« Les pratiques ont été bouleversées et pourtant les missions ont été tenues », résume le délégué ministériel à la santé mentale et à la psychiatrie (DMSMP) Frank Bellivier dans une analyse des retours d'expériences lors de la crise liée au Covid-19, publiée ce 9 octobre, tout en saluant la mobilisation et la créativité des équipes.
La délégation ministérielle a identifié quelque 150 dispositifs innovants, à partir d'une enquête flash réalisée principalement par les Agences régionales de santé (15 ont participé) et de 6 visites virtuelles d'établissements par le DMSMP. Plus de 60 % de ces dispositifs émanent des structures publiques, une trentaine s'adresse spécifiquement aux enfants et adolescents.
Davantage de coopération
Le confinement s'est traduit par la fermeture des structures hors les murs* et par la réorganisation de l'hospitalisation, souvent réservée aux situations qui le nécessitaient absolument, avec des autorisations de permissions annulées voire des restrictions de sorties pour les patients en soins sans consentement, et en parallèle, la création de 90 unités pour malades du Covid-19 (soit 1 100 lits).
Ces réorganisations ont donné lieu à davantage de coopérations, faisant sauter les anciens verrous entre secteurs (certaines équipes se retrouvant incomplètes), mais aussi entre les équipes de psychiatrie et celles de somaticiens. À l'échelle des établissements, équipes de soins, directions, services d’hygiène et ARS ont beaucoup mieux coopéré qu'à l'ordinaire, tout comme le public et le privé au sein d'un territoire, est-il aussi observé.
Développement de l'ambulatoire et du numérique
La fermeture des services ambulatoires s'est accompagnée du déploiement d'alternatives destinées à maintenir le lien avec les patients et leurs aidants, qui représentent 18 % des dispositifs innovants, tandis que 14 % d'entre eux concernent les interventions à domicile. Les modalités diffèrent selon les territoires. Il peut s'agir du déploiement des consultations à distance (téléphone, visioconférence, télésoins), de visites à domicile, d'interventions des équipes mobiles ou d'hospitalisation à domicile dans les EHPAD et établissements sociaux et médico-sociaux, de maraudes vers les plus précaires, ou encore de la mise en place de plateformes téléphoniques d'écoute.
Ces dernières ont un « succès mitigé », lit-on. « Leur intérêt est très débattu, dès lors qu’il s’agit d’un simple instrument d’écoute et d’information. En revanche, dès lors que la plateforme devient un outil d’évaluation et d’orientation avec une organisation de suivi, elle devient une modalité de prévention à faire évoluer au regard des autres dispositifs existants », poursuit l'analyse.
A contrario, l'éducation thérapeutique, qui représente 5 % des dispositifs innovants recensés, fait consensus. « Les équipes affirment que le déploiement central de cette activité a permis un fonctionnement de qualité pour les professionnels et un accroissement des capacités des patients et des aidants », indique le rapport, plaidant pour le développement de ce volet.
Près de 80 % des dispositifs ont vocation à se pérenniser
Hormis les plateformes d'écoute et les unités Covid, les équipes souhaitent la pérennisation de 78 % des dispositifs, qui devront donc s'inscrire dans les projets d'établissements et/ou les projets territoriaux de santé mentale (PTSM) ou les groupements hospitaliers de territoires (GHT).
Ces dispositifs devront être évalués, notamment les solutions de télémédecine et téléconsultations (31 % des dispositifs présentés), les psychiatres soulignant que cela ne peut être l'unique modalité du soin.
En conclusion la délégation se veut optimiste : « L'impact de la crise pourrait avoir des conséquences positives in fine », lit-on, et d'encourager la prise en compte de ses enseignements lors de la finalisation des PTSM d'ici la fin de l'année, pour renforcer les « coopérations sanitaires, sociales et médico-sociales et ville-hôpital sur un territoire », tout en s'inscrivant dans la feuille de route Santé mentale et psychiatrie de 2018.
Mais des réponses devront aussi être apportées à l'inquiétude du monde de la psychiatrie, mentionnée au décours du Retex. « Une alerte est lancée sur le ressenti d’un manque de considération accordée à la discipline et à ses acteurs, alors que leur rôle a été significatif et qu’il le sera encore plus dans le cadre du déconfinement », lit-on.
*Centres médico-psychologiques (CMP), Hospitalisation de jour (HDJ) et centres d'activité thérapeutique à temps partiel (CATTP)
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