Le spécialiste du sida et des maladies infectieuses Jean-François Delfraissy a été nommé président du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), selon un décret paru ce 15 décembre au Journal Officiel. Il succédera le 4 janvier 2017, au professeur d'immunologie Jean-Claude Ameisen, à la tête du comité depuis novembre 2012, qui devient président d'honneur.
Le Pr Jean-François Delfraissy, 68 ans, est directeur de l'Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS) depuis juillet 2005 et directeur de l'Institut de microbiologie et des maladies infectieuses (IMMI). Il a également coordonné la lutte contre le virus Ebola en France en 2014-2015.
Cowboy de la recherche, dans le VIH
« Je suis fondamentalement un médecin. Un médecin chercheur », s'est-il présenté devant la commission des affaires sociales de l'Assemblée, le 6 décembre. Son parcours est marqué par le monde du VIH. « J'ai passé 32 ans de ma carrière à construire et à coordonner la recherche autour de l'infection au VIH », a-t-il déclaré, se qualifiant de « cowboy de la recherche », évoquant son exercice en banlieue, aux urgences, où il a acquis une « vision complète de la relation médecin/patient ».
« Prendre le patient debout et non allongé, le placer au cœur du débat, et même de la recherche », est l'une des grandes leçons qu'il a tirée de son combat contre le VIH. L'autre est sa connaissance des questionnements éthiques : la fin de vie des sidéens, la tolérance à l'hôpital, puis la construction d'une charte éthique à l'ANRS ; enfin, avec le groupe Ebola, l'acceptabilité des soins venus du Nord au Sud, la pertinence de mener un essai randomisé dans des conditions extrêmes, etc.
Pourquoi postuler au CCNE ? « À titre personnel, j'ai envie de prendre le temps de réfléchir, d'écrire sur des aspects touchant à l'éthique », après des années consacrées à l'urgence, a-t-il répondu.
Plus de place pour la parole des citoyens
« Je n'ai pas de plan pour le CCNE » a déclaré le Pr Delfraissy aux députés. « J'ai envie de comprendre, de regarder, d'écouter, avant d'agir. Un CCNE tourne, c'est une instance particulièrement intéressante » a-t-il complété, avant de le juger très élitiste, et de prôner une meilleure écoute des citoyens.
« Je n'y ai pas retrouvé totalement la place des citoyens. Ils sont bien sûr écoutés en tant que tels, mais on a affaire à une sorte d'élite intellectuelle, qui est très pertinente, mais qui manque de l'avis de la base », a-t-il observé.
À côté des grands sujets dont s'est déjà emparé le CCNE, comme l'assistance médicale à la procréation, la fin de vie, et les neurosciences, certains aspects sociétaux mériteraient réflexion et anticipation, a estimé le Pr Delfraissy : le vieillissement et le bien-vieillir, le coût et l'accès aux innovations thérapeutiques, la révolution des big-data, la santé des migrants, la construction des organes bio-artificiels en 4D.
Le Pr Delfraissy a aussi évoqué la révision de la loi de bioéthique, en 2018, et plaidé pour l'organisation des états généraux citoyens de la bioéthique.
Enfin, il a fait part de son désir de jeter un regard sur les aspects internationaux, tant à l'échelle de l'Europe (« est-ce logique de faire ainsi les choses en France, et différemment en Belgique ? » s'est-il interrogé), que du monde, notamment francophone. « Il me semble que pour la maison France, il y a une carte à jouer pour aider nos amis du pays du sud à réfléchir autour des problèmes majeurs d'éthique » a-t-il dit.
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