Dès le mois de mars, le sport sur ordonnance pourra théoriquement se développer, à la faveur d'un décret d'application de la loi de santé, paru le 31 décembre. À ce stade pourtant, médecins du sport, associations et mutuelles réclament une clarification sur la mise en œuvre de cette réforme, ainsi que l'ont montré les rencontres du Comité Opéra, un think tank de la Fédération nationale indépendante des mutuelles (FNIM), à Paris.
À la lumière de nombreuses publications scientifiques, tous les intervenants soulignent le rôle primordial des activités physiques et sportives (APS), à la fois comme soin complémentaire et source de diminution des coûts de santé.
Par exemple, réduire la part de personnes inactives de 5 % permettrait une économie de 82 millions d'euros par an sur les dépenses liées aux maladies cardiovasculaires. « Environ 70 % du budget de l'assurance-maladie est consacré aux pathologies chroniques, souligne le député médecin Jean-Pierre Door (LR), membre de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. Si on veut stabiliser ces dépenses, il faut miser sur la prévention, quasiment absente de notre système de santé, alors qu'elle est utile et permet de réduire les coûts notamment de médicaments ».
Qui financera ?
Mais des inquiétudes majeures portent sur les lieux de pratique de ces activités physiques et surtout sur le flou du financement, pourtant nerf de la guerre. « Certains sites de pratique sportive seront-ils labellisés ? Quant à la question de la prise en charge financière, nous n'avons pas de réponse du ministère pour le moment », regrette le Pr Xavier Bigard, président de la Société française de médecine de l'exercice et du sport (SFMES). De fait, le décret ne précise pas les moyens permettant d'intégrer pleinement ces programmes dans le parcours de soins.
« Sur le plan pratique, quelles seront les applications directes de ce décret ? Qui va payer ? Les personnes en ALD sont remboursées à 100 % par la Sécu, mais les prescriptions d'activité pour des personnes "valides" seront-elles prises en charge par les mutuelles ? », s'interroge le Dr Christian Bénézis, président de la Fédération nationale des offices municipaux du sport (FNOMS).
Dans une tribune au « Monde » du 18 janvier, Jean-Marc Descotes, cofondateur de la Fédération nationale CAMI Sport et Cancer, se montre extrêmement critique sur la portée de la réforme, le décret ayant balayé ses espoirs initiaux. « Le ministère de la Santé a choisi l'immobilisme enrobé d'une opération marketing (...). En évitant soigneusement l'aspect financier de la prise en charge de ces programmes, il ne peut garantir ni la pérennité des actions, ni l'implication des acteurs, ni l'efficacité réelle des séances d'APS proposées ».
Les complémentaires dans la course
Autre crainte récurrente : le manque d'intérêt des médecins traitants pour la prescription des séances d'APS, faute de temps – des consultations longues sont nécessaires – et de tarifs adaptés. « Les médecins seront peut-être plus motivés si la consultation de 45 minutes se situe autour de 60 à 70 euros, la question se posera forcément lors de la mise en application de ce décret », estime le Dr Bénézis.
Certaines mutuelles incluent déjà des garanties de « sport sur ordonnance » et remboursent les consultations médicales spécifiques jusqu'à 65 euros. D'autres se tiennent prêtes… « La mutuelle a une obligation de prévention, c'est inscrit dans nos statuts, explique Philippe Mixe, président de la Fédération nationale indépendante des mutuelles (FNIM). Nous voulons prendre à bras-le-corps le sujet de l'activité physique et sportive ».
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