Alors que l’âge des travailleurs est au cœur des discussions actuelles avec les débats sur la réforme des retraites, l’Observatoire santé de la Mutualité est cette année consacré à la santé au travail.
Les chiffres présentés par la Mutualité dans ce 6e Observatoire montrent qu’au niveau des accidents du travail, qu’ils soient mortels ou non, la France est bonnet d’âne en Europe. Pour les accidents mortels, le taux d’incidence (pour 100 000 personnes en emploi) était de 3,5 en 2019, un niveau deux fois supérieur à la moyenne européenne (1,7 accident mortel pour 100 000 personnes en emploi). Cela représente 733 accidents du travail mortels soit deux décès par jour en moyenne, « sans compter les accidents de trajet entre le domicile et le lieu de travail (283 décès) et les maladies professionnelles (175 décès) », ajoute la Mutualité.
Pour les accidents du travail non mortels, le taux est de 3 425 contre 1 603 accidents pour la moyenne européenne. « Le nombre d'accidents du travail diminue avec l'âge », explique aussi l’Observatoire.
Les accidents du travail des plus de 50 ans représentent en effet 25 % des accidents du travail totaux, alors que ces travailleurs seniors représentent 29 % des salariés. En revanche, lorsque ces accidents surviennent, ils sont plus graves : les salariés de plus de 50 ans sont nettement surreprésentés dans les incapacités permanentes ou les décès, puisque dans 41 % des incapacités permanentes et 58 % des décès liés à un accident du travail, la victime a plus de 50 ans.
Les arrêts maladie augmentent avec l'âge
Du côté des arrêts de travail, l’Observatoire montre que plus de 40 % des salariés sont en arrêt maladie au moins une fois par an.
D'une manière générale, les arrêts maladie augmentent nettement avec l'âge, rappelle également la Mutualité. Alors que leur durée moyenne en France est de 35 jours pour l'ensemble des salariés, elle passe à 75 jours pour les salariés de plus de 60 ans, relève-t-elle.
De même, la durée des arrêts de travail après un accident a tendance à être plus élevée pour les salariés les plus âgés, avec un ratio de 86,9 jours par accident pour les 50 à 59 ans, contre 79 jours pour les 40 à 49 ans, et 44,2 pour les 20 à 29 ans.
La Mutualité rappelle aussi qu’en 2030 un actif sur quatre sera proche aidant. « Cette conséquence de notre société vieillissante doit être prise en compte dans la santé au travail des plus de 55 ans », appuie-t-elle.
Alors que le taux d’emploi des seniors est au cœur des discussions sur la réforme des retraites, « le recul de l’âge de départ en retraite ne peut se faire sans des mesures pour assurer le maintien en emploi des travailleurs âgés alors que près d’un salarié sur deux n’est plus en emploi avant son départ à la retraite », estime la Mutualité.
Augmentation des affections psychiques
Du côté des maladies professionnelles, les troubles musculosquelettiques (TMS) restent très largement la première cause reconnue (88 %), les reconnaissances ont augmenté de 3,8 % entre 2017 et 2019. Parallèlement, les affections psychiques reconnues augmentent fortement (+6 % par rapport à 2018).
« Si les contraintes physiques ont tendance à se réduire dans le monde professionnel, l’évolution des modes d’organisation des entreprises entraîne un développement des risques psychosociaux », souligne la Mutualité.
Le 6e Observatoire, fait aussi un point sur le secteur professionnel de la santé au travail, largement sinistré. Au 1er janvier 2022, la France comptait ainsi 4 812 médecins du travail, soit une densité moyenne de 7,1 médecins pour 100 000 habitants. Leur âge moyen est de 54,6 ans, avec plus de la moitié des médecins âgés de plus de 65 ans ce qui en fait la 4e spécialité médicale la plus âgée de France.
De plus, la répartition est très hétérogène sur le territoire, allant de 2,8 médecins pour 100 000 habitants dans le Cantal à 20,4 médecins pour 100 000 habitants à Paris. La démographie médicale en médecine du travail est en baisse depuis 2012, une diminution qui tend à s’accélérer et est comprise entre 30 % et 60 % dans plus de 60 départements.
Rétablir les facteurs de pénibilité supprimés
Parmi les propositions mises en avant par la Mutualité, outre l’amélioration de l’attractivité et des conditions d’exercice des professionnels en santé au travail, elle suggère de « former les généralistes à une meilleure connaissance des maladies professionnelles, notamment dans le cadre des futurs bilans aux âges clés ».
Elle veut aussi « développer l’échange d’informations entre médecin du travail et médecin traitant avec le consentement du patient ». Cela passe notamment par la sensibilisation du médecin traitant à l’importance de signaler une pathologie d’origine professionnelle au médecin du travail « pour faciliter la détection et la prévention au sein des entités de travail ».
La Mutualité axe aussi une partie de ses propositions sur la prévention. Elle suggère notamment de passer par des incitations financières en majorant la cotisation accidents du travail/maladies professionnelles dans les entreprises présentant un taux de sinistralité élevé.
Pour limiter l’usure professionnelle et la pénibilité, la Mutualité propose d’élargir l’accès au départ anticipé en retraite pour incapacité permanente liée à l’usure professionnelle et de l’étendre aux travailleurs indépendants. Elle souhaite aussi réintroduire dans le compte professionnel de prévention, les quatre facteurs de pénibilité supprimés : postures pénibles, charges lourdes, vibrations mécaniques, et agents chimiques dangereux.
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