Un tiers des patients adultes récemment asthmatiques ne présenteraient plus de symptômes d'asthme et n'auraient plus besoin de traitement de fond, affirme une étude canadienne menée chez 613 patients âgés en moyenne de 51 ans et publiée dans le « JAMA ».
C'est la première fois qu'un tel chiffre chez l'adulte est avancé. Si la Société de pneumologie de langue française (SPLF) reconnaît dans ses dernières recommandations de 2015 la réalité de « rémissions cliniques sans récidive, en particulier chez les hommes », la société savante déplore qu'« hélas, cette éventualité est rare et sans facteur prédictif ».
Les auteurs canadiens proposent deux hypothèses pour expliquer la disparition de l'asthme en ces proportions surprenantes : rémission spontanée mais aussi… erreur de diagnostic initial. Deux problématiques importantes dans la prise en charge de l'asthme, comme le confirme le Pr Arnaud Bourdin, pneumologue à Montpellier et auteur du volet stratégies chez le patient asthmatique contrôlé dans les dernières recommandations SPLF.
Du surtraitement et du surdiagnostic en France
« Il existe du surtraitement et du surdiagnostic dans l'asthme, explique-t-il. En France, malgré les recommandations, près de 80 % des sujets asthmatiques n'ont jamais eu de spirométrie. C'est pourtant important d'affirmer le diagnostic, pour éviter le mésusage, convaincre les patients de la réalité de leur maladie et améliorer l'observance. » La position de la société savante française sur la nécessité d'une spirométrie a été récemment confortée à l'international dans les recommandations de la Global Initiative for Asthma (ginasthma) de mai 2016.
L'errance diagnostique peut avoir des conséquences non négligeables. Dans l'étude canadienne, 2 % des sujets souffraient en réalité de pathologies cardio-respiratoires graves passées inaperçues. « Des cas de mucoviscidose, jusque-là étiquetés asthmes, sont diagnostiqués tardivement, parfois à l'âge de 25 ans », rapporte le Pr Bourdin. Quant au surdiagnostic, il est fréquent, notamment chez les obèses sujets aux sifflements.
Dans ce travail prospectif outre-atlantique, l'équipe de Shawn Aaron de l'université d'Ottawa a mené une enquête téléphonique dans 10 villes du pays afin de recruter des adultes ayant un asthme récemment diagnostiqué par un médecin, dans les 5 années passées. Aux 701 participants inclus, il était demandé de mesurer leur peak-flow à domicile, de consigner leurs symptômes et d'aller réaliser à l'hôpital spirométrie et épreuve de provocation (test à la métacholine).
Le traitement de fond éventuel des patients était diminué par palier sur 4 visites. Parmi eux, ceux dont le diagnostic d'asthme actif avait été finalement écarté étaient suivis une année supplémentaire, sur le plan clinique et avec un test de provocation.
Une évolution fluctuante au cours de la vie
Sur les 613 sujets ayant terminé l'étude, le diagnostic d'asthme actif a été éliminé chez 203 participants (33 %). Au terme des 12 mois de suivi additionnel, 181 participants (30 %) ont continué à ne présenter aucun signe d'asthme ni clinique ni aux tests. Les auteurs soulignent que les sujets « guéris » avaient moins souvent réalisé les tests spirométriques au moment du diagnostic initial (44 % versus 56 %). Plus de 90 % des sujets sans asthme actif ont pu arrêter leur traitement sans rechute.
« La principale limite de cette étude est sa durée de suivi limitée, fait remarquer Arnaud Bourdin. On sait qu'il peut exister des périodes de rémission clinique, parfois longues sur 10, 20, 30 ans, mais les individus ayant fait de l'asthme sont souvent rattrapés par les symptômes à un moment donné de leur vie, à la faveur d'une infection virale par exemple, comme l'a récemment montré une étude australienne chez des enfants de 7 ans suivis pendant 40 ans. »
Une désescalade thérapeutique sous contrôle
L'asthme de début tardif vers l'âge de 50 ans est encore une grande inconnue en pneumologie, estime le Pr Bourdin. « Ce sous-groupe d'asthmatiques concernerait 30 % de la population globale, développe-t-il. Sont-ils d'anciens asthmatiques ayant connu une longue période de rémission ? Ou est-ce une maladie différente ? Les opinions personnelles sont partagées, rien n'est encore prouvé. »
Alors est-ce à dire qu'il n'est pas possible de guérir de son asthme ? « La guérison est une chose différente de la rémission, précise le pneumologue. La vraie guérison biologique est affirmée sur l'absence d'anomalie résiduelle des bronches. Cela concerne seulement 5 % des sujets masculins, et exceptionnellement les femmes. »
Le concept de désescalade thérapeutique n'en est pas moins mis en avant en cas d'asthme contrôlé par la SPLF mais… sous contrôle. « Dans les formes très peu symptomatiques, il est recommandé de diminuer par paliers les corticostéroïdes inhalés jusqu'à la dose minimale, estime le Pr Bourdin. L'interruption d'un traitement de fond est souvent à l'origine des passages aux urgences pour exacerbation sévère, il est donc recommandé de le maintenir. Néanmoins, dans certains cas, l'arrêt total de la corticothérapie inhalée peut éventuellement être envisagé si le contrôle total de l'asthme a été maintenu au moins une année. Le patient doit être prévenu de consulter rapidement en cas de perte du contrôle et d'avoir un traitement de secours. »
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