Les femmes sont encore trop peu nombreuses à accéder à des postes à responsabilités, et le domaine de la recherche ne fait pas exception, d'autant plus que les sciences restent encore largement associées aux hommes dans l'esprit collectif. Une étude française parue dans « Nature Human Behaviour » met en évidence l'influence de ce stéréotype sur ce constat.
Pour cela, des chercheurs en psychologie sociale et cognitive se sont intéressés à 414 membres de 40 jurys de différents domaines scientifiques chargés d'évaluer les candidatures aux postes de directeurs et directrices de recherche du CNRS. « Notre étude est la première à avoir été menée en situation de concours réel et dans tous les domaines scientifiques, de la physique des particules aux sciences sociales », indique au « Quotidien » Isabelle Régner, enseignante-chercheuse à Aix-Marseille Université.
La moitié des jurys influencés par des biais implicites
Les membres des jurys ont été suivis pendant 2 années consécutives. Lors de la première année, ils ont été amenés à passer un test dit d'association implicite (IAT). Ce test, qui se présente sous la forme d'une tâche informatisée consistant à classer le plus rapidement possible des mots dans leur catégorie d’appartenance, a été mis au point par Anthony Greenwald dans les années 1990 afin d'étudier les associations d'idées préconçues, comme celle selon laquelle les sciences sont surtout masculines. « Un algorithme calcule un score à partir des temps de réponses et permet de mesurer à quel point une association entre certains concepts est fortement ancrée chez une personne donnée », explique Isabelle Régner. Les résultats des tests ont montré que la plupart des participants associent effectivement plus facilement « Sciences » et « Hommes » que « Sciences » et « Femmes ». « Une idée peut être fortement ancrée en mémoire chez une personne, sans que celle-ci n'y adhère pour autant », précise la chercheuse.
« En comparant les deux années, nous avons montré que ce stéréotype implicite avait une influence sur la moitié des membres des jurys : ceux qui minimisent l'existence d'une discrimination à l'encontre des femmes », explique Isabelle Régner. Pour ceux-là, plus le score de stéréotypie implicite est fort, moins ils ont tendance à promouvoir les femmes. « En revanche, le stéréotype implicite n'a pas d'effet sur la décision des jurys qui reconnaissent la possibilité d'une discrimination de genre », poursuit la chercheuse.
Informer sur les mécanismes
Par ailleurs, la deuxième année, les membres des jurys ne savaient pas qu'ils étaient de nouveau étudiés. « La première année, les membres des jurys étaient plus prudents dans leur décision que la deuxième année : le fait de se savoir observés les a influencés dans leur choix », estime Isabelle Régner.
La Mission pour la place des femmes au CNRS a déjà mis en place des auto-formations sur les stéréotypes de genre pour les membres des jurys. Les auteurs souhaitent aller plus loin : « avec le CNRS, nous réfléchissons à la suite à donner pour mieux informer sur la façon dont ces biais impactent nos décisions », avance Isabelle Régner.
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