QUELLES ERREURS ? On peut en citer beaucoup ; la principale consiste à mener les réformes à un rythme tel qu’on en commence avant d’avoir achevé les précédentes et maintenant que l’on recule devant les difficultés. Lachute de M. Sarkozy serait donc indépendante de la crise sans précédent qui accable la France et le monde. On reproche aussi au président un mode de gouvernement qui éclipse les ministres : il se plaint de devoir intervenir sur tous les problèmes à cause de l’insuffisance de ses collaborateurs. Il a aussi doublé chaque membre du gouvernement d’un conseiller élyséen qui a plus d’autorité que le ministre chargé de dossiers spécifiques. Le résultat est que, dans les négociations sociales, les interlocuteurs du pouvoir estiment qu’ils ne peuvent avoir de garanties que celles qui viennent du chef de l’État.
Une affaire mal gérée.
Pour prendre un exemple, M. Sarkozy n’est pourtant pas intervenu dans la crise des Antilles. On l’en a d’ailleurs blâmé avec la véhémence qu’inspire son activisme. On ne peut pas dire que les ministres concernés, le secrétaire d’État aux DOM-TOM et la ministre de l’Intérieur aient brillé par leur dynamisme dans la gestion d’une crise entrée dans sa sixième semaine et dont on ne voit pas le bout. Livrés à eux-mêmes dès lors que le président ne bougeait pas, Yves Jégo et Michèle Alliot-Marie semblent avoir été, en l’occurrence, pilotés par le Premier ministre, François Fillon, qui a empêché M. Jégo de signer l’accord sur la fameuse augmentation de 200 euros des salaires, a rappelé le secrétaire d’État à Paris, pour accepter enfin, quelques semaines plus tard, la hausse des salaires que le MEDEF local, cependant, refuse de payer. Après avoir exprimé sa compassion pour la population des Antilles confrontée à des prix excessifs à cause des monopoles, le gouvernement s’inquiète d’un mouvement, le LKP d’Élie Domota, dont la conviction serait indépendantiste et la méthode arrogante et parfois brutale. Nombre de Guadeloupéens estiment, par exemple, que le LKP s’est arrogé un rôle politique qui n’a rien à voir avec des revendications sur le pouvoir d’achat.
Quoi qu’il en soit, les Antilles apparaissent à l’opinion comme une affaire mal gérée. Mais curieusement, il s’agit d’une crise qui n’a pas été prise en main par le chef de l’État ; il est donc contradictoire de critiquer à la fois son omniprésence et l’échec du gouvernement face à une situation d’où il était absent. Les autres sujets de mécontement populaire sont plus faciles à cerner. Les Français sont assez épouvantés par la crise pour souhaiter que le pouvoir fasse une pause dans les réformes et s’occupe plutôt de la menace sur l’emploi et le pouvoir d’achat. Le recul du gouvernment à propos de plusieurs dossiers emblématiques, par exemple le travail dominical, la réforme des lycées, celle de l’université et de la recherche, semble effectivement indiquer un essoufflement de M. Sarkozy. La chute de sa popularité aggrave un tableau qui, en ce début d’année, ne lui est pas du tout favorable, alors que le chômage ne pourra qu’augmenter.
Est-ce à dire que M. Sarkozy est fini ? C’est seulement le message que veut faire passer l’opposition, qui a décidé de combattre non seulement sur le terrain des réformes mais sur celui de la réponse du gouvernement à la crise. On peut penser, comme nous, que M. Sarkozy, a été, au même titre que Barack Obama et bien avant lui, l’un des chefs d’État qui en ont le mieux mesuré la gravité de la crise et ont réagi avec la plus grande rapidité et la plus grande détermination. On peut aussi penser, comme quelques économistes, que le plan de relance français est insuffisant. Il semble l’être au regard de la croissance à pas de géant du chômage ; il ne l’est pas par rapport à une consommation qui ne faiblit pas (alors qu’aux États-Unis, elle s’est effondrée), et qui, en outre, est accompagnée par un effort d’épargne accru des ménages, ou encore à un phénomène de désinflation utile au pouvoir d’achat. Il y aura sûrement un verdict du peuple, mais il est trop tôt pour qu’il le prononce.
Mauvaise année pour Sarko.
Entre-temps, M. Sarkozy n’est pas inerte. Il est vrai qu’il parle trop, ce qui le conduit à se contredire ou à faire des annonces (comme les grèves dont les Français ne s’aperçoivent plus) qui le ridiculisent. Il est vrai que, pour s’assurer de l’adhésion du peuple à son programe de lutte contre la crise, il a fait de celle-ci un épouvantail affreusement anxiogène et que, loin de rassurer, le président inquiète.. Il est vrai que, trop souvent, il dresse un groupe contre un autre et divise davantage le pays qu’il ne le rassemble. Il est vrai que, soudain, son prédécesseur, Jacques Chirac, représente déjà le bon vieux temps, le président humaniste que la France regrette et l’ancien chef d’État tellement à l’aise au Salon de l’Agriculture alors que M. Sarkozy n’a qu’une hâte, celle de le quitter.
Il est non moins vrai qu’à des critiques justes et fondées, l’opposition en ajoute des tonnes sur la nomination de François Pérol, comme si c’était un sujet vital pour le pays, sur l’affaiblissement du pouvoir, alors qu’elle-même est divisée, sur un portrait caricatural du président, sur un rejet des réformes qui cache plus de conservatisme qu’il ne met en lumière une dynamique différente et originale. Non, l’année 2009 ne sera pas bonne pour Nicolas Sarkozy et sa popularité va encore baisser. Mais son mandat, qui court jusqu’en 2012, ne peut être raccourci que par un événement d’une gravité insigne qu’on ne souhaite pas pour la France, pas plus qu’on ne le souhaite pour la Guadeloupe. Dans ces conditions, le temps est le meilleur remède. Le temps nous permettra de digérer la crise. Le temps offrira à M. Sarkozy des occasions de se refaire une santé politique. ça va mal pour lui mais il n’a pas dit son dernier mot. En définitive, les hommes ne comptent pas ; seul compte l’intérêt bien compris du pays.
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