LA MINISTRE de la Santé, invitée du congrès des maires à Paris, a trouvé face à elle des élus locaux remontés contre la stratégie gouvernementale d’en rester aux seules incitations en matière de démographie et d’installation des médecins. « Le débat entre incitation et coercition a été tranché par le président de la République », a répliqué la ministre devant l’assistance. Une position gouvernementale également confirmée, la semaine dernière, lors du débat sur la proposition de loi Vigier (1).
Pas si simple pourtant de convaincre. Un maire d’une petite commune d’Eure-et-Loir, médecin lui-même, monte au front. « L’incitatif, on en a depuis des lustres, sans aucun résultat ! » lance-t-il à la ministre sous les applaudissements. L’élu fait le parallèle avec les pharmaciens, dont l’installation est conditionnée à un numerus clausus. « Ils ne paraissent pas contraints pour autant », ajoute-t-il jugeant que « les médecins ne peuvent plus continuer à s’empiler là où ils veulent, car ils vivent des subsides du système social ».
Un autre maire renchérit : « Après dix ans d’études gratuites, payées par le contribuable, les médecins pourraient accepter un peu de contrainte, en servant là où on a besoin d’eux, comme dans l’Éducation nationale ». La ministre se voit obligée de jouer le rôle d’avocate des étudiants. Elle souligne qu’ils suivent de longues études peu rémunérées et ont une place indispensable dans les services : « aucun hôpital ne pourrait fonctionner sans les internes et les chefs de clinique. On ne peut donc pas dire que les étudiants ne participent pas au système de santé pendant leurs études ». Marisol Touraine demande même des applaudissements pour ces étudiants, mais ne fait guère recette.
La chèvre et le chou.
Même tonalité chez un maire rural corrézien. « Nous qui avons récemment donné deux présidents à la France, nous sommes obligés d’aller chercher nos médecins généralistes en Roumanie, alors qu’on n’en manque pas en France. Il ne me paraît pas anormal de demander aux jeunes médecins de s’engager pendant cinq ans dans un territoire rural ». Vanik Berberian, maire d’une commune rurale de l’Indre, et président de l’Association des maires ruraux de France (AMRF) abonde en ce sens. « L’incitation ne marche pas, lance-t-il, agacé. Ca fait quinze ans qu’on entend le même discours, combien de temps va-t-on encore l’entendre ? » Soutenu par l’assistance, il lance à la ministre : « vous voulez ménager la chèvre et le chou, mais à la fin, vous récolterez le chou pourri et la chèvre crevée ». Gros succès dans la salle.
La ministre ne se laisse pas démonter : « de quelles incitations parlez-vous ? Les médecins ne demandent pas d’argent, mais des conditions de travail compatibles avec leur métier ».
Marisol Touraine a reçu in extremis quelques soutiens. Yves Bouloux, maire sans étiquette de Montmorillon (Vienne) explique qu’en tant...qu’époux de médecin généraliste, il ne croit « pas du tout à la coercition car les jeunes médecins n’accepteront jamais de travailler quinze heures par jour dans des territoires désertés par l’État ».
(1) Rejetée par l’Assemblée, cette proposition de loi du député centriste Philippe Vigier prévoyait plusieurs mesures contraignantes (stages obligatoires en zone sous-dense, visa à l’installation..). Marisol Touraine a redit qu’elle ne croyait pas à la méthode coercitive qui « ferait peser sur les jeunes médecins le poids des insuffisances du système ».
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