Dr Chassang (CSMF) : « de l’immobilisme mais pas d’âneries »

Publié le 18/07/2013
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Crédit photo : S Carambia

LE QUOTIDIEN - La médecine libérale, depuis un an, a-t-elle fait partie des priorités du gouvernement ? Comment jugez-vous l’action de Marisol Touraine ?

DR MICHEL CHASSANG - Il faut d’abord saluer sa première initiative ! Il y a un an, Marisol Touraine a décidé de faire confiance au système conventionnel, contrairement à Roselyne Bachelot qui avait privilégié une logique de rupture avec sa loi HPST. Même si une commande politique a été passée sur la régulation des dépassements d’honoraires, ce gouvernement a fait le choix du dialogue social. Ce fut un signe de confiance incontestable envers la médecine libérale. Le problème, c’est qu’il y a eu ensuite plusieurs annonces prometteuses pour la ville –sur les alternatives à l’hospitalisation par exemple– qui n’ont pas été suivies d’effet, plongeant la profession dans l’expectative.

Enfin, les promesses sur l’ONDAM n’ont pas été tenues. Nous sommes conscients des contraintes économiques mais il faut se souvenir que le candidat Hollande s’était engagé sur un ONDAM à 3 %. On a finalement eu un taux de 2,7 % [2,6 % pour la ville] et dégressif... On nous annonce 2,4 % l’an prochain.

La stratégie nationale de santé a été esquissée. Est-ce une perspective de nature à assurer la confiance ?

La dynamique qui consiste à dire qu’il faut remettre l’hôpital à sa place et construire une médecine de parcours en structurant mieux l’offre de soins de ville, nous y souscrivons ! Mais en réalité, cela reste des mots. Or, les actes, lorsqu’ils arrivent, ne vont pas dans la bonne direction. Le recul sur l’Hôtel-Dieu [report de la fermeture des urgences] est un mauvais signal. Cela veut dire qu’on continue dans le tout-hôpital, alors qu’il faut développer les alternatives. Deuxièmement, toutes les visites officielles, toutes les déclarations vont en direction de l’hôpital public. La santé rime avec hôpital.

Le dossier de la santé a-t-il été relégué au second plan ?

Très clairement, les retraites –mais aussi la dépendance ou la précarité– sont la priorité, pas la santé, et encore moins la médecine libérale. Nous avons besoin d’une clarification.

Votre Université d’été de septembre, à Lille, s’intéressera à la e-santé. Ce dossier n’est-il pas plombé par les retards du DMP ?

Grâce à la convention et à la rémunération sur objectifs de santé publique, on a fait des progrès énormes : informatisation des cabinets à grande vitesse, logiciels médicaux, usage des téléservices... C’est colossal, notamment chez les médecins généralistes. Mais là encore, il y a un décalage entre les paroles et les actes. On nous avait promis un nouvel élan, grâce au recentrage du DMP sur le dossier professionnel, avec des priorités. Hélas, on ne voit aucun pilotage.

Au final, le tableau n’est guère reluisant…

Je veux tempérer mes propos : Marisol Touraine, au moins, n’a pas fait d’âneries en médecine libérale. On peut l’accuser d’immobilisme mais pas de faire des bêtises. C’est important. C’est une ministre compétente, solide, un tantinet "techno". Le problème, c’est qu’il y a sans doute plusieurs lignes au gouvernement, sans compter la tentation de Matignon de vouloir régner sur la santé.

 PROPOS RECUEILLIS PAR CYRILLE DUPUIS

Source : Le Quotidien du Médecin: 9258