En 1941, les autorités nazies créèrent à Strasbourg une « université du Reich » dont les enseignants allemands, en médecine comme ailleurs, prirent les locaux et les fonctions de la faculté française, repliée à Clermont Ferrand depuis septembre 1939.
L’université allemande de Strasbourg, qui ne peut en aucun cas être présentée comme le « successeur » de l’université française, disparut, elle, en octobre 1944. Si la plupart de ses professeurs eurent un comportement normal, quelques-uns, nazis fanatiques, se compromirent gravement en réalisant notamment des expériences sur des déportés du camp du Struthof, situé à une cinquantaine de kilomètres de Strasbourg. Outre le Pr Hirt, condamné à mort par contumace en 1952, deux autres médecins, les Pr Bickenbach et Haagen, furent condamnés à vingt ans de prison, mais graciés au bout de quelques années. Le Pr Haagen, virologue de renom international avant la guerre, avait notamment effectué, sur des déportés, des essais afin de mettre au point un vaccin contre le typhus.
La Faculté de Médecine de Strasbourg a toujours rappellé qu’elle n’a pas à « assumer » les crimes commis pendant la guerre : évacuée à Clermont-Ferrand dès 1939, où elle fonctionna jusqu’en 1945, elle n’a donc aucune responsabilité, ni aucun lien, avec la « Reichsuniversität » nazie. Beaucoup de ses enseignants et de ses étudiants ont payé un lourd tribut à la guerre. En novembre 1943, une rafle déboucha sur l’arrestation et la déportation de plusieurs de ses professeurs.
Question sur le rôle du corps médical
Toutefois, certains médecins, en premier lieu le psychiatre strasbourgeois Georges Federmann, estiment depuis une vingtaine d’années que la Faculté ne peut pas se retrancher derrière cette seule clause de non-responsabilité et doit pousser ses recherches plus loin, afin de mieux rendre hommage aux victimes des nazis et participer au devoir de mémoire. Le Dr Federmann a œuvré sans relâche dans ce sens, notamment pour dénoncer les crimes commis par le Pr Hirt en anatomie. En 2005, il a obtenu l’apposition d’une plaque, sur la porte de l’institut d’anatomie, pour rappeler les forfaits commis en ces lieux par le Pr Hirt. Pour lui, le problème dépasse largement celui de l’Alsace et de l’Allemagne, et pose la question plus large de la compromission du corps médical avec des idéologies totalitaires prônant l’anéantissement d’êtres humains, ou rejetant le caractère humain de certains groupes ou communautés.
Aujourd’hui encore, les questions touchant à l’Alsace pendant l’occupation, et de la reconnaissance ou non des crimes nazis commis dans la région, font polémique parmi les historiens et la population : l’Alsace se place toujours en situation de victime, mais certains historiens estiment toutefois qu’en tant que province annexée par l’Allemagne de 1940 à 1944, elle devrait se pencher d’une manière plus critique sur son passé. Si, dans le cas de l’anatomie, aucun Alsacien ne peut être mis en cause, le débat autour de ces fragments de corps attise une nouvelle fois un climat de malaise face au passé, qui n’a jamais vraiment été totalement apaisé.
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