LES TROIS MOIS que le chef de l’État s’est donnés pour procéder au remaniement gouvernemental sont écoulés et sans doute annoncera-t-il la composition du nouveau gouvernement au lendemain de l’adoption de la réforme des retraites par le Parlement, pour autant que les grèves à répétition de cette semaine ne fassent pas capoter le projet. Plusieurs noms avaient été avancés pour Matignon ; et les meilleurs prévisionnistes de la politique, ou les mieux informés, n’excluaient pas, il y a encore quelques jours le maintien de M. Fillon à la tête du gouvernement. S’il part, M. Fillon ne devra pas sa démision forcée qu’à la nécessité où se trouve le président de la République d’annoncer, plus qu’une nouvelle équipe, un grand changement.
Un risque de dépense accrue.
Puisque M. Borloo semble sur le point de l’emporter sur tous les autres, y compris Michèle Alliot-Marie, qui, lundi encore, se disait prête pour le poste, il faut se demander de quelle manière l’ancien maire de Valenciennes orienterait le programme du gouvernement pour les dix-huit mois à venir. M. Borloo n’est pas dénué de qualités, à commencer par un humanisme qui semble avoir déserté ces derniers mois l’action du chef de l’État. Il a fait renaître la ville de Valenciennes à une époque où elle semblait moribonde. Il a épousé la cause écologiste avec un enthousiasme et une passion qu’il a traduites dans les actes, même si l’intendance n’a pas suivi. Comme tous les ministres réformateurs, lui a seulement manqué le budget qui aurait transformé ses projets en réalités concrètes. Il est simple et sympathique.
Mais il est aussi ambitieux et a milité pour sa nomination avec un acharnement visible, donc un peu ridicule. Nous avons besoin de leaders qui mesurent la gravité de la crise qui affaiblit le pays, pas de gens qui, au milieu de la décomposition, continuent tranquillement à faire carrière. On ne nous ôtera pas de l’idée que, de ce point de vue-là, M. Fillon faisait parfaitement l’affaire, que ses silences ou ses déclarations graves mais fortes, que son style ou son sang-froid étaient les meilleurs garants d’un redressement des comptes de la nation. M. Borloo a trop le cœur sur la main pour ne pas pousser à la dépense. Il n’hésitera jamais à voler au secours de la veuve et de l’orphelin, ou en tout cas du chômeur, en réclamant de nouvelles subventions. Ses élans affectifs ne seraient pas des crimes (un peu de compassion n’est jamais inutile, même au gouvernement), mais ils ne seraient pas en phase avec une réduction des dépenses qui doit être poursuivie d’année en année. Quant au reste, l’aspect brouillon de la personnalité de M. Borloo, c’est péché déjà pardonné. Il se coiffe désormais et s’habille. Il se disciplinera encore plus par respect pour la fonction.
Pourquoi Borloo ? C’est la question que posera un peuple chagrin à juste titre, car il n’arrive pas à suivre les zig-zag idéologiques de M. Sarkozy. Un jour, c’est le tout sécuritaire qui domine et il en fait un tel cheval de bataille qu’il n’hésite pas à bafouer les dispositions de la Constitution ou les lois européennes votées par la France ; un autre jour, la France s’offre un conflit avec ses partenaires européens ; un troisième jour, juste après avoir à peu près tout fait pour que l’électorat du Front national se rallie à M. Sarkozy, on pense à M. Borloo pour faire Premier ministre.
L’accumulation des symboles.
Celui-ci n’est-il pas un centriste, même s’il n’a pas dit mot au sujet des déclarations et des actes où traînaient un relent de xénophobie ? Ou bien M. Borloo reste lui-même et M. Sarkozy aura désigné un homme en contradiction complète avec les orientations adoptées ; ou bien, -et c’est hélas l’hypothèse la plus réaliste- M. Borloo fera ce qu’on lui dira et n’aura servi qu’à apaiser la fronde centriste lancée par Hervé Morin, qui s’est déclaré candidat à la présidence contre l’avis du président et devra y renoncer dès que M. Borloo aura été nommé.
LE NOM DU PROCHAIN PREMIER MINISTRE COMPTE MOINS QUE LE CONTENU DU PROGRAMME
Ce qui est agaçant, dans tout ça, c’est l’usage des symboles cumulés. On s’en prend aux Roms, ces malheureux, pour soulever l’intérêt de l’extrême droite ; on va au Vatican pour apaiser les catholiques, choqués par le sort réservé aux Roms ; on nomme Borloo pour rallier les centristes. Concilier dans le programme ces symboles contraires sera une autre affaire. On peut comprendre que M. Sarkozy ne veuille pas perdre les élections de 2011. Mais, d’une part, l’accumulation des gestes en direction de tous les partis est une somme nulle et risque donc de rester sans effet sur l’humeur de l’électorat, en majorité déchaîné contre le président. Et, d’autre part, le seul enjeu qui vaille, c’est le redressement du pays. Nous voterons pour ceux qui nous diront comment ils vont s’y prendre, comment ils réduiront ou non les dépenses, quelles réformes ils feront ou non, quels impôts ils vont augmenter ou non. Un nouveau Premier ministre ? D’accord. Mais avec un programme convaincant.
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