Enquête au travail

Quels sont les motifs de mal-être ?

Publié le 10/02/2011
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PEUT-ON faire le portrait d’un urologue heureux au travail ? Tout à fait, selon le Dr Chantal Delmas, médecin du travail à l’Hôtel-Dieu de Paris, qui a analysé soigneusement les résultats d’une enquête qu’elle avait menée en 2009 lors du congrès de l’AFU. « Il a moins de 50 ans, c’est peut-être bien une femme, il dort bien, ne fume pas, prend le temps de déjeuner, de faire du sport, a un hobby et habite une grande ville » détaille-t-elle, en ajoutant que, « a contrario, celui qui ne va très bien serait plutôt un praticien hospitalier, travaillant dans un hôpital général, souffrant d’un manque de reconnaissance, d’une mauvaise organisation des soins avec une évolution de carrière difficile, des relations problématiques avec ses confrères, voire exprimant au maximum un réel désintérêt pour son métier ». C’est ce qui ressort de ce travail qui a été réalisé grâce à une échelle analogique spécifique, EVA-BT, « qui apparaît parfaitement corrélée avec le questionnaire de Goldberg évaluant le stress au travail » et qui a été complété par quelques questions subsidiaires. Certes, en moyenne, les urologues se sentent plutôt mieux que d’autres professionnels, avec un score moyen de 2,9 (plus le score est bas, meilleur est le bien-être), mais la lecture de l’ensemble des données permet surtout d’identifier plus précisément ceux qui vont bien et ceux qui vont mal Ainsi, habiter une ville de moins de 50 000 habitants dégrade le score qui monte à 3,2 par rapport à celui des urologues travaillant dans une agglomération de plus 250 000 habitants (score de 2,8), semble-t-il en raison d’un excès de gardes, d’un matériel moins performant. Les internes apparaissent aussi les mieux dans leur peau (score de 2,6) alors que le score est déjà moins bon chez les chefs de cliniques (2,9). Parmi les éléments qui abaissent significativement le score, on peut citer : le nombre élevé d’heures travaillées par semaine, la mauvaise organisation des soins, le manque de reconnaissance, un désintérêt au travail et, surtout, une évolution de carrière non satisfaisante ainsi que de mauvaises relations avec les confrères. « En revanche, souligne le Dr Delmas, les urologues sont plutôt minces (plus de 60 % ont un IMC < 25 kg/m2), plus de la moitié mangent au moins un plat à midi, les trois quarts ont une activité sportive et 86 % un hobby… Et ils ne se plaignent d’aucune difficulté en rapport avec les patients ou leurs familles ». Certes ces résultats peuvent se lire dans les deux sens, les plus surchargés de travail, qui sont aussi les plus stressés, ayant logiquement moins de temps personnel. Mais, « peu importe, conclut le Dr Delmas, l’important est que l’association de deux ou trois caractéristiques puisse fonctionner comme un signal d’alerte, à condition que les urologues disposent au moins d’un médecin traitant, ce qui est le cas pour un quart d’entre eux, ou d’un médecin du travail (22 %) ».

D’après un entretien avec le Dr Chantal Delmas, médecin du travail, hôtel-Dieu, Paris.

DR PATRICIA THELLIEZ

Source : Bilan spécialistes