DEVANT les difficultés que rencontre actuellement la pratique des interruptions volontaires de grossesse, les associations s’impatientaient. À quand le rapport entrepris en 2008 par l’Inspection générale des affaires sociales, qui permettrait de mettre en route des actions ? Roselyne Bachelot l’a désormais en mains. Intitulé « Évaluation des politiques de prévention des grossesses non désirées et de prise en charge des interruptions volontaires de grossesse suite à la loi du 4 juillet 2001 », il a été établi par Claire Aubin et Danièle Jourdain Menninger, avec la participation du Dr Laurent Chambaud.
Les auteurs le rappellent, « le contexte français demeure paradoxal », car la diffusion massive de la contraception n’a pas fait baisser le nombre des IVG, toujours situé autour de 200 000 par an. C’est aussi que « le fonctionnement réel des dispositifs contredit trop souvent la volonté affichée de donner la priorité à une approche préventive » : l’école ne remplit pas toujours ses obligations en ce qui concerne l’éducation sexuelle et l’accès à la contraception régulière reste difficile pour les jeunes. Quant à l’IVG, si des progrès ont été enregistrés, les délais d’attente sont encore importants dans certaines zones et la possibilité de choix entre prise en charge chirurgicale ou médicamenteuse n’est pas assuré. C’est que sa place dans le système de soins « n’est pas encore normalisée », que sa pratique reste « peu attractive pour les personnels de santé » et que l’IVG est souvent la variable d’ajustement des réorganisations de l’offre de soins.
Renforcer la prévention.
Comment, en amont, diminuer le nombre de grossesses non désirées ? Là aussi des progrès sont possibles, même s’ils ne résoudront pas la totalité du problème (des recherches ont montré qu’une augmentation de 50 % de la prévalence de la contraception ne diminue que de 32 % le nombre d’IVG). Car, constatent les rapporteurs, le niveau des échecs contraceptifs est préoccupant : 72 % des IVG sont réalisées chez des femmes qui étaient sous contraception, et dans 42 % sous pilule ou stérilet. La diversification des attentes et des modes de vie, l’évolution des relations de couple ne sont pas suffisamment prises en compte dans les prescriptions, estime le rapport, et les utilisatrices ne sont pas suffisamment associées à ces prescriptions.
D’où la conclusion de la mission, de « la nécessité impérative », pour réduire le nombre d’IVG, de renforcer et de réorienter la prévention. Cette dernière passe d’abord et avant tout par l’information et l’éducation sexuelle dès le plus jeune âge et par « une impulsion vigoureuse » à la mise en uvre des dispositions prévues par la loi dans les établissements scolaires. Il faut aussi développer les actions dans les lieux extrascolaires et en direction des populations en situation difficile. Des campagnes de communication doivent être menées suivant une périodicité régulière et rapprochée, ce d’autant que de nombreuses informations de qualité douteuses circulent, notamment sur Internet.
La mission recommande aussi de diversifier et d’adapter la couverture contraceptive, de promouvoir les méthodes moins sujettes aux problèmes d’observance que la contraception orale hormonale, de mieux utiliser la contraception d’urgence, en incluant les nouveaux produits, qui autorisent des délais plus importants.
Développer la formation.
Dans cette optique, le développement de la formation initiale et continue des professionnels de santé est une condition essentielle, en particulier pour la filière de médecine générale et les sages-femmes. Un passage dans un centre d’IVG est suggéré au moment des stages (internes, médecins généralistes, sages-femmes, infirmières).
La contraception serait également favorisée, selon le rapport, par la mise en place d’un réseau de professionnels de santé acceptant le tiers payant pour assurer l’accès gratuit des jeunes à la contraception et leur information sur les questions de santé sexuelle. La reconnaissance financière de la spécificité d’une consultation médicale à visée contraceptive est également préconisée.
Pour l’accès à l’IVG, sont entre autres recommandés l’inscription de l’orthogénie comme une activité médicale à part entière dans le plan stratégique régional de santé et dans les projets d’établissement et de pôle, la revalorisation de sa prise en charge financière et son inscription dans le droit commun d’une tarification fondée sur les coûts, ainsi que le recrutement de personnels de santé.
Le rapport conclut à la nécessité de « maintenir une impulsion politique forte sur les questions relatives à la maîtrise de la fécondité ». Une nouvelle bataille difficile pour la ministre de la Santé ?
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