Ce médecin-épidémiologiste avait fondé, en 1967, à l’âge de 32 ans, le premier département d’épidémiologie clinique et de biostatistique dans le monde, à l’Université de McMaster, au Canada où, dès les années 1970, il donnait des cours de « lecture critique de la littérature médicale », concept qui deviendrait plus tard « la médecine fondée sur les preuves » – terme inventé par son étudiant et collègue, Gordon Guyatt, en 1990.
« Les étudiants-chercheurs venaient du monde entier écouter ses enseignements, qui étaient extrêmement originaux », décrit le Pr Joël Ménard, directeur général de la santé entre 1997 et 1999, qui lui-même a suivi, au début des années quatre-vingt-dix, les cours de cet homme qu’il qualifie de « hors du commun », et dont il se souvient avec respect et émotion. « Je trouvais l’homme absolument passionnant, c’était un grand maître. Tout ce qu’il disait en médecine générale pouvait s’appliquer à toutes les spécialités, explique-t-il. On pourrait le décrire comme un généraliste du raisonnement médical rigoureux. »
La postérité se souviendra également de l’homme pour son humour et son esprit de dérision. « C’était un homme sérieux qui ne se prenait pas au sérieux », résume le Pr Ménard, qui prend en exemple l’une des phrases prononcées par Sackett lors d’un de ses enseignements sur l’observance des traitements : « Il faut toujours commencer une consultation en demandant au malade : "Avez vous pris vos médicaments ?" – S’il répond que oui, vous n’êtes pas plus avancé. S’il répond que non, vous avez progressé. » Et le Pr Ménard d’ajouter : « C’était un des hommes qui a le mieux compris le difficile problème de l’observance des traitements », citant les deux ouvrages rédigés par Sackett sur ce sujet dans les années soixante-dix.
À 49 ans, il repasse l’internat
Autre signe de son originalité, à l’âge de 49 ans, le Pr Sackett aurait repassé son internat, 20 ans après sa formation initiale, parce qu’il considérait ne « pas être un assez bon médecin » au vu de l’évolution de la pratique, peut-on lire dans le « British Medical Journal ». Né en 1934 à Chicago, David Sackett avait étudié la néphrologie et la médecine interne à l’Université d’Illinois, avant de passer son diplôme d’épidémiologie à l’Université de Harvard. Le Pr Ménard explique que David Sackett aurait ensuite quitté les États-Unis pour le Canada en signe de protestation contre la guerre du Vietnam – un trait de caractère « anti-establishment » qu’il n’a fait que nourrir tout au long de sa carrière.
Il restera 26 ans à l’Université de McMaster au Canada, où il portait la double casquette de médecin-chef et de directeur du département de médecine interne générale, à l’hôpital Chedoke. Dans les années quatre-vingt-dix, le Pr Sackett a également fondé le Centre de Médecine fondée sur les preuves d’Oxford, en Grande Bretagne.
Le chercheur a eu une influence qui a permis de changer la pratique dans de nombreux domaines, de la pédiatrie à la gériatrie. Parmi les 300 publications médicales et scientifiques auxquelles il a contribué, il était par exemple l’investigateur principal du premier essai randomisé ayant démontré les bienfaits de l’aspirine pour prévenir les infarctus et les accidents vasculaires cérébraux.
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