Sept lauréats et deux coups de cœur, c'est le palmarès récompensé cette année par le prix Galien par les jurys des volets Médicament, Travaux de recherche, Dispositif médical, Accompagnement du patient et E-santé.
Volet Médicament
Le vaccin Ervebo contre Ebola, une success story
Catégorie ambulatoire
La mise au point d'Ervebo (MSD), premier vaccin vivant atténué contre l'infection à virus Ebola est une histoire atypique. Ce vaccin rVSV-ZEBOV, constitué du virus de la stomatite vésiculaire (VSV) dans lequel est inséré le gène codant la protéine d’enveloppe de la souche de virus Ebola Zaïre, était depuis longtemps dans les cartons de la recherche clinique canadienne. Mais c'est l'épidémie survenue en Afrique de l'Ouest, entre la fin 2013 à la mi 2016, qui a donné l'occasion d'expérimenter ce vaccin en condition réelle lors de programmes de recherche d'urgence inédits en leur genre.
Mis en place très rapidement grâce à une coopération serrée entre autorités sanitaires et chercheurs, l'essai « Ebola, ça suffit ! » mené sur 5 837 personnes a fourni d'excellents résultats d'efficacité dès juillet 2015 pour une utilisation « en ceinture » (qui consiste à vacciner les contacts des malades confirmés, puis les contacts des contacts). Ces résultats ont été confirmés par d'autres essais en Sierra Leone puis, à partir de 2019, par une utilisation en routine lors des deux épidémies qui ont touché la République démocratique du Congo. En février 2020, le vaccin a reçu une autorisation de mise sur le marché dans quatre pays africains. Il est également autorisé en Europe depuis octobre 2020.
L'infection par le virus Ebola est caractérisée par des symptômes pseudo-grippaux et gastro-intestinaux, avec de possibles manifestations hémorragiques associées à des signes de défaillance multi-organes. L'infection est mortelle pour 25 à 90 % des malades.
Onpattro, premier ARN interférent double brin
Catégorie thérapie innovante
Onpattro (patisiran, laboratoire Alnylam France) est un médicament indiqué dans le traitement de l’amylose héréditaire à transthyrétine (amylose hATTR) des adultes atteints de polyneuropathie de stade 1 ou 2. Cette spécialité a obtenu le statut de médicament orphelin dans cette indication et dispose depuis 2018 d'une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) de cohorte et d'ATU nominatives.
Onpattro est le premier ARN interférent double brin autorisé. Encapsulé dans des nanoparticules lipidiques, il cible spécifiquement l’ARNm qui code pour la TTR mutée ou sauvage responsable de l'hATTR.
En 2014, environ 700 Français présentant une forme polyneuropathique d'hATTR ont été diagnostiqués, dont 500 étaient symptomatiques (réseau ATTReuNET). Cette maladie rare et systémique de l'adulte est caractérisée par une accumulation de TTR sous forme de fibrilles amyloïdes au niveau des nerfs, du cœur et du système digestif. Le décès survient généralement du fait d’une insuffisance cardiaque ou de complications du décubitus dans un délai médian de 4,7 ans après le diagnostic.
Alors qu'aucun traitement associant efficacité et profil satisfaisant de tolérance pour la grande majorité des patients n'avait fait ses preuves, ce médicament permet de réduire les dépôts amyloïdes dans les tissus grâce à une réduction de 80 % de la concentration de TTR circulante.
En s'appuyant sur l'étude Apollo, la Haute Autorité de santé (HAS) lui a accordé en 2019 un service médical rendu (SMR) important, une amélioration du service médical rendu III (ASMR), un intérêt de santé publique positif et l’a positionné en traitement de première intention. Cette étude a mis en évidence une amélioration significative des symptômes liés à la neuropathie et une amélioration de qualité de vie. Onpattro a obtenu le prix Galien en Hollande et en Italie l’année dernière, et cette année aux États-Unis.
Travaux de recherche
Le lacutamab dans les lymphomes T cutanés
La Pr Martine Bagot, chef du service de dermatologie de l'hôpital Saint-Louis (AP-HP), et le Dr Armand Bensussan, directeur de l’unité INSERM UMR-S 976, ont été récompensés pour leurs travaux sur le lacutamab. Cette immunothérapie de première génération est prometteuse dans le traitement des patients atteints de lymphomes T cutanés (LTC) avancés, réfractaires et en rechute, en particulier les LTC érythrodermique (LTCE).
Cette collaboration a permis l'identification de l’antigène tumoral KIR3DL2, un marqueur diagnostique et pronostique des LTC, puis le développement d'un anticorps monoclonal ciblant cette molécule avec la société de biotechnologie Innate Pharma. Le lacutamab a obtenu de l'Agence européenne du médicament (EMA) le statut de médicament orphelin pour le traitement des patients LTC, alors qu'il n'existe pas de traitements curatifs et très peu de traitements disposant d'une AMM chez ces patients.
Un essai international de phase I mené par la Pr Bagot auprès de 44 patients atteints de LTC avancés et en rechute, lourdement prétraités, dont 35 ayant un syndrome de Sézary (une forme sévère de LTCE), a montré des améliorations en termes de survie sans progression, de réponse clinique et de qualité de vie.
Dispositif médical
Hypernova Chronos, une désinfection express des sondes d'écho
Chaque année, on assiste à de trop nombreuses infections évitables par des sondes d'échographie : des méthodes de désinfection doivent être trouvées. Le ChronosTM, mis au point par la société française Germitec, répond à cette problématique sans avoir recours à un agent chimique dommageable pour la tête de lecture ou agressif pour le patient.
La désinfection s'opère grâce à une exposition de 90 secondes à des photons UV-C qui viennent altérer l’ADN bactérien et/ou viral. Cette courte durée d'exposition est à comparer aux 7 à 25 minutes nécessaires pour une désinfection chimique. Son efficacité a été évaluée contre le HPV éliminé à 100 %. Le dispositif est capable de vérifier lui-même la qualité de la désinfection à l'aide de capteurs optiques, ce qui évite toute intervention de l'opérateur et ainsi tout risque d'intoxication ou de brûlure.
Accompagnement du patient
« À l'hôpital, c'est permis ! » par Les Z'enfants de l'auto
Le Prix Galien récompense le programme « À l'hôpital, c'est permis ! », développé par l'association Les Z'enfants de l'auto, en partenariat avec l’unité fonctionnelle de médecine de la douleur et de médecine palliative de l’hôpital Necker-Enfants malades et le réseau Auto-école.net, pour accompagner les jeunes patients souffrant de maladies chroniques lourdes et/ou délabrantes à décrocher leur permis de conduire à l'hôpital.
Très souvent, ces jeunes redoutent la vie après l'hôpital pour enfants, où une fois majeurs, ils devraient prendre leur envol. Par peur de la stigmatisation, du regard des autres, ou parce qu'elle n'est pas adaptée au handicap ni à des emplois du temps ponctués par les hospitalisations, ils n'oseront franchir le seuil d'une auto-école.
Grâce au programme « À l'hôpital, c'est permis ! », les adolescents, identifiés par l'équipe soignante, peuvent apprendre le code de la route grâce à des modules en ligne sur tablettes, puis prendre des leçons de conduite à la carte, tout cela, entièrement pris en charge par Les Z'enfants de l'auto.
E-santé
OdySight facilite le suivi des maculopathies chroniques
Dans la catégorie « amélioration dans la prise en charge d’une pathologie », le Prix Galien a été attribué à l’application OdySight, qui permet une surveillance de la vision via un jeu vidéo. Destinée au suivi des patients atteints de maculopathies chroniques, l’application permet une surveillance à domicile, entre les consultations, et facilite la prise en charge précoce d’une dégradation de l’acuité visuelle en fournissant des données cliniques au médecin.
L’outil est né de la rencontre entre Édouard Gasser, directeur général de la société Tilak Healthcare, et du Pr José-Alain Sahel, directeur de l’Institut de la Vision. En réponse aux besoins des patients et des ophtalmologues, OdySight se compose de modules médicaux et de puzzles, qui permettent de récupérer des données sur certains paramètres visuels, comme les scotomes et métamorphopsies.
Déjà prescrit par plus de 300 ophtalmologistes à plus de 2 500 patients, OdySight vise un remboursement d’ici 2023, suite à la soumission d’un dossier pour article 51. La solution devrait par ailleurs être diffusée sur les territoires européen et américain dès le début 2021, dans le cadre d’un partenariat avec Novartis France signé en 2019. À terme, l’ambition est d’élargir l’usage à d’autres pathologies comme la cataracte ou le glaucome.
Okchimio, pour les cures en hôpital de jour
Dans la catégorie « Grandes entreprises », le Prix Galien est revenu à la plateforme Okchimio.fr développée par le laboratoire Janssen France. L’outil vise à limiter les annulations d’administration de traitements anticancéreux en hôpital de jour.
Certaines séances peuvent être reportées en cas de symptômes chez le patient ou en l’absence de bilan sanguin le jour de l’administration du traitement. Le site Okchimio.fr permet à l’infirmière de s’assurer à J-1 que leurs patients seront en mesure de recevoir leurs cures ou au patient de s’autoévaluer via un questionnaire administré par un chatbot (robot conversationnel). À l’issue, si les réponses ne sont pas validées, le patient devra appeler son équipe soignante. Pendant la crise épidémique, un pré-questionnaire s’attardait sur les symptômes du Covid-19.