En France, 10 371 décès ont été dénombrés en 2010, soit 27 suicides par jour. Pour mieux appréhender ce fléau, l’Union nationale pour la prévention du suicide (UNPS) organise demain mercredi 5 février, dans toute la France*, une journée de débats avec les citoyens, les associations, les organisations sanitaires et sociales et les pouvoirs publics. S’engager pour aider toutes les personnes – qui désirent se donner la mort – à s’en sortir, tel est le thème de cette journée nationale. Tout le monde peut, en effet, agir à sa manière et selon ses possibilités pour éviter ces actes suicidaires. Le citoyen, en étant à l’écoute de ses proches (famille, amis et collègues). Les associations, en délivrant - par exemple - des outils et des informations au grand public. Les pouvoirs publics, en organisant la prévention du suicide à l’échelle nationale, mais aussi régionale.
Détecter et prendre en charge
Pour leur part, les médecins (psychiatres, urgentistes, généralistes...) ont un rôle de taille à jouer pour briser les tabous autour du suicide, détecter et prendre en charge le mal-être des patients avant qu’il ne soit trop tard. « Le médecin est indispensable mais il ne peut rien s’il gère seul les patients : il doit travailler en synergie, avec les autres professionnels de santé, les associations, l’entourage du patient... car les conduites suicidaires ont une origine polysémique. L’histoire personnelle de la personne, son environnement depuis la petite enfance et peut-être même, son patrimoine génétique peuvent expliquer certaines fragilités. Aujourd’hui, toute la difficulté est de faire travailler les bonnes volontés ensemble, contre le suicide », souligne le Dr Marc Fillatre, vice-président de l’Union nationale pour la prévention du suicide (UNPS), psychiatre, thérapeute familial, président de Vies37**.
Des lacunes dans la formation
Le premier plan de prévention du suicide initié en 2001 a permis de faciliter la culture du travail en commun par le biais notamment, de la mise en place de formations pluridisciplinaires à la prise en charge du suicide. Mais les lacunes restent importantes lorsqu’il s’agit de former les médecins. « Il est urgent que la question du passage à l’acte suicidaire soit mieux abordée dans les facultés de médecine, en formation initiale », précise le Dr Fillatre.
Marc Lustmann, médecin généraliste et sociologue, membre du CA de l’UNPS s’est, pour sa part, formé, à cette question. « La crise suicidaire bouscule les habitudes du généraliste et il n’est pas toujours facile d’en parler avec le patient », indique-t-il. De leur côté, certains patients avouent ne pas aborder le sujet avec leur psychiatre ou leur généraliste, de peur de devoir être hospitalisés ou d’effrayer le médecin. « C’est ce qui explique qu’ils préfèrent parfois être écoutés de façon anonyme, par téléphone », assure Paule Frering, secrétaire générale de l’UNPS et de Suicide Écoute.
Redéfinir le rôle du généraliste
Le Dr Lustmann affirme, pour sa part, prendre le temps d’écouter et de dialoguer « trois quarts d’heures s’il le faut » avec la personne ayant des idées suicidaires. Ce qui n’est pas possible pour tous les médecins généralistes, compte tenu de leur surcharge de travail. Pour améliorer la prise en charge du suicide par le généraliste, une réflexion sur son rôle devrait donc être initiée. « Nous assistons, depuis des années, à des débats sur la place du médecin de premier recours. Dans certaines régions, et notamment dans les déserts médicaux, le médecin de famille n’existe plus. Il est difficile, dans ces conditions, de suivre les patients. Par ailleurs la prise en charge du suicide ne doit pas complètement reposer sur les épaules du généraliste : il doit déléguer certaines compétences (aux psychologues, infirmiers, travailleurs sociaux...). Enfin, les missions de la médecine préventive (PMI, médecine scolaire et du travail) mériteraient d’être redéfinies pour mieux prendre en compte les populations fragiles et précaires », conclut Françoise Facy, présidente de l’UNPS.
* Le programme est disponible sur le site de l’UNPS (fédération de 37 associations qui fait le lien entre la société civile et les pouvoirs publics sur la question du suicide) : www.unps.fr
** Vies37 est un réseau dédié à la prévention du suicide en Indre-et-Loire : www.vies37.psrc.fr.
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