En héritant il y a une semaine du ministère de la Santé et de la Prévention, Brigitte Bourguignon trouve sur son bureau plusieurs dossiers sensibles, voire explosifs. L'ancienne travailleuse sociale est d'ores et déjà confrontée à une énième crise des urgences, qui est en train de prendre une ampleur inquiétante. Fermetures de nuit, délestages sur d'autres hôpitaux, accès filtrés par les Samu : au moins « 120 services en détresse » ont été répertoriés par Samu-Urgences de France, soit presque un sur cinq. Une situation catastrophique à l'approche d'un été qui s'annonce extrêmement tendu, de l'aveu de tous les experts. Plus généralement à l'hôpital, deux ans après le Ségur, c'est un « électrochoc » sur les moyens et effectifs qui est à nouveau réclamé, à l'heure où une majorité d'hospitaliers subissent un niveau de stress jugé « inacceptable ». Lors du récent congrès Santexpo, le patron de la FHF, Frédéric Valletoux, grave, a pointé une « situation critique », qu'il s'agisse du taux d'absentéisme, des difficultés à recruter, des dérives de l'intérim ou des blocs au ralenti, réclamant des mesures « rapides, fortes, profondes et durables », et non pas un « long cycle de constats ».
Mais la grogne monte aussi en médecine de ville, secteur éreinté par deux ans de crise, où les revendications tarifaires s'amplifient avant de lancer à la rentrée les discussions en vue de la nouvelle convention médicale. La CSMF réclame une réévaluation de l'ensemble des consultations selon leur complexité – de 30 à 105 euros – et un nouvel espace de liberté tarifaire. Pour l'UFML-Syndicat, qui ne fera pas de « mauvais procès » à Brigitte Bourguignon, « l’urgence est là, terrible et sans précédent ». Sans attendre le nouveau round conventionnel, la « conférence des parties prenantes », annoncée par le candidat Macron pour trouver dès cet été des solutions aux graves difficultés d'accès aux soins, sera le premier test pour la ministre – avec un « changement de méthode » très attendu et des solutions à la carte. Ce n'est pas un hasard si Brigitte Bourguignon a consacré son premier déplacement à écouter des soignants dans une maison de santé ouverte aux évolutions. De fait, la question des déserts médicaux s'est imposée lors de la campagne présidentielle et des arbitrages délicats sont attendus (redoutés ?) sur la liberté d'installation, la question des gardes obligatoires ou les délégations de tâches.
Dans les Ehpad enfin, dont le modèle a été fragilisé par le livre enquête « Les Fossoyeurs », Emmanuel Macron a certes promis 50 000 nouveaux postes d'infirmières et d'aides-soignants sur cinq ans, une promesse qu'il faudra mettre en musique… alors que les candidats font défaut. Alors ministre déléguée en charge de l'autonomie, Brigitte Bourguignon avait annoncé, en mars dernier, avec Olivier Véran, un train de mesures visant à renforcer les contrôles dans les Ehpad. Mais il en faudra beaucoup plus pour répondre à l'indignation des Français et au malaise du secteur.
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