La droite et Macron ne se font pas de cadeaux

L'importance des législatives

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Publié le 18/05/2017
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L'importance particulière des législatives

L'importance particulière des législatives
Crédit photo : AFP

La nomination d'Edouard Philippe au poste de Premier ministre et la composition très élaborée de son gouvernement constituent les deux armes que le président Macron s'est données pour gagner les législatives. Il a voulu une équipe large comprenant en son sein des sensibilités politiques très différentes. Il ne s'agit pas, pour ces personnalités, de renier leur appartenance à leur parti d'origine, même si leur choix de servir sans attendre est vivement critiqué par leurs pairs. Il s'agit de contribuer à une sorte de rassemblement des bonnes volontés, d'adhérer à une ligne politique réformiste claire et de contribuer à sortir le pays de l'ornière économique et sociale où il est enlisé.

M. Macron a été offensif : il ne sollicite pas la droite, il tente de lui imposer la  dynamique qui l'a hissé au pouvoir, comme pour la mettre devant le fait accompli. Elle résiste de toutes ses forces. Même Alain Juppé, dont le nouveau Premier ministre est un affidé, s'est contenté de dire que M. Philippe avait le talent requis pour le poste qui lui a été confié, mais il a expliqué qu'il fallait attendre le résultat des législatives pour savoir comment les Républicains trouveraient leurs marques à l'Assemblée. Il a donc pris le soin, lui qui nourrit de la rancœur à l'égard de MM. Sarkoy et Fillon, de ne pas compromettre son appartenance à son parti.

Celui-ci a tout fait pour empêcher les ralliements à M. Macron. Tous les Républicains qui ont été tentés par le macronisme ont été menacés d'expulsion.  Eric Ciotti n'a pas mâché les mots par lesquels il juge la nomination de M. Philippe. Bernard Accoyer a rappelé que le simple recrutement du maire du Havre par la République en marche ne correspondait à aucun accord d'appareil. Ces positions hostiles traduisent, à n'en pas douter, la loyauté de ceux qui s'expriment à l'égard de leur propre parti. Elle ne correspond pas, néanmoins, à une vision politique claire.

Une hostilité stratégique

Le durcissement des attitudes avant les législatives est compréhensible dans le camp des extrêmes. Jean-Luc Mélenchon et les porte-parole de l'extrême droite ne tarissent pas de sarcasmes en utilisant d'ailleurs le même argument, à savoir que le mélange gauche-droite tel que le pratique M. Macron est la continuation d'une gouvernance bicéphale qui n'a jamais cessé d'exister, alors que, en réalité, il s'agit de souder des points de vue que rapproche une crise nationale de grande ampleur.  Il est moins compréhensible en ce qui concerne le PS (« Premier ministre de droite, cela veut dire qu'il faut plus de gauche à l'Assemblée », a dit M. Cambadélis) au moment où Bernard Cazeneuve accueille très chaleureusement Edouard Philippe à Matignon : on aurait cru qu'ils étaient du même bord. A droite, l'hostilité à l'égard du nouveau président est plus stratégique qu'idéologique : les Républicains veulent garder leur influence sur l'évolution du pays, il leur faut des effectifs parlementaires. Mais comment ne pas tenir compte de l'appel de 28 républicains (dont Nathalie Kosciusko-Morizet, Benoît Apparu, Christian Estrosi, Thierry Solère, Gérald Darmanin, Jean-Louis Borloo) qui demandent que LR saisisse la main tendue par le président Macron ? A s'opposer à un mouvement en profondeur qui va bien au-delà des guerres picrocholines, le parti risque de se briser.

Quoi qu'il en soit, au lendemain des législatives, il faudra bien que ceux qui font de la politique raisonnablement accusent réception des messages que le peuple leur a envoyés : il y a un président et un Premier ministre désignés par le suffrage universel. Il y aura une représentation nationale. Le bien du pays, c'est que l'exécutif et le législatif travaillent harmonieusement, ne fût-ce que pour écarter les extrêmes.

 

 

 

 

 

Richard Liscia

Source : Le Quotidien du médecin: 9582