À l'issue de la concertation citoyenne sur la vaccination lancée en avril 2016 à la demande de la ministre de la Santé, le comité d'orientation (CO) a présenté ses conclusions le 30 novembre 2016 au ministère de la Santé. Le verdict est tombé : le CO préconise de maintenir et d'élargir l'obligation vaccinale et d'en garantir la gratuité.
Le processus, qui a commencé en avril 2016 avec des enquêtes d'opinions préalables, a mobilisé de juillet à novembre, 2 jurys, l'un citoyen, l'autre de professionnels de santé, 45 auditions, 14 réunions des 16 membres du CO (société civile, chercheurs en sciences humaines et sociales, médecins biologistes), et les 10 800 contributions sur la plateforme participative.
Pour le Pr Alain Fischer, qui a présidé le CO, l'objectif de la concertation citoyenne n'est pas d'aboutir à un consensus coûte que coûte. « La priorité absolue, c'est que la vaccination soit perçue comme un acte de prévention pour soi et pour les autres, explique-t-il. C'est un acte de solidarité envers les plus vulnérables et les plus silencieux d'entre nous, ceux qui ne peuvent pas être vaccinés, les nourrissons, les personnes âgées, les patients immunodéprimés ou atteints de maladies chroniques, les sujets précaires. Alors que l'enjeu est de protéger de maladies mortelles, la balance bénéfices/risques à titre individuel et collectif est indiscutablement favorable. »
Les réactions des détracteurs vaccinaux, parfois acerbes, ne se sont pas fait attendre, « Simulacre démocratique », « Provocation », ont réagi le lendemain le collectif E3M anti-aluminium des vaccins et la députée écologiste Michèle Rivasi.
Un budget de 150 millions d'euros par an
Si Marisol Touraine décide de suivre l'avis du CO, l'ensemble des onze vaccins pédiatriques et leurs rappels deviendront obligatoires (DTP, haemophilus, hépatite B, coqueluche, ROR, pneumocoque, méningocoque). Mais ce n'est pas la seule mesure phare proposée par le CO : la prise en charge intégrale des vaccins, obligatoires et recommandés, chez l'enfant et l'adulte, ce qui représente un budget de 150 millions d'euros par an.
La décision de choisir le maintien de l'obligation n'a pas été simple ni facile, allant à l'encontre de la loi Kouchner (2002) qui garantit la liberté de choix thérapeutique et à contre-courant de ce qui se fait ailleurs en Europe où les vaccins sont juste recommandés. « La défiance est telle aujourd'hui en France qu'une levée de l'obligation est trop risquée, explique le Pr Alain Fischer. Près de 40 % des Français doutent de la sécurité des vaccins et plus de 20 % des 20-30 ans ont déclaré qu'ils ne feraient pas vacciner leurs enfants si l'obligation était levée. Les conditions aujourd'hui ne sont pas réunies pour le faire, mais l'idée est bien d'y arriver à terme. »
Le rapport Hurel pour la rénovation de la politique vaccinale remis en janvier 2016 faisait état de deux scénarios envisageables pour sortir de la défiance liée à la coexistence de vaccins obligatoires et recommandés en France : la levée de l'obligation avec un accompagnement législatif ou le maintien de l'obligation avec une révision de la liste des vaccins. Redoutant une baisse de la couverture vaccinale qu'entraînerait une levée de l'obligation, l'Académie de médecine s'était, elle, prononcée sur la mise en place de vaccins exigibles avant l'entrée en collectivité.
Difficile clause d'exemption
Le CO appelle à « un engagement ferme et durable de l'État et des autorités sanitaires », mais tempère en présentant le statut obligatoire comme « temporaire ». Le CO fait un autre compromis dans ce positionnement très ferme, en introduisant la notion de clause d'exemption. Les parents, restant très opposés à la vaccination de leurs enfants, pourraient engager leur responsabilité par écrit. Une telle mesure n'est pas sans poser des problèmes d'applicabilité, notamment lors de l'entrée en collectivité. Les structures dans la petite enfance pourraient très bien refuser d'accueillir des enfants non vaccinés. « On compte sur l'effet dissuasif, explique le Pr Fischer. Si le phénomène prend trop d'ampleur et menace la santé publique, il est prévu que la clause puisse être suspendue ou levée. »
Concernant le vaccin HPV, recommandé et appelé à être remboursé (reste à charge aujourd'hui de 80 euros), le CO a estimé que le rejet est trop massif pour le rendre obligatoire. « Seulement 14 % des jeunes filles en France ont été vaccinées en 2015, déplore le Pr Fischer. C'est l'échec vaccinal le plus retentissant. Des pistes sont à explorer, comme le levier de l'école et la vaccination des garçons. »
Outre le statut vaccinal et la gratuité, ce nouveau plan propose un bouquet de mesures complémentaires : création d'un site Web unique d'information identifié par tous (grand public et professionnels de santé), mise en place d'un carnet de vaccination électronique, simplification du parcours vaccinal. Ce dernier point porte à la fois sur la disponibilité des vaccins, mise à mal ces dernières années avec les tensions d'approvisionnement, mais aussi sur l'élargissement des vaccinateurs autorisés (infirmiers, pharmaciens, travailleurs sociaux, etc). Pour les professionnels de santé, les vaccins hépatite B et rougeole seraient obligatoires, les vaccins grippe, coqueluche et varicelle fortement recommandés.
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