Un livre blanc pour que l’asthme devienne enfin une priorité de santé publique ? C’est ce que propose le collectif « Asthme et inégalités », un groupement constitué de deux associations de patients, de cinq sociétés savantes, de la Fédération française de pneumologie et de la Fondation du souffle.
En France, la maladie touche entre 3 et 5 millions de personnes et entraîne, chaque année, 200 000 passages aux urgences, 60 000 hospitalisations et 850 décès. « Aujourd'hui, les mesures prises pour lutter contre l’asthme ne sont pas à la hauteur des enjeux », estime la Pr Chantal Raherison-Semjen, présidente de la Société de pneumologie de langue française (SPLF). « Il faut une prise en charge collective de cette maladie, depuis le plus jeune âge en termes de prévention jusqu’à l'âge adulte », ajoute-t-elle.
Pour faire bouger les choses, le collectif avance donc 33 mesures concrètes, réparties en six enjeux : améliorer le parcours de soins, renforcer la lutte contre le tabagisme, promouvoir l’éducation thérapeutique et la formation du patient, favoriser l’activité physique et lutter contre les idées reçues, développer une connaissance de l’asthme au sein de la communauté éducative et lutter contre les facteurs environnementaux.
Améliorer le parcours de soins
Côté parcours de soins, le collectif propose notamment de « systématiser l’orientation vers un pneumologue de tout patient passant aux urgences pour une crise d’asthme ». Car si certains hôpitaux sont déjà organisés en ce sens, « il y a une inégalité territoriale sur ce point », indique la Pr Raherison-Semjen. Or, « non seulement certains patients ont un mode de recours aux soins uniquement par les urgences, mais le fait de consulter aux urgences pour une crise d’asthme ou une décompensation peut être le marqueur d'une maladie beaucoup plus sévère », ajoute-t-elle.
La promotion de la réalisation systématique d’un examen du souffle, notamment lors d’une téléconsultation, fait également partie des propositions phares du livre blanc. En particulier parce qu’il est indispensable de réévaluer régulièrement le diagnostic de l’asthme : « on ne peut pas se reposer uniquement sur les symptômes », indique la Pr Raherison-Semjen. Autre suggestion : sensibiliser aux enjeux de l’asthme l’ensemble des parties prenantes intervenant dans la grossesse, l’asthme étant la maladie la plus fréquente chez la femme enceinte. « Si l'asthme n’est pas contrôlé, il peut y avoir un impact défavorable sur le cours de la grossesse et sur le futur bébé », indique le Pr Christophe Leroyer, pneumologue à l’hôpital de la Cavale Blanche à Brest. Or, la grossesse est un moment où la femme enceinte se préoccupe plus particulièrement de sa santé. « C'est donc le bon moment d’activer une consultation respiratoire chez le pneumologue pour, notamment, repérer des facteurs environnementaux délétères comme le tabac ou un environnement intérieur défavorable », ajoute le spécialiste.
Éducation thérapeutique, activité physique et environnement
Sur la promotion de l’éducation thérapeutique, des efforts restent à faire, estime le collectif pour, notamment, pallier les disparités d’accès sur le territoire. « Souvent, la structure d'éducation thérapeutique existe ou a existé, mais elle est menacée ou a disparu car les financements ne sont pas pérennes », regrette le Pr Raherison-Semjen, qui plaide pour que « l’éducation thérapeutique soit intégrée dans le parcours de soins afin que la majorité des patients asthmatiques aient, à un moment donné, suivi des séances d'éducation thérapeutique ».
Sur la pratique d’une activité physique, le Pr Bruno Housset, président de la Fondation du souffle rappelle que « l’asthme n'est non seulement pas une contre-indication au sport ou à l'activité physique, mais il peut améliorer la maladie respiratoire chronique et la perception que le patient a de son corps, de son souffle ». Le collectif fait donc un certain nombre de propositions pour mieux faire comprendre la maladie asthmatique aux encadrants sportifs, fédérations sportives et autres maisons sport-santé. Il propose également d’instaurer un remboursement de l’activité physique adaptée pour les patients asthmatiques les plus sévères mais non-inscrits en ALD.
Enfin, dans la lutte contre les facteurs environnementaux, le collectif propose notamment que les conseillers médicaux en environnement intérieur (CMEI) disposent de financements nationaux et pérennes et d’un statut rendant obligatoire leur consultation lors des procédures sur les logements insalubres dans lesquels vivent des patients asthmatiques. « En pratique, si l'intérieur du domicile n’est pas favorable, la prise en charge, même adaptée, ne le sera plus », indique la Pr Raherison-Semjen. « Or, les CMEI font un diagnostic du milieu familial intérieur qu’aucun interrogatoire ne permet de faire de façon aussi précise », ajoute-t-elle.
Pour le collectif, il est donc grand temps que les autorités de tutelle s’emparent du sujet en mettant en œuvre les différentes propositions, souvent peu coûteuses, qui lui sont faites. « Or, comme nous sommes dans un pays avec une structure pyramidale, si ça ne vient pas du haut, ça ne peut pas descendre dans les régions », rappelle la Pr Raherison-Semjen.
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation