L'été 2022, marqué par une recrudescence de l'épidémie de Covid, s'est caractérisé par trois canicules précoces, intenses et étendues sur le territoire, avec un retentissement sur la santé pour toute la population, quel que soit l'âge. C'est ce qu'il ressort du bilan canicule et santé de l'été 2022 de Santé publique France,soulignant un impact sanitaire au-delà des périodes de canicule.
Un système de surveillance est mis en place chaque année entre le 1er juin au 15 septembre depuis la canicule de 2003, coconstruit par Santé publique France et Météo France. Ce dispositif « consiste à anticiper et mettre en place des mesures de surveillance et de prévention des périodes de canicule pour protéger la santé des populations face à la chaleur, qui représente un risque non négligeable », détaille Sébastien Denys, directeur Santé Environnement Travail à Santé publique France.
Été le plus chaud après 2003
« L'été 2022 est le deuxième été le plus chaud que la France a connu derrière 2003 depuis au moins 1900 », souligne Matthieu Sorel, climatologue à Météo France L'été 2022 a été à +2,3 °C au-dessus des normales tandis que celui de 2003 à + 2,7 °C.
Trois vagues de chaleur ont été enregistrées cette année. Celle de juin fut de courte durée, mais il s'agit de la plus précoce jamais enregistrée en France. Celles de juillet et d'août ont duré 14 jours. « Nous avons compté cet été 33 jours de vague de chaleur, c'est un nouveau record », indique Matthieu Sorel.
De nombreux autres records ont été battus cette année, comme celui du nombre de jours de très fortes chaleurs (≥ 35 °C) de la façade ouest au sud-est, celui du nombre de nuits tropicales (c'est-à-dire avec une température qui ne descend pas sous les 20 °C) notamment dans le Sud-Est ou celui des 40 °C dépassés dans le Finistère Nord.
« On entend par canicule une période d'au moins trois jours de chaleur où les moyennes des températures maximales du jour et les moyennes des températures minimales de nuit dépassent les seuils d'alerte qui sont définis par département, rappelle Guillaume Boulanger, responsable de l'unité qualité des milieux de vie et du travail et santé des populations à Santé publique France. Il est à noter que ces seuils correspondent déjà à un risque de mortalité élevée, il existe un risque de mortalité donc pour des températures inférieures à ces seuils. »
78 % de la population touchée
Au total, 69 départements ont connu au moins un jour de canicule, soit 78 % de la population résidente en France métropolitaine. « C'est la deuxième vague qui a le plus exposé la population à la chaleur, avec 66 % de la population concernée », note Guillaume Boulanger. De plus, en dehors des épisodes de canicule, l'exposition à la chaleur a été importante durant tout l'été, avec en particulier des épisodes de chaleur très intense sur la façade Atlantique.
Par ailleurs, « cet été a été assez atypique sur le plan des températures et des phénomènes météorologiques et il est donc difficile de le comparer stricto sensu aux étés précédents », ajoute Guillaume Boulanger.
Au cours de l'été 2022, 20 000 recours aux soins ont été enregistrés en lien avec la chaleur : 17 000 passages aux urgences (dont 10 000 hospitalisations) et 3 500 consultations SOS médecins pour hyperthermies, déshydratations et hyponatrémies.
Le passage aux urgences était multiplié par deux et les consultations SOS médecins par trois lors des épisodes caniculaires, mais plus de 80 % des recours aux soins étaient en dehors des périodes de canicule, et ce pour toutes les tranches d'âge. Et si 51 % des passages aux urgences et 29 % des consultations SOS médecins ont concerné des personnes de 75 ans et plus, « l'ensemble de la population est bien concernée par l'impact de la chaleur », souligne Sébastien Denys.
Un excès de 2 816 décès toutes causes pendant les trois canicules
Au cours des trois périodes de canicule dans les départements concernés, l'excès de mortalité est estimé à 2 816 décès toutes causes (soit une surmortalité relative de +16,7 %), dont 2 272 chez les 75 ans et plus. L'excès de mortalité toutes causes au cours d'un épisode caniculaire - pas uniquement attribuable à la chaleur - étant obtenu par comparaison entre le nombre de décès observés pendant l'épisode et le nombre de décès attendu en l'absence de canicule (par rapport aux cinq années précédentes).
Quatre régions, les plus touchées, cumulent près des deux tiers de l’excès national, souligne Santé publique France : Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie et Provence-Alpes-Côte d'Azur. L'excès de mortalité a été le plus important en juillet.
Au cours de ces périodes, 894 décès liés au Covid ont été rapportés à l’hôpital et dans les établissements médico-sociaux, mais ne peuvent être soustraits à la surmortalité observée pendant les canicules : la mortalité Covid et celle associée à la canicule sont liées, le Covid ayant pu accroître la vulnérabilité à la chaleur et inversement.
En dehors des périodes de canicule, les fortes chaleurs tout au long de l'été ont pu aussi avoir un effet sur la mortalité. Sur toute la période de surveillance estivale, l'excès de mortalité est estimé à 10 420 décès toutes causes (+ 6,1 %) en France métropolitaine et 5 735 décès liés au Covid ont été rapportés.
« Par le biais de ce bilan, nous montrons une nouvelle fois l'impact de la chaleur sur la santé des populations, conclut Sébastien Denys. Ces constats doivent vraiment être un moteur pour accélérer, dans un contexte de changement climatique, les politiques publiques qui permettent l'adaptation à notre environnement et aussi l'atténuation pour lutter contre le changement climatique, l'altération de la biodiversité et plus globalement pour protéger la santé des populations face à ce risque qui aura tendance à s'accroître dans les années à venir. »
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