M IRKO BELJANSKI est mort en 1998, à 74 ans, d'une leucémie myéloïde aiguë, mais ses travaux ont toujours de fervents défenseurs et les produits prétendument anticancer et anti-SIDA qu'il a mis au point sont toujours disponibles dans plusieurs pays et sur Internet.
Déjà condamné une première fois en 1992, avec dispense de peine, ce chercheur du CNRS à la retraite avait été mis en examen en 1996 pour « exercice illégal de la pharmacie et fabrication illégale de médicaments » et il comptait défendre devant le tribunal l'intérêt scientifique de ses travaux. La mort l'en aura empêché ; mais aujourd'hui son épouse, Monique, compte bien reprendre le flambeau alors qu'elle est jugée toute cette semaine par le tribunal correctionnel de Créteil pour exercice illégal de la pharmacie de 1991 à 1997, avec quinze coprévenus.
Interrogée par l'AFP à la veille du procès, Monique Beljanski, 69 ans, technicienne de laboratoire, s'indigne qu'elle et son mari aient été traités « comme des charlatans vendant de la poudre de perlimpinpin ». « C'est un travail de recherche fondamentale d'un fou de sciences qui a fait de nombreuses publications, jamais démenties », ajoute-t-elle, en soulignant qu'un programme de recherches se poursuit en Israël.
Les époux Beljanski avaient fabriqué et vendu des produits à visée thérapeutique sans AMM, dans un petit laboratoire de biochimie à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) puis à Saint-Prim (Isère). Un réseau commercial, relayé par des pharmaciens, qui comparaissent aux côtés de Mme Beljanski, et des associations de malades défendant le « libre choix thérapeutique », les diffusait sous la houlette présumée de Pierre Silvestri, également sur le banc des prévenus.
La justice et le ministère de la Santé leur reprochent « l'absence d'autorisation à fabriquer des médicaments, l'absence d'AMM d'un produit présenté comme médicament, la publicité en faveur de médicaments non autorisés, une tromperie sur la marchandise vendue ».
Plusieurs associations, comme AIDES, Act Up ou la Ligue nationale contre le cancer sont parties civiles dans ce procès, de même que l'Ordre des pharmaciens. « Il faut un minimum de contrôles légaux et scientifiques des produits pharmaceutiques, dit l'avocat de AIDES. Des sidéens ont abandonné des thérapies classiques pour se soigner avec ces produits, Beljanski a refusé de fournir les composants exacts ».
De même, témoigne la juriste de la Ligue, « des cancéreux arrêtent leur traitement pour ne prendre que les produits Beljanski, qui n'ont pas prouvé leur efficacité ».
Et le danger n'est pas écarté puisque, comme l'a constaté l'AFP, ces produits sont actuellement vendus depuis New York par la société Natural Source, dirigée par une fille du couple, et distribués comme compléments alimentaires en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis, où ils sont autorisés. Tandis que Mme Beljanski s'apprête à publier en avril « Mirko Beljanski ou la chronique d'une fatwa scientifique », dans lequel elle raconte « la mise à mort médiatique, fiscale et judiciaire d'un chercheur gêneur ».
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