PRATIQUEMENT aucun des Premier-ministrables n’a échappé à la fièvre qui s’est emparée de la droite. C’est à qui saura le mieux se positionner. Derrière les propos de convenance (par exemple : « Le poste de Premier ministre ne se demande pas et ne se refuse pas »), tous, de François Baroin à Michèle Alliot-Marie en passant par Jean-Louis Borloo et Luc Chatel), tous, du plus probable au moins probable, s’évertuent à se présenter sous le jour d’une femme ou d’un homme parfaitement préparé à la fonction de chef du gouvernement. La ministre de la Justice excipe de son remarquable parcours politique ; l’ambition de M. Borloo l’incite à se pousser du col dans les voyages officiels, notamment en compagnie de M. Fillon ; François Baroin estime qu’il y a deux ministres de l’Économie, Christine Lagarde et lui, alors que, de toute évidence, elle lui est supérieure hiérarchiquement ; Brice Hortefeux accorde au « Figaro Magazine » (il y a douze jours) un entretien où il empiète sur les prérogatives de Mme Alliot-Marie ; M. Chatel, à la télévision, fait un lapsus révélateur en disant qu’il a été nommé Premier ministre (il voulait dire ministre) ; on en passe. Tous ces candidats à la fois à peine cachés à un poste qui ne peut être octroyé que par l’oracle suprême, font des déclarations qui sortent de leur champ de compétence de ministre non sans apporter leur part de critique à ce qui est fait actuellement et mériterait d’être corrigé.
Ne pas attendre d’être parti.
Dans ce jeu tout en nuances (il est licite d’agacer M. Sarkozy, pas de le plonger dans la colère), François Fillon excelle. Depuis un peu plus de quinze jours, il parle comme quelqu’un qui ne se fait plus aucune illusion sur son maintien à Matignon et estime, en conséquence, qu’il a le droit de parler plus librement. Ce qui l’amène à prononcer des déclarations reflétant bien la réalité. Il a commencé par affirmer que M. Sarkozy n’est pas son mentor, ce qui est vrai, mais insolent, et qu’il avait fait « alliance » avec lui pour exercer le pouvoir en 2007. Alliance, comme entre deux personnes de poids égal. Celui qui naguère se disait « à la tête d’un État en failite », après que M. Sarkozy, méchamment, l’eut décrit comme l’un de ses « collaborateurs », reconnaît, en dépit de la consigne appliquée par tous les membres du gouvernement, que le rabotage des niches fiscales correspond à une augmentation des impôts. Il envisage, tout seul, comme un grand, qu’il est possible, dès 2011, de procéder à une réforme fiscale qui ferait mieux passer celle des retraites.
EN REPRENANT SA LIBERTÉ DE PAROLE, FILLON NE PERD PAS SA CAPACITÉ À REMPILER
C’est le même qui, le premier, et malgré des ordres sévères de l’Élysée, avait consenti à décrire la politique économique actuelle comme un plan de rigueur, trahissant la discipline qu’il avait imposée aux ministres. M. Fillon recrache une à une toutes les couleuvres que M. Sarkozy l’a obligé à avaler pendant près de trois ans et demi, comme si l’annonce d’un remaniement qui n’a pas encore eu lieu libérait complètement sa parole, le délivrait de toutes les amarres qui l’arrimaient à l’Élysée. Or M. Fillon est encore Premier ministre, ne fût-ce que pour quelques semaines ou quelques jours. Ce qu’il dit a encore du poids. Il se sert de la fonction qu’il est censé perdre pour étaler au grand jour sa personnalité, sa liberté de penser, ses idées. Il a eu un trait de génie : ne pas attendre d’être parti pour parler vrai.
La soudaine légèreté du danseur de ballet.
Là encore, le phénomène se retourne contre Nicolas Sarkozy. Il se croyait le maître du jeu, mais, en y réfléchissant bien, aucun des candidats au poste de Premier ministre ne réunit autant de qualités que François Fillon. Mme Alliot-Marie, peut-être la plus méritante, est trop chiraquienne. M. Borloo est trop brouillon. M. Baroin trop jeune ou trop ambitieux ou trop chiraquien. Jean-François Copé ne joue que son jeu personnel, prévu pour le conduire en 2012 à la présidence de la République. M. Hortefeux, l’ami de trente ans, est trop marqué à droite. M. Chatel est sans doute insuffisamment formé aux périls de la politique. M. Fillon, c’est du sûr. Il gouvernerait pendant que M. Sarkozy ferait campagne. Il n’est que relativement populaire, mais sa liberté retrouvée séduira les Français. Il est d’autant plus loyal qu’il est lucide et ne sombre sûrement pas dans le culte de la personnalité de M. Sarkozy. Il serait, pour encore dix-huit mois, un Premier ministre d’autant plus intéressant qu’il n’est pas inféodé au président. Sa soudaine légèreté de danseur de ballet, il la doit à quelque chose qui ressemble au désintéressement. Devrait-il rester à Matignon qu’il excellerait dans une tâche dont il a prouvé qu’il la maîtrise. Devrait-il partir qu’il serait déjà immunisé contre la dépression post-pouvoir.
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