Pollution de l'eau, réchauffement climatique, menace pour la sécurité alimentaire, les effets dévastateurs du tabac sur l'environnement viennent alourdir le fardeau qu'il fait peser sur la santé. À l'occasion de la journée mondiale de lutte contre le tabac, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) met un coup de projecteur sur l'impact des 84 millions de tonnes de CO2 émises chaque année par l'industrie du tabac et les 22 milliards de tonnes d'eau utilisées.
L'industrie du tabac est « l'un des plus grands pollueurs que nous connaissons », a expliqué le directeur de l'OMS pour la promotion de la santé, Rüdiger Krech, présentant un rapport aux conclusions « assez désastreuses ». Le document, intitulé « Le tabac, poison pour notre planète », se penche sur l'empreinte environnementale du secteur dans son ensemble, de la culture des plants à la fabrication des produits du tabac, en passant par la consommation et les déchets.
« L'autre scandale du tabac »
Un terrible constat qu'a choisi de relayer pour cette journée de lutte la Ligue contre le cancer, « engagée de longue date pour la dénormalisation du tabagisme ». Le tabac est le premier facteur de risque de cancers évitables et est responsable de 75 000 décès chaque année en France, dont 45 000 des suites de cancer. Mais « en plus d'être particulièrement meurtrier », le tabac et son industrie sont liés à « un autre scandale », la destruction de l'environnement, dénonce la Ligue.
« Nous devons profiter de la prise de conscience des Français concernant les enjeux environnementaux pour faire savoir que chaque cigarette pollue massivement l'eau, nécessite d'énormes quantités de pétrole, participe à la déforestation avec l'occupation pour sa culture de terres agricoles qui pourraient être dédiées à la production alimentaire », a déclaré dans un communiqué le Pr Daniel Nziri, président bénévole la Ligue. « Le contexte actuel et la menace de pénuries alimentaires qui plane doivent nous pousser à ouvrir les yeux sur cette tragique réalité », a-t-il ajouté.
La culture du tabac serait responsable d'environ 5 % de la déforestation dans le monde, selon l'OMS, et contribue ainsi à l'épuisement des réserves en eau. De plus, près d'un quart des cultivateurs du tabac souffrent de la maladie du tabac vert, une forme d'empoisonnement à la nicotine par la peau. Alors que le secteur emploie un grand nombre d'enfants, ces travailleurs seraient exposés à l'équivalent de la nicotine contenue dans 50 cigarettes par jour.
Deuxième source de pollution plastique
Les produits du tabac, qui sont les détritus les plus souvent jetés de la planète, « contiennent plus de 7 000 composés chimiques, qui, une fois jetés, se répandent dans l'environnement », détaille ainsi Rüdiger Krech. Chacun des 4 500 milliards de mégots de cigarettes jetés chaque année peut polluer jusqu'à 100 litres d'eau, souligne-t-il. Sans compter qu'une part importante des émissions globales à effet de serre provient de la transformation et du transport du tabac, l'équivalent d'un cinquième de l'empreinte carbone du transport aérien.
Les microplastiques contenus dans les filtres de cigarettes sont retrouvés dans les océans du monde entier, y compris au fond de la fosse des Mariannes, la plus profonde, ce qui en fait la deuxième plus importante source de pollution plastique. Alors qu'il n'y a pas de preuves de leur effet bénéfique pour la santé, l'agence onusienne exhorte les responsables politiques du monde entier à traiter ces filtres comme des plastiques à usage unique et à envisager leur interdiction.
Les coûts gigantesques du nettoyage des déchets de l'industrie du tabac sont supportés par les contribuables, environ 2,6 milliards de dollars chaque année pour la Chine ou encore 766 millions pour l'Inde. L'OMS insiste pour que davantage de pays suivent l'exemple de la France et de l'Espagne en adoptant le principe du pollueur-payeur. Pour Rüdiger Krech, il est important que « l'industrie paie vraiment pour les dégâts qu'elle est en train de créer ». Mais cette position ne satisfait pas la Ligue : cet accord « constitue un conflit fondamental et inconciliable entre les intérêts de l'industrie du tabac et de la santé publique », écrit-elle. Seule la diminution de la consommation de tabac doit être considérée « comme levier essentiel pour atteindre tous les objectifs de protection de l'environnement et de la santé publique », estime-t-elle.
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