L’OFFENSIVE politique sur le secteur optionnel était attendue mais elle intervenue plus tôt que prévu, dès la discussion générale sur le budget de la Sécurité sociale. Sans attendre l’examen des articles du PLFSS, le ministre de la Santé Xavier Bertrand a prévenu les députés de son intention de forcer la main des mutuelles sur ce dossier sensible bloqué depuis des années. Comment ?
Afin de « répondre structurellement » à la question des dépassements d’honorairesqui « peuvent entraîner des retards dans les soins, voire des renoncements aux soins », le ministre a d’abord réaffirmé devant les députés son attachement de principe au secteur optionnel tel qu’il avait été négocié dès 2009. « J’ai dit que j’étais très favorable à la prise en charge, dans les meilleurs délais, de ces dépassements pour les trois spécialités de chirurgie, d’anesthésie-réanimation et de gynécologie obstétrique. Plus précisément, sur les bases d’un accord intervenu entre les différentes parties prenantes, au moins 30 % de l’activité devrait se faire à tarif opposable ; les dépassements supérieurs à 50 % du tarif remboursable ne seraient pas pris en compte ». Le ministre a ensuite déploré « profondément » l’absence d’accord sur le secteur optionnel avec l’UNOCAM (instance qui réunit les mutuelles, assurances privées et institutions de prévoyance) précisant toutefois qu’il n’était « pas trop tard » pour s’entendre et agir. Mais ce vœu semble pieu depuis que la Mutualité française a expliqué qu’elle souhaitait, elle, des « aménagements ou des alternatives » au secteur optionnel et proposé des réunions bilatérales aux syndicats pour remettre le dossier à plat.
Le sacrifice des médecins titrés bloqués en secteur I ?
Ces atermoiements semblent avoir eu raison de la patience de l’exécutif. « Le gouvernement prendra ses responsabilités et proposera au Parlement de mettre en place cette prise en charge par la loi, avec une prise en charge obligatoire du secteur optionnel dans les contrats responsables, à hauteur de 150 % », a tranché Xavier Bertrand. De fait, comme les contrats responsables (qui bénéficient d’une fiscalité favorable) représentent environ 90 % des contrats complémentaires santé, inclure obligatoirement le secteur optionnel dans leurs garanties équivaut à le généraliser de force. « Je proposerai que ce secteur optionnel soit ouvert au secteur 2, afin de ne pas ouvrir de nouvelles possibilités de dépassement », a ajouté Xavier Bertrand.
Cette dernière phrase est très ambiguë. Elle suggère que seuls les praticiens de secteur II seraient concernés, ce qui laisserait de côté environ un millier de médecins titrés (anciens chefs de clinique-assitants) bloqués en secteur I depuis leur choix d’origine (et qui misaient sur le secteur optionnel pour accéder aux compléments d’honoraires remboursés).
Cette hypothèse (l’exclusion des secteur I) fait hurler la CSMF. « C’est un piège grossier, ce n’est pas du tout le secteur optionnel que nous avions signé, tonne le Dr Michel Chassang, président du syndicat. Si le projet de Xavier Bertrand consiste seulement à forcer les mutuelles qui ne le faisaient pas à rembourser des dépassements des praticiens de secteur II, cela ne résout rien ! Ni la situation des spécialistes titrés bloqués en secteur I, ni le rapprochement tarifaire entre secteur I et secteur II, ni le sort de toutes les autres spécialités. Sans compter qu’il n’y aucun investissement sur les honoraires ». Pour nous, ajoute-t-il, c’est « niet ». Même colère au SML dont le président Christian Jeambrun ne cache pas son exaspération. « Un certain nombre de députés ont clairement décidé de nous marcher dessus dans ce PLFSS en s’attaquant au secteur II, estime-t-il. Du coup, Xavier Bertrand leur donne des gages sur les dépassements avec un projet qui occulte totalement les praticiens de secteur I. Ce n’est pas le secteur optionnel, c’est une mascarade ». Pour ces deux syndicats, pas question de promouvoir une option qui ne serait réservée qu’aux praticiens de secteur II.
Dans ce climat pesant, la porte d’une négociation ultime entre la Sécu, les médecins et les complémentaires santé est-elle définitivement fermée d’ici à la fin du parcours parlementaire du PLFSS ? « Pour l’instant, nous nous en tenons à notre proposition, a souligné Xavier Bertrand. Si un accord intervient, tant mieux. Si tel n’est pas le cas, nous aurons renforcé l’accès aux soins et la prise en charge des dépassements ». Parallèlement, la CNAM lancera de nouveaux contrôles sur les professionnels qui ne respectent pas le tact et la mesure, en ville comme à l’hôpital, a assuré le ministre dans l’hémicycle.
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