Qu’appelle-t-on produits chimiques ? D’où viennent-ils ? Sont-ils vraiment indispensables ? Quels risques présentent-ils ? Comment les évalue-t-on ? Que deviennent-ils ? Autant de questions élémentaires abordées dans la dernière publication de l’Académie des technologies.
Fruit d’un groupe de travail réunissant universitaires et industriels, ce document d’une centaine de pages a été pensé comme une « tentative de réconciliation de l’industrie chimique avec le public, explique Bernard Tramier, l’un des co-auteurs, membre de l’Académie qui a fait l’essentiel de sa carrière dans le secteur pétrolier. Il s’agit ni d’un « plaidoyer », ni d’un « réquisitoire », mais d’une analyse « la plus objective possible sur les progrès que l’on doit aux produits chimiques sans occulter les inconvénients qu’ils ont pu générer », promettent les auteurs. Que nous disent-ils ? Tout d’abord que ces produits chimiques entourent voire structurent notre mode de vie moderne et qu’il va être bien difficile de s’en passer.
Un risque mal accepté
Certes, « certains de ces produits peuvent avoir des effets secondaires, poser des problèmes environnementaux ou de santé publique à court ou plus pernicieusement à long terme », mais selon les auteurs, par rapport à d’autres menaces, le risque chimique est surtout « mal accepté par le public, et sa perception est parfois exagérée par rapport à la réalité ».
S’agissant par exemple des produits classés par le règlement REACH comme perturbateurs endocriniens, ils semblent considérer que les lanceurs d’alerte vont quelques fois un peu vite en besogne. « Les connaissances scientifiques relatives à l’action des familles de composés concernés » (hormones naturelles, hormones de synthèse, substances anthropiques) demeurent « insuffisantes pour apprécier pleinement leurs conséquences ».
Et en dehors de rares cas, « la plupart des études menées sont sujettes à controverse » dans la mesure où il est difficile d’extrapoler aux êtres humains les résultats des expériences sur les animaux et « il est évident que l’on n’a pas encore le recul nécessaire pour se livrer à des études épidémiologiques incontestables ». Par ailleurs, insistent-ils, ce n’est qu’en vertu du principe de précaution que l’« autoritaire » règlement REACH intègre les perturbateurs endocriniens dans la catégorie des « substances ayant des effets graves et irréversibles sur l’être humain et l’environnement ».
Réfléchir à un système d’indemnisation
Un peu plus loin, les membres du groupe de travail estiment qu’il faudra « peut-être réfléchir à un système d’indemnisation des personnes pouvant être victimes des effets secondaires d’un produit apparu de nombreuses années après l’exposition ».
En conclusion, les six académiciens et industriels jugent que l’avenir des produits chimiques passe par un bon équilibre entre « leurs apports incontestables » et « leur bonne utilisation, leur bonne élimination et la gestion des effets secondaires qu’ils peuvent générer ». À ce titre, les experts appellent notamment à « mieux évaluer et anticiper les risques avec des études toxicologiques et écotoxicologiques fiables, réalistes » tout en espérant à l’avenir des réglementations tenant compte de cet équilibre « sans imposer des mesures excessives de protection ».
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