En Angleterre, les personnes les plus vulnérables ont souffert de discrimination dans la lutte contre la pandémie de coronavirus. Selon la Commission de la qualité des soins (QCC), l’impact a été disproportionné chez les personnes âgées, en situation de handicap, d’origine noire ou ethnique minoritaire, les réfugiés, les demandeurs d’asile, les SDF ou encore les communautés roms, gitanes et les gens du voyage.
Des instructions de ne pas tenter de réanimation cardiopulmonaire (Do not attempt cardiopulmonary resuscitation, DNACPR/Ne pas réanimer, NPR) données de façon collective, et non individuelle, ont provoqué un scandale dès le début de la pandémie. Alerté par de telles pratiques dès le printemps 2020, le ministère de la Santé a demandé à la commission de mener une enquête.
Selon le rapport intermédiaire, dans certaines localités, des outils de décisions, des protocoles et des systèmes de triage ont été mis en place en urgence pour faire face à l’ampleur de la pandémie. « Les préoccupations concernant la capacité des hôpitaux du NHS [N.D.L.R. National Health Service] à faire face au nombre potentiel d’admissions de personnes atteintes de Covid-19 ont conduit à plusieurs mesures visant à augmenter la disponibilité des lits d’hôpitaux de courte durée et la capacité de soins intensifs », précise le rapport. Ces décisions ont eu pour conséquences la remise en cause de traitements hospitaliers pour des personnes en institution, que ce soit pour le Covid ou d’autres maladies.
Mauvaises interprétations
Les personnes âgées et en situation de handicap, qu’il s’agisse de troubles physiques et sensoriels, d’apprentissage ou cognitifs tels que la démence, ont été particulièrement touchées. Sans ces décisions inappropriées, la Commission estime que des décès auraient pu être évités.
Le rapport révèle que, selon le British Institute of Human Rights, 10 % des personnes ayant eu recours à ses services ou ayant répondu à son appel à preuves ont déclaré avoir subi des pressions concernant des ordres de ne pas réanimer. Quelque 34 % des personnes travaillant dans la santé ou dans les services sociaux ont aussi déclaré avoir été sous pression pour mettre en place ces DNACPR/NPR sans impliquer les personnes concernées. Amnesty International a de son côté rapporté des exemples de mise en place de DNACPR/NPR sans consultation des médecins traitants ni d’autres professionnels hospitaliers et d’établissements médico-sociaux. « L’organisme s’est aussi rendu compte que les personnels de santé ont parfois mal interprété des DNACPR/NPR, ce qui a pu empêcher certaines personnes d’accéder à des soins ou à des traitements », est-il souligné.
Bonnes pratiques
Face à ces problématiques, une lettre rédigée de façon commune entre la QCC, la British Medical Association, la Care Provider Alliance et le Royal College of General Practitioners a été envoyée dès le 30 mars aux prestataires de soins sociaux pour adultes et aux médecins généralistes. Le texte rappelait le caractère inacceptable de l’application de plans de soins préalables, avec ou sans formulaire de DNACPR/NPR, à l’encontre de groupes de personnes. Le NHS a renvoyé ce rappel dès le 7 avril aux cabinets de médecins généralistes, aux réseaux de soins primaires et aux prestataires de santé communautaires.
Après ces mises au point, la Commission considère que la pratique n’a pas perduré de façon répandue mais elle estime que des ordres de DNACPR/NPR existent encore dans le dossier médical de certaines personnes vulnérables. « Alors que six Anglais sur dix décédés du Covid étaient en situation de handicap, selon le bureau des statistiques nationales britanniques, ces instructions risquent de coûter de nouvelles vies », s’inquiète Fazilat Hadi, cheffe des politiques de l’association Disability Rights UK.
La Commission conclut à la nécessité pour chaque institution de santé de mettre en place une concertation dans le cadre d’une planification préalable des soins centrée sur la personne et conformément aux exigences légales. Un suivi large de l’utilisation des DNACPR/NPR est prévu en milieu hospitalier et en ville (hôpitaux, services de santé, ambulanciers, protection sociale). Des recommandations sont attendues pour soutenir les bonnes pratiques, tandis que le rapport final est annoncé pour les semaines à venir.
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