LA RÉFORME, censée économiser de l’argent, commence, comme toujours chez nous, par en coûter beaucoup. On redoutait l’irruption des jeunes dans le conflit ; elle s’est produite, et elle est accompagnée par des violences inspirées ou encouragées par des casseurs professionnels. Le pays est partiellement bloqué par les grèves dans les transports publics, par la pénurie de carburants et Force ouvrière appelle maintenant à une journée de grève public-privé qui pourrait être décidée et suivie. Les CRS et les piquets de grève jouent au chat et à la souris, avec le risque que chaque opération de remise en route d’une installation se traduise par des dommages ou, pis, par des blessés. Pourquoi le gouvernement, dont le projet ne sera pas voté avant vendredi, n’a-t-il pas fait une pause pour tenter de trouver un compromis avec les syndicats ?
Pour deux raisons probables : la première est que le seul vrai moyen de réduire de manière drastique le déficit des régimes, c’est le report de l’année de l’accession à la retraite. Or c’est sur ce point qu’ont achoppé les discussions avec les syndicats. On aurait pu, comme le souhaite la gauche, se contenter de prévoir 42 annuités de cotisations au lieu de 40 actuellement, mais les ressources des régimes auraient été très insuffisantes. D’autant que, dans quelques années, il faudra, à cause d’une espérance de vie toujours plus grande, recourir encore à un nouveau report.
Le prix du retour à l’ordre.
La seconde est politique : le pouvoir ferait-il des concessions qu’il aurait une réforme de moindre ampleur et que la victoire que ne manqueraient pas de clamer les syndicats et l’opposition l’affaibliraient. C’est donc en parfaite connaissance de cause que M. Sarkozy joue le pourrissement de la crise. Il nous dit que d’ici à trois jours, les stations service seront de nouveau approvisionnées (après avoir déclaré un peu vite qu’il n’y avait pas de pénurie). Il annonce qu’il va remettre de l’ordre dans l’enseignement secondaire, ce qui signifie qu’il le fera manu militari. Il refuse depuis près de dix jours d’ajouter la plus infime concession à celles qui ont figuré dans les amendements votés par le Sénat.
LA CRISE A PRIVÉ LE POUVOIR DE SA LÉGITIMITÉ, ET PAS SEULEMENT EN FRANCE
Le président de la République a donc adopté une démarche contradictoire : il s’efforce de rassurer les Français ou en tout cas les 30 % de Français qui approuvent la réforme, et ceux qui y sont opposés mais ne souhaitent pas que s’installe la chienlit. Dans le même temps, il laisse filer le chaos croissant en espérant qu’un plus grand nombre de concitoyens se retournent contre les syndicats, contre les grévistes, contre les lycéens et réclament les mesures sévères que de toute façon, avec ou sans leur consentement, il croit devoir prendre. C’est un jeu extrêmement dangereux. Pas seulement parce que l’affrontement est générateur de violence, mais parce que M. Sarkozy est contesté et qu’il ne représente plus qu’une minorité de 30 %. D’autres populaires que lui, en France ou ailleurs, se sont cassés les dents sur telle ou telle réforme. Le chef de l’État ne semble pas prendre en compte la dimension politique de la colère populaire. Ce n’est pas uniquement sa réforme qui est rejetée, cette réforme rendue nécessaire par la crise mais qui n’a jamais figuré dans son programme électoral de 2007. C’est sa politique générale et son comportement. Les Français ne reconnaissent plus sa légitimité, de sorte qu’ils ne reconnaissent pas la majorité qui vote les lois.
La crise tue la popularité.
Cependant, le président est fondé à dire qu’il lui appartient de prendre acte de l’effrayante crise économique et sociale où la France est plongée depuis deux ans. Depuis que cette crise a commencé, il n’y a d’exécutif populaire nulle part, pas en Espagne où la popularité de José Luis Zapatero a chuté considérablement depuis qu’il a pris des mesures d’austérité fort pénibles pour les Espagnols ; sûrement pas en Grèce où, comme en Espagne, c’est la gauche qui gouverne ; pas en Allemagne où Angela Merkel rencontre des difficultés politiques considérables, dont quelques-unes sont liées aux spécifités de son pays et à la coalition qu’elle a formé avec les libéraux, mais qui pâtit aussi de la montée de l’intolérance ; pas même aux États-Unis où Barack Obama ne parvient pas à résorber le chômage. M. Sarkozy se dit qu’un ou une autre à sa place ne ferait pas mieux ; que les socialistes ou les Verts, s’ils étaient au pouvoir ne pourraient pas raser gratis ; qu’il est dans une époque où les populations de pratiquement tous les pays industrialisés souffrent de la dette, des déficits et de la stagnation économiques. Il y a désormais partout une logique de l’austérité, et les Français devraient le savoir. Et s’il est regrettable qu’ils nient la réalité, leur attitude n’en constitue pas moins une autre réalité politique avec laquelle M. Sarkozy devrait compter.
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