À quoi ressemblera l’épidémie de SARS-CoV-2 dans dix ans ? À partir des connaissances acquises sur quatre coronavirus humains endémiques (HCoV), qui circulent dans le monde, mais aussi du SARS-CoV-1 et du MERS, trois chercheurs américains ont modélisé la transition de l’épidémie vers une phase endémique.
Selon cette étude publiée dans « Science », la gravité de la crise actuelle ne serait qu’une « conséquence de l’émergence d’une épidémie dans une population immunologiquement naïve dans laquelle les plus âgés sans exposition antérieure sont les plus vulnérables aux maladies graves ».
Une primo-infection dans la petite enfance…
À terme, le SARS-CoV-2 pourrait ressembler aux autres coronavirus endémiques et ne provoquer que des symptômes bénins. Avec les HCoV, les primo-infections dans la petite enfance entraînent une protection qui perdure tout au long de la vie. Trois types d’immunité peuvent être induits par une infection. L’immunité « stérilisante » empêche la réplication du pathogène et rend l’hôte réfractaire à la réinfection. Les deux autres atténuent soit la gravité de la réinfection, soit la transmissibilité ou l’infectiosité.
Avant d’atteindre un « rythme de croisière », la circulation du virus est associée à un changement de la répartition par âge des infections primaires. « Au début d’une épidémie, la répartition par âge des cas reflète celle de la population », expliquent les auteurs. Mais, avec l’acquisition progressive d’une immunité collective, l’épidémie finit par atteindre un état d’équilibre : le virus circule, mais provoque une maladie atténuée par la protection acquise.
Pour les HCoV, l’infection infantile peut être le résultat d’un « taux d’attaque élevé », signifiant une combinaison de facteurs assurant la transmissibilité du virus : un R (taux de reproduction) élevé, un déclin de l’immunité stérilisante et une transmission significative par réinfection chez les personnes âgées. Ces dernières bénéficient d’une protection immunitaire contre une forme grave de la maladie, acquise lors des infections précédentes, voire infantiles.
Si une version endémique du MERS venait à se développer, elle pourrait provoquer un scénario différent. Alors que le SARS-CoV-2 provoque une maladie bénigne chez les enfants, le MERS a un fort taux de létalité chez les plus jeunes. Leur vaccination serait alors une nécessité. À l’état endémique, « la létalité d’un HCoV circulant dépend principalement de la gravité des infections infantiles », résument les auteurs.
... pour une immunité durable
La durée d’une transition vers la phase endémique d’un coronavirus peut s’étendre de « quelques années à quelques décennies, selon la vitesse de propagation du pathogène », poursuivent-ils.
Et c’est ce paramètre ainsi que la vaccination et les mesures de contrôle de l’épidémie qui détermineront la vitesse d’acquisition d’une immunité durable par exposition ou vaccination.
Plusieurs scénarios peuvent ainsi être envisagés, mais, pendant la phase de transition, il restera nécessaire de protéger les plus vulnérables qui n’auront pas rencontré le virus. Et, si la vaccination offre une protection efficace, le régime endémique pourra intervenir plus rapidement. Une fois ce stade atteint, la vaccination massive pourrait ne plus être nécessaire.
J. S. Lavine et al. Science 12 Jan 2021. DOI: 10.1126/science.abe6522
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