LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN : Un récent rapport de la commission « Open Data » en santé prône une large ouverture des données. Quel en est l’intérêt pour les médecins et les chercheurs ?
CHRISTIAN BABUSIAUX : L’univers de la santé a un besoin impératif de données. Sa spécificité est que les acteurs – professionnels de santé, patients... – produisent eux-mêmes les données. Il est donc légitime qu’il y ait un juste retour des informations, par exemple vers les médecins, pour comparer leurs pratiques avec celles de leurs confrères, vers leurs représentants, pour discuter sur des bases claires avec l’assurance-maladie, vers des équipes de recherche des CHU, pour étudier par exemple en vie réelle les effets des médicaments ; et plus largement, vers les patients et tous ceux qui s’intéressent au pilotage du système de soins. Aujourd’hui, il n’est possible d’autoriser des extractions de données qu’au cas par cas. C’est une procédure lourde, avec des délais d’attente de 12 à 13 mois en moyenne peu compatibles avec l’enjeu de santé publique. L’accès direct aux données doit faciliter leur usage.
Quels sont les freins à l’ouverture des données de santé ? Selon le rapport de la commission « Open data », les praticiens appellent à la prudence sur la publication d’indicateurs individuels...
Les professionnels de santé souhaitent vérifier l’exactitude des données qui seraient publiées les concernant, et disposer, dans un souci d’égalité, des mêmes données que leurs interlocuteurs, les agences régionales de santé et l’assurance-maladie. C’est légitime. Je n’ai pas ressenti de blocage au sein de la commission. La société civile y a été proactive. La mise en place de la commission « open data » fait suite à des demandes pressantes d’acteurs très divers de la société civile d’avoir accès aux données, ce qui leur était refusé.
Comment le respect de l’anonymat des personnes est-il garanti ?
On parle ici de données anonymisées, ne comportant ni le nom, ni le prénom, ni l’identifiant de la personne. Il y a tout d’abord celles qui sont strictement anonymisées – par exemple les données agrégées portant sur le nombre global de tel matériel médical consommé ou de consultations. Elles doivent être mises à disposition de tous.
Il y a ensuite les données anonymisées mais individuelles. Elles peuvent éventuellement permettre à quelqu’un qui dispose déjà d’informations sur une personne, de la retrouver, et de la réidentifier indirectement. C’est un acte malveillant puni par la loi. Ces données sont néanmoins essentielles, tout en respectant l’anonymat, pour analyser des types de parcours de soins, pour la veille sanitaire, pour l’épidémiologie. Elles nécessitent simplement des précautions. Aussi, le rapport de la commission n’interdit pas leur usage mais prévoit de les rendre accessibles dans le cadre d’une procédure et de règles rigoureuses.
Quel est l’avenir de l’IDS dans l’Open Data en santé de demain ?
La ministre de la Santé a déclaré devant la mission commune d’information sénatoriale qu’elle souhaitait conforter l’IDS, qui rassemble tous les acteurs de la santé, dont la société civile. La commission est allée dans le même sens puisqu’elle a souhaité que l’IDS soit le « guichet » unique pour l’accès aux données. Un consensus dans l’univers de la santé marqué par ses divisions est rare. Tout consensus est par nature fragile. La loi de santé publique devrait traduire ce consensus.
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