L’œil critique de journalistes sur la campagne

La santé, sujet politique « bien trop casse-gueule »

Publié le 27/04/2012
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Crédit photo : AFP

POURQUOI la santé a-t-elle tant de mal à surnager dans la campagne présidentielle ? Désintérêt des candidats ? Pour des journalistes spécialistes « santé » réunis à l’occasion d’un débat organisé par l’agence Nile, il n’en n’est rien. « Avec un père ORL dans le privé, François Hollande connaît la médecine de l’intérieur, analyse Pascal Beau, directeur de l’hebdomadaire « Espace social européen ». Il occupe le terrain, s’intéresse au sujet mais reste très distant ». Idem dans le camp de Nicolas Sarkozy, où l’on évite de (trop) parler de santé. « En janvier, le ministre de la Santé Xavier Bertrand a dit vouloir jeter les bases d’une nouvelle loi de santé publique, rappelle Édouard Hubert, directeur adjoint de la rédaction de l’Agence de presse médicale (APM). Chic, s’est-on dit. Et puis plus rien. »« En fait, pour les politiques, en matière de santé, il est urgent de ne rien faire », ironise Pascal Beau.

Les journalistes dans la salle opinent du chef. La santé a beau être un domaine où pullulent chiffres, statistiques, sondages et études précises, les responsables politiques de tout bord racontent assez souvent n’importe quoi, estiment ces observateurs. Et pratiquent l’art de la dramatisation. « Quand le député socialiste Jean-Marie Le Guen parle de santé, on a l’impression que les gens meurent dans la rue et que les femmes accouchent dans les fossés », s’agace Alain Perez, grand reporter aux « Échos ».

La santé, terrain miné, tant les intérêts sont divergents et les corporatismes nombreux ? C’est le consensus des observateurs. « Ce n’est pas un thème porteur pour les candidats à la présidentielle, tranche Jean-Philippe Rivière, directeur médical de Doctissimo. Il y a beau avoir une attente très forte des Français sur les dépassements d’honoraires, la pharmacovigilance et l’accès aux soins, la santé est un sujet bien trop casse-gueule. Probablement trop technique et financièrement trop sensible. » Dire aux Français que s’ils ne veulent pas payer plus, ils devront se plier à de nouvelles règles sur le parcours de soins relève du « suicide politique », renchérit Pascal Beau. D’autant que brusquer les patients, c’est aussi risquer de se mettre à dos le milieu hospitalier et libéral… Soit plusieurs centaines de milliers de voix.

ANNE BAYLE-INIGUEZ

Source : lequotidiendumedecin.fr