Les tests rapides de dépistage et de diagnostic des infections bactériennes, pourtant de plus en plus spécifiques, sensibles et rapides, sont largement sous employés en France, selon un livre blanc publié mercredi par un groupe d'experts qui formulent 10 propositions pour améliorer la situation.
Ce groupe de travail, monté en association avec les entreprises développant des dispositifs de tests rapides, s'est monté dans le sillage du rapport Carlet (disponible ici). Ces tests rapides se répartissent entre tests d'orientation rapide, tests de dépistage rapide et tests de diagnostic rapide. Ils sont censés déterminer le caractère bactérien d'une infection, à l'image les tests de diagnostic rapide des angines à streptocoques du groupe A, ou repérer les résistances spécifiques comme les tests de diagnostic des staphylocoques dorés résistants à la méticilline. Tous ont en commun d'aider à éviter les prescriptions inutiles d'antibiotiques ou d'adapter rapidement le traitement de patients infectés par des souches multirésistantes.
« Les premiers tests rapides ont 10 ou 15 ans, se souvient Alain-Michel Ceretti, conseiller santé auprès du Défenseur des droits et fondateur de l'association le Lien. Je suis étonné de voir que, depuis, et en dehors du test rapide de diagnostic des angines, les tests rapides ne sont ni reconnus ni financés par les pouvoirs publics. »
Parmi leurs 10 propositions, les auteurs insistent sur le fait qu'une grande partie des tests ne figurent pas dans la nomenclature des actes de biologie médicale (NABM). Ils suggèrent également d'inscrire dans la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) la pratique systématique de tests rapides avant la prescription d'une antibiothérapie dans les situations cliniques les plus fréquemment rencontrées. Ils souhaitent aussi que les pharmaciens puissent réaliser ces tests, incités par le remboursement d'un acte pharmacien.
Réticences professionnelles
Le livre blanc pointe aussi du doigt certaines résistances parmi les professionnels de santé. « Je ne suis pas certain qu'il y ait des TROD dans tous les services de maladies infectieuses, reconnaît le Pr Claire Poyart, chef du service de bactériologie du groupe hospitalo-universitaire Paris Centre, à Cochin. Il y a un véritable effort de formation à faire. »
« On se heurte aussi aux pratiques des laboratoires de biologie, poursuit le Dr Richalet, le plus difficile n'est pas tant de donner les moyens financiers afin de généraliser ces tests que de changer les mentalités et l'organisation. » Dans le même ordre d'idées, le livre blanc propose aussi d'inciter les sociétés savantes et les autorités de tutelles de mettre à jour leurs recommandations, accusées d'une certaine « inertie ».
Le Dr Richalet cite l'exemple de la recherche de streptocoque B, obligatoire chez les femmes enceintes un mois avant l'accouchement. « Aujourd'hui, il existe un test qui peut être réalisé dans la salle d'accouchement, mais l'acte n'est pas coté. Dans notre clinique, nous pratiquons ce test en plus de celui réalisé un mois avant. Nous avons constaté que 5 % des patientes sont négatives au 8e mois et positives le jour de l'accouchement, raconte-t-il. De plus, 2 % des femmes positives au 8e mois sont négatives en salle d'accouchement… mais nous les avons traitées quand même car les recommandations disent qu'il faut traiter en cas de recherche positive de streptocoques au 8e mois. »
Changer l'organisation des soins
Le groupe de travail demande aussi une modification de l'organisation des soins, avec notamment la réalisation de tests au coup par coup ou en petites séries, et non plus en longues séries comme c'est le cas pour des raisons de rentabilité. Elle met en avant les examens biologiques délocalisés dans des cabinets médicaux et des services de maladies infectieuses pour les tests ne demandant pas une formation poussée de biologiste médical. « On perd le bénéfice des tests rapides si l'on perd du temps entre le prélèvement et le diagnostic et entre le diagnostic et la réponse », estime le Pr Poyart.
Enfin, les experts préconisent la mise en place de campagnes de communication grand public, une des grandes déceptions du suivi du rapport Carlet. « Il devait y avoir une grande campagne qui n'a finalement pas eu lieu, explique Alain-Michel Ceretti, on a préféré mettre le paquet sur les génériques. »
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