La maladie d'Alzheimer (MA) est un processus neuropathologique caractérisé par l’accumulation progressive des protéines bêta-amyloïde et tau dans le cerveau qui entraine une atteinte synaptique puis la mort neuronale. Elle débute des dizaines d’années avant l'apparition des symptômes cliniques. Afin d’améliorer la détection précoce de la MA, de nouveaux outils diagnostiques ont été développés. Ainsi, les données de l'imagerie par TEP-FDG (tomographie par émission de positons au 18F-fluorodéoxyglucose) ont montré, chez les patients avec une MA, une baisse de la captation du glucose dans certaines régions du cerveau : le néocortex temporo-pariétal et le cortex cingulaire postérieur. Cependant, ces modifications sont très subtiles et diffuses et l’interprétation visuelle par les experts en médecine nucléaire est délicate.
« Nous avons développé un algorithme d'intelligence artificielle (IA) qui permet de prédire la maladie d'Alzheimer à partir de l’imagerie cérébrale TEP-FDG avec une spécificité de 82% et une sensibilité de 100%, en moyenne 6 ans avant le diagnostic clinique. Par comparaison, nos radiologues utilisant une approche clinique standard associée à des méthodes semi-automatiques obtiennent une sensibilité de 57% et une spécificité de 91% » explique au « Quotidien » le Dr Jae Ho Sohn, du département de radiologie et d’imagerie biomédicale de l’Université de Californie à San Francisco (UCSF), et co-auteur de l’etude publiée dans la revue Radiology.
2 100 images provenant de 1 002 patients
L’équipe a exploité les données de l'Alzheimer’s Disease Neuroimaging Initiative (ADNI), une vaste étude multicentrique axée sur les essais cliniques visant à améliorer la prévention et le traitement de la MA. La base de données ADNI comprend plus de 2 100 images cérébrales de PET-FDG provenant de 1 002 patients. Les chercheurs ont entraîné l'algorithme d'apprentissage profond (ou deep learning) sur 90 % des données, puis l'ont testé sur les 10 % restants. L'apprentissage profond est en effet une technique grâce à laquelle un programme apprend à reconnaître le contenu d'une image en s'entraînantà partir d'une banque d'images. C'est ainsi que l'algorithme de l'équipe a pu apprendre lui-même à reconnaître les schémas métaboliques correspondant à la maladie d'Alzheimer.
Enfin, les chercheurs ont testé l'algorithme sur une série indépendante de 40 examens d'imagerie provenant de 40 patients. L'algorithme a atteint une sensibilité de 100 % pour détecter la maladie, en moyenne plus de six ans avant le diagnostic final. « Nous somme très satisfaits de la performance de cet algorithme capable de prédire chaque cas ayant évolué vers la MA », s’enthousiasme le Dr Sohn.
L'intelligence artificielle, un outil complémentaire
«En pratique, l’intelligence artificielle (IA) obtient des performances significativement supérieures à celles des lecteurs humains (radiologues), mais en réalité l'homme secondé par l'IA obtiendrait probablement de meilleures performances que l’un ou autre pris séparément», précise au « Quotidien » le Dr Sohn. « Un scénario possible serait d’utiliser l’IA pour dépister les patients, afin de s’assurer que les cas de MA dans un futur proche ne sont pas manqués (vu la sensibilité de 100%). Puis les radiologues pourraient venir confirmer les cas afin de réduire les faux positifs (vu la spécificité a 82%, 18% de faux positifs) et de juger les cas exceptionnels».
L’équipe envisage maintenant de valider l'algorithme sur une base de données cliniques plus large, et de l'améliorer via l'optimisation hyper-paramètrique. Enfin, ils examineront s’ils peuvent développer un algorithme pour analyser les examens TEP utilisant des radiotraceurs plus spécifiques de la MA, comme la protéine Tau et la bêta-amyloïde.
«Après leur validation sur des bases de données cliniques plus larges, nous travaillerons avec les ingénieurs pour déployer les algorithmes de Deep Learning en pratique clinique», confie au « Quotidien » le Dr Sohn. « Ceci ne devrait pas être difficile. Néanmoins les radiologistes devront apprendre à exploiter au mieux l’aide apportée par l’IA. Ils devront apprendre quand ils peuvent se fier ou non à l’IA et comment l’utiliser pour la prise de décision, et ils devront se familiariser techniquement à l’interface. De plus, pour être reconnu comme un outil d’aide à la décision clinique, l’algorithme devra probablement être approuvé (par la FDA aux États-Unis) ; ce processus devrait prendre au minimum 3 ans, et plus vraisemblablement entre 5 à 7 ans en supposant que tout se passe comme prévu. »
Y. Ding et al., Radiology, doi:10.1148/radiol.2018180958, 2018
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