Quel lien entre troubles du sommeil et cannabis chez les étudiants ? L'étude observationnelle issue de la vaste cohorte française i-Share*, menée par une équipe de scientifiques de l’Inserm, de l’université et du CHU de Bordeaux, montre que le risque de souffrir d'insomnie est 45 % plus élevé parmi les consommateurs de cannabis par rapport à ceux qui n'en consomment pas. Ces résultats sont parus dans « Psychiatry Research ».
En France, plus de la moitié des étudiants présentent des troubles du sommeil. Et selon les données de 2020 de l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), 13,9 % des 18-25 ans consomment du cannabis tous les mois et 4 % tous les jours.
Plus de la moitié des étudiants rapporte une privation de sommeil
Dans cette nouvelle étude, 14 787 étudiants francophones de 18 à 30 ans (moyenne de 20,4 ans et 75,5 % de femmes), recrutés à partir de 2013 dans les universités et les établissements d'enseignement supérieur en France, ont répondu à un autoquestionnaire en ligne sur la fréquence de leur consommation de cannabis au cours de l’année écoulée et sur la qualité de leur sommeil des trois derniers mois.
Ils étaient 20,5 % à avoir une consommation mensuelle de cannabis, 4,4 % hebdomadaire et 1,5 % quotidienne. Les autres n'en consommaient jamais, ou alors rarement. Concernant le sommeil, 22,7 % souffraient d'insomnie, 18,3 % de somnolence, 22,4 % d'une mauvaise qualité de sommeil et 52,5 % d'une privation de sommeil.
« L’originalité de cette étude réside sur le fait que nous avions accès à un échantillon particulièrement large d’étudiants ayant renseigné des données précises sur leur consommation de cannabis et la qualité de leur sommeil. La richesse des données recueillies grâce aux questionnaires donne de nouvelles preuves de l’association entre insomnie et consommation de cannabis », explique Julien Coelho, premier auteur de l’étude.
41,1 % d'insomnie parmi les gros consommateurs
La prévalence de l'insomnie était plus élevée chez les consommateurs quotidiens (41,1 %) que chez ceux ayant une consommation hebdomadaire (28,8 %), mensuelle (21,6 %) et que chez ceux n'en consommant pas ou peu (22,3 %). Le risque d'insomnie est ainsi deux fois plus élevé chez les consommateurs quotidiens que chez ceux qui n'en consomment quasiment pas.
La consommation quotidienne ou hebdomadaire du cannabis restait significativement associée à l'insomnie, même après ajustement en fonction de l'âge, du sexe, du domaine et de l'année d'étude, de la situation économique perçue, de l'activité physique, de la consommation de tabac et d'alcool, et de la prise de somnifères. La prise en compte des antécédents de dépression et d'anxiété n'a pas non plus modifié les estimations.
Des tendances similaires ont été retrouvées pour les autres troubles du sommeil. Ces résultats sont ainsi cohérents avec ceux d'études observationnelles antérieures menées chez des adolescents et des adultes, notent les auteurs.
« Bien que la causalité ne puisse pas être affirmée avec certitude, ces résultats suggèrent l’importance de multiplier les messages de santé publique pour faire de la prévention auprès des étudiants, mais aussi des professionnels de santé sur les dangers d’une consommation élevée de cannabis sur la santé des jeunes », estime Christophe Tzourio, dernier auteur de l’étude.
*Le projet i-Share (www.i-share.fr) est soutenu par les universités françaises de Bordeaux, Versailles et Nice
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