Madame le ministre,
Je viens d’avoir 64 ans, premier remplacement en 1975 puis un an sous les drapeaux, installation comme médecin généraliste en 1978. J’ai donc 40 ans de métier ce qui, à raison de 60 à 70 heures de travail par semaine, fait environ 80 ans de la vie professionnelle d’un aiguilleur du ciel mais, c’est vrai, qu’ils ont, eux, un métier stressant. Sans compter les gardes de nuit et de week-end que j’assure toujours n’en déplaise au Dr Pelloux.
Depuis 18 mois, je cherche un successeur et, telle « sœur Anne »...
Je n’exerce pas à «Trifouillis-Les-Oies » mais dans un charmant village médiéval équidistant de 20 km avec le CHU de LYON et le CHR de Villefranche sur Saône, entouré de 3 cliniques privées avec tout l’arsenal technique et professionnel pour effectuer des examens de qualité dans des délais courts.
Précurseurs, nous avons créé il y a 25 ans, sans subvention mais avec nos deniers, une maison médicale avec 4 médecins, 3 kinésithérapeutes et un orthophoniste.
Impliqué dans la formation initiale je revendique 75 internes qui sont passés par mon cabinet, quant à la formation continue, ceux qui me connaissent savent l’énergie que j’y ai déployée pendant 25 ans.
Personne… personne pour reprendre même gratuitement mon cabinet car, comme nombre de mes confrères, j’ai tiré un trait sur la vente hypothétique d’une patientèle qui n’aurait d’autre finalité que de payer l’année suivant mon départ, des charges qui seront supérieures au montant de la pension versée par la CARMF !
Alors pourquoi ? Parce que vous, les hommes et les femmes politiques, avez depuis des années saboté notre métier :
1°/ En nous octroyant des « déshonoraires » 23 euro le C (c’est-à-dire 11,50 euros nets) c’est le prix de l’heure net de ma femme de ménage.
2°/ En ne traduisant pas dans l’égalité du traitement C=CS celle des diplômes, nous abreuvant de propos démagogiques « pierre angulaire de la médecine, pivot du système de soins ».
3°/ En ne réformant pas notre caisse de retraite qui sera sous peu en cessation de paiement.
4°/ En continuant de charger la barque des contraintes des humiliations et des vexations dont l’une des conséquences, vous ne le savez peut être pas (et, si vous le savez, on ne vous a pas beaucoup entendue sur ce sujet), c’est que la profession de médecin détient dans notre pays le record des suicides, 2 fois plus que dans la police ou chez France Télécom. Depuis que j’exerce, ce sont 11 confrères, amis, correspondants ou collègue de proximité qui ont mis fin à leurs jours.
Je m’étonnais dans ces pages il y a quelques mois, après la lecture d’une promotion de la légion d’honneur, du nombre de journalistes et d’obscurs fonctionnaires distingués dont la principale vertu était d’avoir simplement bien fait le travail pour lequel ils étaient payés. L’absence récurrente de médecin généraliste dans cet ordre illustre l’estime dans laquelle nous tient la république.
À vous lire, Madame le ministre, et à vous écouter dans les médias j’ai le sentiment que vous avez beaucoup de certitudes… alors, pour ma succession, je fais quoi ?
Soins palliatifs : le gouvernement promet d’« intensifier les efforts » en 2025
Le CCNE invite la médecine à prendre ses responsabilités face aux vulnérabilités qu’elle crée
Transition de genre : la Cpam du Bas-Rhin devant la justice
Plus de 3 700 décès en France liés à la chaleur en 2024, un bilan moins lourd que les deux étés précédents