecins adhérents ont déjà monté des CPTS. Ils craignent d'être exclus de la gouvernance des communautés si on ne signe pas, j'en ai conscience. Mais je ne suis pas inquiet. Si on ne signe pas mais que deux autres syndicats le font, on ne s'opposera pas à l'application des textes.
Une centaine de services d'urgences sont en grève. Les médecins libéraux ont-ils une part de responsabilité ?
Cela fait un moment que des solutions sont connues sur ce sujet : il faudrait tout d'abord réguler l'accès aux urgences. Au Danemark, les patients n'arrivent que par ambulances. Si c'était le cas en France, les urgentistes pourraient travailler dans des conditions correctes et accueillir ce pourquoi ils sont faits, c'est-à-dire les véritables urgences. Mais on ne pourra le faire que le jour où les hôpitaux accepteront de perdre les trois milliards d'euros engrangés par dix millions de passages par an qui n'ont rien à faire aux urgences. On ne peut pas continuer à maltraiter et mépriser le personnel des urgences comme il l'est actuellement.
Les libéraux jouent leur rôle. Dans l'avenant sur les CPTS, nous avions proposé à Nicolas Revel d'instaurer une régulation libérale rémunérée pour prendre en charge les soins non programmés, comme cela se fait par exemple en Mayenne. Les médecins généralistes régulateurs y sont payés trois ou quatre C de l'heure défiscalisés. Si on déploie ce principe à trois médecins régulateurs pour 300 000 habitants, cela coûterait 150 millions d'euros par an à la Sécu. Rien par rapport aux trois milliards d'euros dépensés aujourd'hui pour les urgences faute de régulation. Mais l'assurance-maladie a refusé cette proposition ! Qu'on ne nous fasse pas ensuite porter le chapeau comme l'a fait la porte-parole du gouvernement récemment…
Pendant l'examen de la loi de santé au Sénat, la coercition est à nouveau revenue sur le tapis. Agnès Buzyn a fait rempart. Jusqu'à quand ?
Ça n'est pas nouveau de nous menacer avec la coercition, mais c'est un minimum de la part de la ministre de la Santé de l'avoir écartée du débat parlementaire. On ne va pas changer les règles d'installation en cours d'études ! Il faut en revanche plus de mesures incitatives. L'une d'entre elles, l'exonération de charges sociales du médecin jeune installé pendant cinq ans à partir de l'obtention de son diplôme, est intéressante. Il y a d'autres incitations qui ne sont absolument pas connues. Nous avions par exemple proposé un stage en libéral avec une incitation forte, équivalente à celle des contrats d'engagement de service public (CESP) si le médecin se rend dans une zone prioritaire. C'était incitatif, mais cela n'a pas été retenu.
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