Parmi les enfants, les filles, et plus particulièrement les adolescentes, semblent avoir été particulièrement affectées psychologiquement par le confinement. Telle est la conclusion de l’étude descriptive française Confeado publiée dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) du jour.
Depuis le printemps dernier, les données évoquant un impact psychologique négatif des mises en quarantaine s’accumulent. Ainsi une étude chinoise conduite auprès de plus de 50 000 habitants de 36 provinces du pays a-t-elle mis en évidence une prévalence élevée de troubles psychologiques (stress, insomnies, irritabilité, etc.) et de symptômes de détresse pendant le confinement. Chez les enfants, un rapport anglais a même conclu à une augmentation préoccupante des décès par suicide pendant le confinement. « Aucune étude française n’a cependant ciblé spécifiquement l’impact des conditions de vie lors de ce confinement sur la santé mentale des enfants et des adolescents », déplorent les auteurs de la présente étude. Ainsi ces derniers se sont-ils donné pour objectif « d’évaluer l’état émotionnel et la détresse psychologique chez les enfants de 9 à 18 ans durant et au décours du confinement en fonction de leur environnement et de leurs conditions de vie et d’habitat ».
Pour ce faire, les chercheurs ont interrogé près de 3 900 enfants et adolescents de 9 à 18 ans (et leur famille ou structure d’accueil). En pratique, ces volontaires ont été inclus entre juin et septembre 2020, et ont répondu à un questionnaire intégrant tant des outils psychométriques d’auto-évaluation que des questions d’ordre socio-démographique.
Les filles plus affectées que les garçons
Résultat : « dans notre échantillon, les filles semblaient avoir une santé mentale plus impactée que celle des garçons », résument les auteurs.
De fait, les filles ont déclaré avoir connu plus de troubles du sommeil que les garçons pendant et au décours du confinement. Ainsi, un tiers d'entre elles ont affirmé avoir présenté "plus de difficultés pour s’endormir que d’habitude", contre moins de 22 % des garçons. Elles étaient par ailleurs 10 % plus nombreuses que les garçons à souffrir de réveils nocturnes ou de cauchemars. Outre ces troubles du sommeil, elles ont également déclaré davantage de difficultés émotionnelles que les garçons (tristesse, préoccupation, nervosité, fatigue, ennui, etc.).
« Parmi les enfants et les adolescents ayant cité le fait de s’occuper de ses frères et sœurs comme un point négatif du confinement, les filles étaient significativement plus nombreuses que les garçons (5,2 % vs 3,2 %) », relèvent par ailleurs les auteurs. Ainsi, si une différence psychologique de réaction au confinement entre les filles et les garçons « pourrait s’expliquer par un stress perçu plus important chez les filles que les garçons ou des différences de modalités de réponse entre sexes », les auteurs font également l’hypothèse que les filles auraient pu plus souffrir, pendant le confinement, d’une « répartition genrée des tâches, notamment éducatives et domestiques, au sein de la famille ».
Les adolescents plus touchés que les enfants plus jeunes
En outre, les enfants de plus de 13 ans ont témoigné d'une santé mentale plus impactée que ceux âgés de 9 à 12 ans. En particulier, comme les filles, les adolescents ont aussi déclaré plus de troubles du sommeil (difficultés d’endormissement, cauchemars, réveils nocturnes, fatigue, tristesse ou nervosité au réveil) que les enfants plus jeunes. D’une façon générale, les adolescents ont été moins nombreux que les plus jeunes à se dire détendus et joyeux, mais plus nombreux à déclarer "avoir très peur". De même, plus d’un quart d'entre eux ont déclaré ne pas se sentir tranquilles (contre moins de 20 % des moins de 13 ans), et près de 35 % s’ennuyer beaucoup (contre 23 % des plus jeunes).
Des résultats inquiétants mais peu étonnants, puisque la littérature a largement démontré que le bien-être mental des enfants diminue avec l’âge, rappellent les auteurs.
Les enfants les moins favorisés les plus touchés
Mais cette étude pointe aussi l’environnement comme facteur de risque de détresse psychologique en contexte de confinement.
D’abord, les enfants dont la famille dispose de ressources économiques moindres, ont été particulièrement affectés. « Les enfants qui ont ressenti de la détresse (d’intensité modérée à sévère) pendant le confinement étaient exposés à des conditions de vie plus difficiles », rapportent dans cet esprit les chercheurs. Ainsi de nombreux enfants comptant parmi les plus touchés par le confinement ont-ils passé cette période en zone urbaine, dans un appartement (ou maison sans jardin) éventuellement sur-occupé, dans lequel il apparaissait difficile de s’isoler, et disposant d’une mauvaise connexion internet (voire sans connexion internet). Concernant la situation familiale, les chercheurs décrivent aussi, des parents – ou un parent, car les enfants en détresse étaient plus nombreux que les autres à vivre en famille monoparentale – confrontés notamment à des difficultés financières, voire alimentaires.
Cependant, des facteurs environnementaux autres qu’économiques ont aussi pu participer à la détresse rapportée par certains enfants. Ainsi les chercheurs citent-ils « un manque d’activités, une augmentation du temps passé sur les réseaux sociaux et les écrans, un sentiment d’être dépassé par rapport au travail scolaire ». De plus, la détresse psychologique aurait aussi été très associée, chez les enfants de l’étude, à l’infection ou l’hospitalisation d’un proche.
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