Depuis l’annonce d’un 3e confinement dans les régions où la Covid-19 connaît une recrudescence sans précédent depuis un an, on a beaucoup glosé sur le contenu et la forme des actions coercitives imposées aux citoyens. Les tergiversations autour des messages délivrés par le gouvernement (qui ont abouti quelques jours après l’annonce des nouvelles mesures à un joli slogan rythmé « Dedans avec les miens, Dehors en citoyen ») ont effectivement appauvri le sens de ce nouveau confinement. Même le Président de la République en a finalement répudié la définition en le qualifiant de « nouvelles mesures de freinage », tellement la forme qu’il a prise s’est de plus en plus éloignée de ce qui se pratique partout ailleurs en Europe où l’on cherche également à endiguer cette 3e vague.
Pourquoi donc pousser la population à profiter du plein air pour endiguer les contaminations ? En un an, les connaissances scientifiques concernant les modes de transmission ont énormément évolué. Alors qu’en février 2020, par analogie avec le SARS-CoV qui se transmet majoritairement par l’émission de grosses gouttelettes (donc par contact inférieur à un mètre et voie manuportée), on pensait que l’essentiel des contaminations s’effectuait par la parole (« l’art du postillon ») et les objets contaminés par les mains souillées.
Plusieurs études de chaînes de contamination dans des restaurants, bus, et autres salles de réunion où des personnes qui se sont trouvées infectées n’avaient pas de contact direct entre elles, en dehors du fait de partager le même espace pendant plusieurs heures, ont fini par démontrer qu’une bonne partie des contaminations avait également lieu par aérosolisation, comme la rougeole ou la tuberculose par exemple.
L’Organisation Mondiale de la Santé a, dès la mi 2020, insisté sur ces nouvelles modalités de transmission, en préconisant par exemple l’aération des pièces de vie. En parallèle, il a été démontré que la transmission manuportée était probablement anecdotique avec un virus peu résistant à l’état viable sur les surfaces inertes, évitant ainsi que l’on continue de décontaminer à l’eau de javel les courses effectuées au supermarché comme on l’a vu pratiquer dans de nombreux foyers en mars 2020.
Ainsi, les connaissances se sont affinées et ont permis d’aboutir à une meilleure compréhension des situations optimales de propagation du virus : espaces clos, peu aérés, où des individus exercent une activité obligeant à enlever le masque, excellente mesure barrière à l’émission et à la réception de gouttelettes ou d’air chargés de virus.
Les situations au cœur de l’accélération épidémique sont légion
Et si dans ce contexte survient un variant viral dont l’excrétion est plus importante et plus longue, on comprend que les situations au cœur de l’accélération épidémique sont légion : la famille, l’école par les cantines et les rassemblements périscolaires, la restauration en entreprise, et toutes les situations où s’exprime le ras-le-bol d’une population ayant le sentiment de vivre sous cloche depuis un an (les fêtes privées, les restaurants clandestins, les repas festifs au soleil sur les berges des canaux et rivières de France)…
Tout l’art des nouvelles mesures de freinage épidémique a été de s’appuyer sur l’évolution des connaissances scientifiques en tenant compte de l’acceptabilité de ces mesures au regard des conséquences sociétales et économiques d’un confinement dans ses acceptions strictes (confiner, v. transitif direct = forcer à rester dans une limite). D’où l’idée de sortir et de s’aérer tout en restant dans la limite (de son domicile, de son quartier, de son rayon de 10 km), soit l’expression d’un nouvel art, celui de « s’exfiner ».
Toute la question dans les prochaines semaines (voire même les prochains jours) sera de savoir si ce pari de l’exfinement permettra de diminuer la pression angoissante que vivent les hôpitaux, alors que la dynamique de l’épidémie est en croissance exponentielle dans plusieurs régions de France, et pas toujours celles où la densité de population (source de plus grande promiscuité) est la plus importante.
L’autre définition de confiner (v. transitif indirect) est de « toucher aux limites ». Sans doute qu’à avoir trop attendu pour exfiner, on va toucher aux limites de la méthode, et des mesures qui auraient pu être suffisantes en janvier quand l’incidence était à 300 cas / 100 000 habitants, risquent de ne plus l’être à 1 000 cas / 100 000. Quel sera le prix à verser pour avoir essayé de gagner un pari politique ?
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