Pollution

Le cri d’alerte des pneumologues

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Publié le 08/02/2017
Pr Bruno Housset

Pr Bruno Housset

Ces derniers mois auront été marqués par de nombreux pics de pollution un peu partout en France. Ce qui a permis à plusieurs pneumologues de se faire entendre à la fois des responsables politiques et des médias. « Il est très important de pouvoir dénoncer les effets délétères de la pollution sur la santé. Longtemps, le sujet a été trop ignoré. Il concerne les responsables politiques mais aussi chacun d’entre nous. Car c’est aussi par la mobilisation citoyenne qu’on pourra améliorer la qualité de l’air », explique le Pr Bruno Housset, pneumologue, chef du service de pneumologie au centre hospitalier intercommunal de Créteil et président de la Fondation du souffle.

Début décembre, le Pr Housset a été reçu par Anne Hidalgo, la maire de Paris en compagnie de la Pr Jocelyne Just (pneumologue, hôpital Armand-Trousseau, Présidente de la Société française d'allergologie), du Pr Thomas Similowski (pneumologue, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière-Charles-Foix, président du Fonds de recherche en santé respiratoire), du Dr Gilles Dixsaut médecin hospitalier, (président du Comité de Paris contre les maladies respiratoires) et du Pr Alexandre Duguet (pneumologue, vice-doyen de la faculté de médecine Pierre et Marie Curie Paris 6).

Non-assistance à personne en danger

Cet entretien faisait suite à la publication en septembre, par ces cinq médecins, d’une tribune très incisive dans le Journal du dimanche. « En France, la pollution de l’air extérieur entraîne environ 48 000 décès prématurés chaque année. À Paris, elle entraîne environ 2 500 décès chaque année et retire plus de 2 ans d’espérance de vie à 30 ans. À l’échelle de la Métropole, ce sont 6 600 décès qui seraient évitables chaque année. Il est urgent d'agir. Ne pas le faire, c'est se rendre coupable de non-assistance à personne en danger », écrivaient-ils alors.

Ce chiffre de 48 000 décès a ensuite été largement commenté. Il est issu d’une étude publiée en juin par Santé publique France, organisme qui a notamment regroupé l’InVS et l’Inpes. « Ce chiffre de 48 000 décès prématurés provient d’une extrapolation faite par des épidémiologistes à partir de différentes données. On peut discuter ce chiffre et son ampleur. Mais il est clair que la pollution entraîne un certain nombre de décès en France, principalement de manière indirecte chez des personnes vulnérables, ayant en particulier des pathologies respiratoires ou cardiovasculaires », souligne le professeur Housset.

Les pics de pollution focalisent souvent l’attention des médias et des responsables politiques. Ils peuvent parfois avoir des effets graves avec la survenue de crises d'asthme ou l'aggravation de certaines maladies respiratoires ou cardiaques. « Même si cela est difficile à quantifier de manière précise, un certain nombre d’infarctus ou d’AVC sont provoqués par la pollution », indique le Pr Housset. Les pics de pollution n’ont qu’un impact faible sur la mortalité globale due à la pollution. Par exemple, à Paris, entre 2007 et 2010, ils auraient été responsables de 7 % des décès et des hospitalisations.

Effet cumulatif

« Ce qui tue le plus, c'est l'exposition régulière. Car, comme pour le tabagisme, il y a un effet cumulatif avec les polluants, explique Bruno Housset. Les chiffres de mortalités n’ont rien de comparables avec ceux beaucoup plus dramatiques du tabac. Mais on choisit de fumer, pas de respirer un air pollué », ajoute-t-il.

En fait, le risque principal vient donc d’une exposition quotidienne à des niveaux de pollution qui, sans dépasser les seuils d'alerte, se révèlent néfastes à long terme. « En effet, par différents mécanismes dont le stress oxydatif et l'inflammation, l'exposition à la pollution de l'air, notamment aux particules fines, contribue au développement de pathologies chroniques telles que des maladies cardiovasculaires, respiratoires ou encore neurologiques, et des cancers », souligne Santé publique France.

D’après un entretien avec le Pr Bruno Housset, pneumologue, chef du service de pneumologie au centre hospitalier intercommunal de Créteil et président de la Fondation du souffle

Antoine Dalat

Source : lequotidiendumedecin.fr