USAGERS, chercheurs, assureurs... Tous attendent avec impatience l’accès public aux données de santé, comme en témoignent les 2 400 signatures récoltées par la pétition « Initiative transparence santé ». Lors d’un récent colloque parlementaire organisé par le cercle des décideurs Numérique et santé et présidé par le député socialiste Pascal Terrasse, plusieurs experts ont appelé à ne pas entretenir trop d’espoirs. Les partisans de la totale transparence plaident en effet pour une ouverture rapide des bases, réglementée et sous le coup d’une gouvernance robuste. À la clef, de nouvelles études épidémiologiques sont espérées, qui auraient des répercussions jusqu’en pharmacovigilance, et des améliorations en santé publique, comme par exemple une surveillance des pathologies chroniques plus pertinente.
« Fantasme », leur répond en substance l’économiste de la Santé Claude Le Pen, professeur à l’université Paris Dauphine, qui a refusé de signer la pétition d’Initiative transparence. « Quelle sera la valeur scientifique, éthique, économique qu’on pourra tirer des données ? Elle ne sera jamais que le reflet de ce qu’on y mettra en terme d’intelligence. On aura de bonnes réponses que si l’on pose les bonnes questions », développe Claude Le Pen. Selon l’économiste, il n’y a pas de « grand soir » à attendre de la libération des données, aucune Bastille à prendre – à savoir la caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM), qui détient la plus grande base de données, le système d’information interrégimes (SNIIRAM). Il faudrait abandonner l’idéal de machines qui, moulinant des data, se retrouvent à penser. « C’est une pure illusion d’imaginer qu’en combinant toutes les variables, on obtiendra une connaissance sans intelligence, sans hypothèse, sans théorie » dénonce Claude Le Pen. « Le Big data change tout et rien. On a accès à des informations sans précédent, mais cela ne change pas la manière de faire progresser la connaissance », conclut l’économiste.
Quelles données pour qui ?
Plus qu’à une libération anarchique des données de santé, la tendance est davantage à un accès gradué et adapté au public requérant. C’est là toute la mission d’Etalab, le service du Premier ministre chargé de l’ouverture des données publiques. « Dès lors qu’on reconnaît la nécessité d’accéder à ces informations, il faut faciliter leur accès sur une plateforme. Concrètement nous définissons ce qui est de l’ordre de la donnée publique et doit être porté à la connaissance de tous », explique Romain Lacombe, chargé innovation et développement à Etalab.
L’enjeu est immense au regard de la fragmentation du secteur de la santé et du nombre d’organismes récoltant des données. « Le problème consiste à trouver les bases, à savoir se référencer. L’Open Data ne doit pas être un fourre-tout, où l’État se déchargerait du sujet, ni le prétexte pour attaquer la CNAM de manière sordide », résume Norbert Paquel, représentant santé du Groupe français de l’industrie de l’information (GFII), qui réunit industriels et acteurs publics.
Après deux burn-out, une chirurgienne décide de retourner la situation
La méthode de la Mutualité pour stopper 2,4 milliards d’euros de fraude sociale
Yannick Neuder lance un plan de lutte contre la désinformation en santé
À la mémoire de notre consœur et amie