En Mayenne, tergiversations autour d’une pollution aux PCB toujours présente

Publié le 14/10/2014

Samedi a eu lieu à Grez-en-Bouère (Mayenne) une manifestation qui a réuni environ 350 personnes. Fin de la pollution, indemnisation des exploitations riveraines de l’entreprise Aprochim, qui traite des déchets et des matériaux souillés par les PCB… les revendications ne sont pas nouvelles. Depuis début 2011, date de la révélation d’une pollution locale aux PCB, ces dérivés chimiques chlorés, dont la signification exacte est polychlorobiphényles, considérés comme probablement cancérigènes, la contestation n’a pas cessé.

Plus de deux ans après la révélation de rejets non conformes par l’entreprise Aprochim installée depuis 1990, la préfecture de Mayenne pointait « un manque de maîtrise des outils de traitement ». Aujourd’hui encore, l’observation des analyses effectuées à partir de prélèvements d’herbe dans un rayon de 450 et 500 m autour du site montre un dépassement chronique du seuil d’alerte. Et, cela même si la préfecture tend à minimiser la fréquence de ces dépassements (1) et affirme depuis l’automne 2013 que toutes les mesures réalisées à la cheminée principale respectent les normes.

Des riverains inquiets

Cette pollution par les rejets non totalement jugulée de même que celle accumulée par ces années de rejets non maîtrisés – les PCB ont la particularité d’être très persistants dans l’environnement et de se transporter sur de grandes distances et c’est leur accumulation dans le temps dans le sang et les graisses qui peut être toxique – ne sont pas sans conséquences.

Joseph Gaudin, éleveur de chèvres et apiculteur, installé à 800 m de l’entreprise, a dû faire face à une interdiction de vente du lait de ses bêtes pendant trois semaines et de ses stocks de fromage. « J’ai vu la moitié de ma clientèle partir… et puis, j’ai décidé moi-même d’arrêter ma production. Allais-je continuer à intoxiquer, en toute légalité puisqu’on ne me l’interdisait pas, mes autres clients ? »

À ce jour, Joseph Gaudin est un des quatre exploitants non indemnisés. Devant le refus d’Aprochim de l’indemniser, il a entamé une grève de la faim le 25 septembre.

Le geste est extrême et partage la population. « C’est presque l’omerta », dit un médecin, sans vouloir s’étendre sur le sujet. « Les gens sont inquiets pour leur santé bien sûr, mais aussi pour l’impact qu’aurait un arrêt de l’activité », ajoute-t-il.

Un autre médecin explique qu’il n’a pas de recul sur l’affaire et qu’il souhaite garder une certaine neutralité. L’ARS des Pays de la Loire, sollicitée également, n’a pas donné suite. En mars 2012, un dosage biologique avait été effectué sur 24 personnes. Deux d’entre elles se situaient légèrement au-dessus des valeurs d’imprégnation critique, avait conclu le rapport de l’ARS. Mais, dans le quotidien régional « Ouest-France », des riverains dénonçaient le manque d’informations et l’absence d’un suivi médical spécifique.

(1) La préfecture parle de mesures dépassant « parfois » le seuil d’alerte quand les documents montrent des dépassements 11 mois sur 12 à 450 m de distance avec un vent Sud-Est, 6 mois sur 12 à 450 m et un vent de Sud-Ouest et 10 mois sur 12 à 500 m avec un vent de Nord-Est.

Olivier Quarante

Source : lequotidiendumedecin.fr