Le groupe hospitalier (GHU) Paris Sainte-Anne lance cette semaine l'étude reCoVery, qui vise à évaluer la pertinence de la chlorpromazine (Largactil) dans le traitement du Covid-19. L'objectif est de savoir si cet antipsychotique découvert il y a près de 70 ans pourrait diminuer l'évolution défavorable de l'infection lorsqu'il est administré dès l'apparition des signes respiratoires, mais aussi s'il pourrait réduire la contagiosité du SARS-CoV-2.
Les investigateurs de l'étude, sous la coordination du Dr Marion Plaze (cheffe de service du Pôle Hospitalo-Universitaire Paris 15e), ont en effet observé que l'incidence des formes symptomatiques du Covid-19 était moindre chez les patients du GHU psychiatrie et neurosciences (4 %) que chez les soignants (14 %). Ce constat, qui recoupe ceux des unités psyCovid en France et d'équipes étrangères, fait l'objet d'une étude séro-épidémiologique lancée, parallèlement à reCoVery (intitulée Clever), chez les patients et personnels du GHU.
Potentiel d'inhibition large spectre des coronavirus
« Ces observations nous ont amenés à formuler l’hypothèse que la chlorpromazine (CPZ) pourrait avoir une action prophylactique sur le SARS-CoV-2 et protégerait les patients des formes symptomatiques et virulentes de cette infection », expliquent les auteurs dans un article publié dans « L'encéphale ».
Cette hypothèse se fonde également sur de précédentes recherches documentant une action antivirale de la chlorpromazine. Plusieurs études publiées en 2014 et 2018 mettaient en évidence l'efficacité de cette molécule pour inhiber la réplication virale du MERS-CoV et du SARS-CoV-1. La chlorpromazine agirait comme un inhibiteur de l’entrée du virus dans les cellules, en affectant l'endocytose dépendante des clathrines grâce à une interaction avec la dynamine. Un phénomène qui serait opérant à des stades précoces, mais aussi tardifs, de l’infection.
En outre, l'équipe du GHU, en collaboration avec l'Institut Pasteur, vient de montrer, via une expérimentation in vitro débutée en avril 2020, que cette molécule exerce également des effets antiviraux sur le SARS-CoV-2 sur des cellules humaines. L'étude devrait être disponible sous peu sur le site MedRxiv.
Objectif principal : observer le délai de réponse au traitement
L'essai thérapeutique pilote de phase III randomisé en simple aveugle, reCoVery, en collaboration avec l'AP-HP et la clinique de l'Alma (encore en attente de validation administrative ce 4 mai), porte sur des patients souffrant de Covid-19, hospitalisés pour des symptômes respiratoires, mais pas en réanimation avec ventilation mécanique. « Les mécanismes d’action de la chlorpromazine ciblent l’entrée du virus dans la cellule et bloquent la réplication virale au stade précoce de l’infection, ce qui laisse présager une plus grande efficacité de cette molécule en début de maladie, justifient les auteurs. De plus, la réduction de la prévalence des formes symptomatiques et virulentes de cette infection chez nos patients, en comparaison aux soignants, renforce l’hypothèse d’une efficacité de la chlorpromazine plus probable aux stades précoces de la maladie ».
Les patients seront randomisés à l’inclusion entre le groupe soins standards et le groupe chlorpromazine en association avec le traitement standard, où ils recevront jusqu’à 300 mg par jour de CPZ jusqu’à ce que les critères de guérison soient remplis, dans une limite de 21 jours maximum.
40 patients
Il est prévu d'inclure 40 patients, 20 dans chaque bras, précisent les auteurs « au Quotidien ». L'étude est d'une durée maximale de trois mois.
L’objectif principal est de démontrer un délai de réponse au traitement plus court dans le groupe avec chlorpromazine par rapport au groupe traitement standard. La réponse au traitement est définie par la réduction d'au moins un niveau de sévérité à la World Health Organization Ordinal Scale for Clinical Improvement (WHO-OSCI).
Les objectifs secondaires sont de démontrer dans le groupe avec antipsychotique une amélioration clinique supérieure et une diminution supérieure de la charge virale, des marqueurs inflammatoires, de l'atteinte parenchymateuse au septième jour, de définir la posologie optimale de chlorpromazine et sa tolérance, et d'évaluer les paramètres biologiques de réponse au traitement, notamment l’implication des cytokines inflammatoires. Les promoteurs regarderont également si, au-delà des bénéfices attendus sur l'évolution de l'infection, les patients verront diminuer l'anxiété fréquemment associée à la dyspnée provoquée par le Covid-19.
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