Cachées par honte, peu visibles, la boulimie et l'hyperphagie boulimique (et a fortiori leurs formes partielles) sont insuffisamment repérées et prises en charge en France. Pourtant, la boulimie concerne 1,5 % des 11-20 ans (et trois fois plus de filles que de garçons) et l'hyperphagie boulimique, 3 à 5 % de la population. Ces troubles des conduites alimentaires (TCA) ont un retentissement majeur sur la santé psychique et physique.
La Haute Autorité de santé (HAS) publie en partenariat avec la Fédération française anorexie boulimie (FFAB) des recommandations de bonne pratique pour le repérage et la prise en charge de ces TCA chez l'adolescent et l'adulte. Très attendues, réclamées depuis 2011 par les spécialistes et les usagers, elles complètent les recommandations parues en 2010 sur l'anorexie mentale. Et sont accompagnées de 8 fiches pratiques.
Plusieurs populations cibles
« Tout acteur du système de soins est à même d'effectuer un repérage », lit-on. Les généralistes sont au premier rang. Mais « les patients ne les consultent pas pour ces questions-là. C'est pour cela que les généralistes doivent prendre l'habitude d'investiguer certaines populations », explique Nathalie Godard, pédopsychiatre, présidente de la Fédération française anorexie boulimie.
Parmi les populations les plus à risques, figurent les personnes en surpoids ou en situation d'obésité, qui demandent des chirurgies bariatriques (surtout pour les hyperphagies boulimiques) ; celles ayant des antécédents de TCA (la boulimie survient souvent chez des anciennes anorexiques, l'hyperphagie, chez des personnes ayant eu des crises de boulimie, voire d'anorexie) ; ou encore les sportifs de haut niveau, les mannequins, ou les patients impliqués dans des disciplines nécessitant un contrôle du poids (surtout sujets à la boulimie). Les médecins doivent aussi creuser le rapport à l'alimentation des personnes présentant des troubles psychiatriques même légers (anxiété, minima, dépression), notamment chez les jeunes, et jeunes femmes. Mais les hommes ne sont pas à négliger, précise la Pr Godard.
Prise en charge pluridisciplinaire
Le généraliste – avec d'autres professionnels si besoin – doit faire une première évaluation clinique comprenant les aspects somatiques, nutritionnels et psychiatriques, avec identification des risques psychiques et physiques et des conséquences sociales. Les recommandations insistent sur la nécessité d'adopter une attitude bienveillante et empathique dans l'interrogatoire du patient, pour qui ces troubles sont souvent objets de honte. « Comme dans la plupart des addictions, interdire ou émettre un jugement moral est contre-productif : il faut accompagner le patient vers les soins », précise Nathalie Godard.
Parce que boulimie et hyperphagie boulimique touchent surtout des adolescents et des jeunes adultes, la HAS et la FFAB recommandent autant que faire se peut d'associer l'entourage ou la famille à la démarche de soins.
Puis selon la gravité des troubles, le généraliste doit orienter le patient vers des intervenants de premiers recours ou des services spécialisés, au sein desquelles est proposée une prise en charge multidisciplinaire. « Dans les prochaines années, doit être développée une filière de soins pour prendre en charge ces patients trop souvent en errance », alerte la Pr Godard, afin que s'estompe le paradoxe actuel : si la boulimie et l'hyperphagie boulimique sont plus fréquentes, les services spécialisés dans les TCA accueillent en majorité des patients souffrant d'anorexie mentale.
Une revendication qui sera présentée lors du congrès de l'European Council on Eating Disorders (ECED), qui se tient du 12 au 14 septembre à Paris.
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