Le ministère des Solidarités et de la Santé a lancé une réflexion autour de la prochaine campagne de communication autour de l'antibiorésistance, prévue pour fin 2018, lors d'un colloque qui s'est tenu jeudi.
À cette occasion, les résultats d'une enquête IFOP, menée auprès de 1 000 personnes, ont été présentés. Couplées aux résultats du baromètre européen sur l'antibiorésistance, il ressort de ces données que si les Français sont bien informés, ils renâclent encore à l'idée de modifier leurs habitudes.
Le paradoxe français
La moitié des Français affirment être bien informés (36 % sont imparfaitement informés, et 13 % pas du tout) sur le risque d'antibiorésistance, contre un tiers des Européens, mais seulement 25 % prétendent vouloir changer leur comportement, contre 34 % dans l'ensemble de l'Union européenne, selon le dernier baromètre européen. « C'est un paradoxe bien français, reconnaît Victor Laymand, du ministère de la Santé, mais il faudrait vraiment réaliser des études qualitatives pour comprendre où se situent les freins. »
La bonne information des Français est confirmée par les taux de réponses correctes aux questions à choix multiples de l'enquête : 60 % disent que les bactéries deviennent résistantes aux antibiotiques, tandis que 26 % estiment que ce sont les personnes qui deviennent résistantes aux médicaments et que 11 % que ce sont les antibiotiques qui résistent aux virus.
Ils sont 71 % à estimer que l'on ne communique pas assez sur les antibiotiques en France et attribuent une « note de dangerosité moyenne » de 6,6/10 à l'antibiorésistance, derrière le risque terroriste (7,6/10), ou la pollution (7/10) mais devant les perturbateurs endocriniens (6,3/10).
Tirer les leçons des précédentes campagnes
Entre 2000 et 2004, la consommation des Français a ainsi diminué de 18,9 %, puis de 2,8 % entre 2005 et 2010 au gré d'une évolution en dents de scie. Ces trois périodes correspondent aux trois phases de communication autour de l'antibiorésistance, décrites par Geneviève Chapuis de la Caisse nationale de l'assurance-maladie des travailleurs salariés (CNAMTS). Les chiffres de l'ANSM font état d'une consommation de 36,2 doses définies journalières pour 1 000 habitants en 2000. Ce chiffre est tombé à 29,3 en 2005 avant de remonter lentement à 32,1 en 2015. En 2016, il s'est vendu 719,2 tonnes d'antibiotiques en santé humaine en France, ce qui fait de notre pays le 4e plus gros consommateur européen, rapporté à sa population.
Lors de la première phase, entre 2002 et 2005, « il fallait ébranler le réflexe antibiotique explique-t-elle, en s'attaquant aux idées reçues qui veulent que les antibiotiques fassent guérir plus vite. Entre 2005 et 2008, nous avons pris le parti de donner des clés de compréhension en expliquant les modes d'action viral et bactérien. Enfin, entre 2009 et 2011, nous avons voulu faire évoluer le discours vers le "pourquoi" du bien-consommer. Si la première phase a bien fonctionné, ce ne fut pas le cas des deux autres », reconnait-elle.
Pour la prochaine campagne, Geneviève Chapuis a identifié des pistes d'amélioration : « Il faut un programme complet qui dépasse le cadre d'une simple campagne de communication, développer des partenariats médicaux, associatifs et institutionnels et impliquer prioritairement les médecins. » L'évaluation de l'effet des campagnes montre en effet que 9 Français sur 10 déclarent faire confiance à leur médecin en cas de non-prescription d'antibiotiques.
Plusieurs intervenants ont souligné, lors du colloque, que la communication sur les antibiotiques se heurte au même écueil que celle sur les vaccins ou les génériques : une méfiance de plus en plus marquée du public pour la parole des experts en général, et celle des institutions en particulier.
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