Prévention des maladies allergiques

Ce que l’on sait des animaux dits « hypoallergéniques »

Publié le 31/01/2011
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Crédit photo : DR

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Allergènes

Les allergènes des principaux animaux domestiques

1. Le chat : le principal allergène majeur Fel d 1 est surtout présent dans les glandes sébacées et à moindre degré dans les glandes salivaires et anales de l’animal. Il est retrouvé dans l’habitat sur les matelas, canapés et jusque dans les cabinets des allergologues. La concentration de Fel d 1 est hormono-dépendante de la testostérone. Une chatte produit moins de Fel d 1 qu’un chat castré et encore moins qu’un chat non castré. On considère que 90 % des patients ayant un test cutané positif au chat ont une réactivité IgE-dépendante à Fel d 1. L’autre allergène majeur Fel d 4 est isolé dans les glandes salivaires sous-mandibulaires. Plus de 60 % des patients allergiques au chat réagissent à cet allergène. L’allergène mineur Fel d 2 existe dans le sérum et les phanères de l’animal. Sa participation (comme celle d’un autre allergène mineur Fel d 3) à l’apparition de symptôme reste à démontrer.

2. Le chien: les allergènes majeurs, Can f 1 et Can f 2, sont contenus dans les poils, les phanères et la salive de l’animal. Une étude effectuée en 2005 par l’équipe du Pr Vervloet, sur la concentration de l’allergène majeur chez des bergers allemands, bergers des Pyrénées, caniches, cockers, spaniels, griffons, labradors et yorkshires, semble prouver que certaines espèces de chien produisent plus ou moins de Can f 1. Le taux le plus élevé de Can f 1 était mis en évidence chez les caniches et les yorkshires puis chez les spaniels et les griffons. Le labrador retriever est la race de chiens dont la concentration en Can f 1 était la plus basse. L’allergène mineur Can f 3 (albumine de chien) est présent dans les phanères de l’animal. Il existe une homologie structurelle entre cet allergène et une kallicréine présente dans le liquide séminal humain. Ceci expliquerait une allergie au liquide séminal humain chez des femmes sensibilisées aux squames de chien. La réactivité croisée chien/chat peut être expliquée par l’appartenance à la même famille des lipocalines de Can f 1, Can f 2 du chien et Fel d 4 du chat.

Prévention

Rappel des principales mesures de prévention

Il est prouvé que le lavage du chat entraîne une diminution significative mais de courte durée de Fel d 1 dans l’air ambiant. Pour le chien, le lavage de l’animal doit être effectué au moins deux fois par semaine pour obtenir une réduction significative de Can f 1 sur les poils. Les purificateurs d’air HEPA (Haute Efficacité pour les Particules Aériennes) et les aspirateurs avec filtre du même type permettent de réduire également le taux de Fel d 1 pour le chat et de Can f 1 pour le chien. Ces mesures doivent être accompagnées de l’interdiction de l’accès de la chambre pour l’animal et de la pose d’un sol lisse de type ballatum sans moquette pour optimiser l’efficacité.

Chien et chat hypoallergéniques

On parle des chats Rex Devon, des chats nus, du chat korat, ou savannah comme étant « hypoallergéniques » parce qu’ils n’ont, selon les races, pas ou peu de poils ou qu’ils ne muent qu’une fois par an. Des chats génétiquement modifiés sont proposés à des prix prohibitifs sur internet sans garantie « d’efficacité à long terme ». D’un point de vu allergologique, il n’existe pas suffisamment d’études pour pouvoir affirmer que toutes ces races soient sans risque allergénique d’autant que les symptômes dépendent de l’allergène auquel le patient est sensibilisé. Ce qui est vrai pour un allergique ne l’est pas forcément pour un autre. Le Pr de Blay signale que les chats nudes ont quand même des glandes sébacées et par conséquent libérent des allergènes. Pour les chiens, l’annonce de l’arrivée à la « Maison Blanche » d’un chien d’eau portugais dit « hypoallergénique » s’est quasiment faite officiellement. Le chien nu chinois est également cité par certaines émissions grand public comme étant « hypoallergénique ». Les rares études effecuées sont pour l’instant insuffisantes pour confirmer la réalité « hypoallergénique » de l’animal dans sa globalité.

Le cas du cheval curly bashkir

L’allergène majeur du cheval est Equ c 1 retrouvé dans les squames, la salive et l’urine du cheval. Il est le principal responsable des réactions allergiques observées avec cet animal. D’autres allergènes tels que Equ c 2, Equ c 3, Equ c 4 et Equ c 5 sont isolés mais leur implication clinique reste imprécise. Depuis quelques années, une race particulière de chevaux est décrite comme étant « hypoallergénique ». Il s’agit des chevaux curly bashkir. Cette race très peu répandue en France (moins de 100 spécimens), a pour particularité de ne pas perdre ses poils bouclés. Une étude suédoise exposée lors du dernier congrès 2010 de l’EAACI (European Academy of Allergy and Clinical Immunology) tend à prouver que la concentration de Equ c 1 est trois fois plus faible pour le cheval bashkir que pour le cheval islandais ou le cheval de selle suédois. Pour obtenir une persistance de cette concentration allergénique minorée avec le bashkir, il faut cependant respecter quelques mesures, en particulier éviter de mettre ce cheval dans un club hippique où toutes les races de chevaux sont représentées et d’éviter le pansage de l’animal. De nouvelles études sont toutefois nécessaires pour affirmer totalement cette possible « hypoallergénicité ».

Désensibilisation

Effet de la désensibilisation spécifique au chien et au chat

La désensibilisation au chat par voie sous-cutanée ou sublinguale entraine une amélioration des tests de provocation nasale ou bronchique du patient avec une diminution de la symptomatologie clinique impliquant une présomption positive de l’efficacité de cette immunothérapie spécifique. Pour la désensibilisation au chien, il existe un nombre trop limité d’études et de patients étudiés pour pouvoir conclure sur l’efficacité de l’immunothérapie spécifique.

Conclusion

En conclusion, le terme « hypoallergénique » est beaucoup trop souvent utilisé à tort dans un but commercial. Il devient alors une accroche publicitaire. D’un point de vue allergologique, on peut affirmer que, pour l’instant, quel que soit l’animal, le nombre limité d’études cliniques ne peut permettre d’affirmer avec certitude le caractère définitivement « hypoallergénique » d’un animal quel qu’il soit ; qu’il existe certes des allergènes majeurs Fel d 1 (chat), Can f 1 (chien), Equ c 1 (cheval) mais que les allergiques peuvent réagir également à d’autres allergènes de ces animaux. La possible réduction des allergènes majeurs dans les animaux dits « hypoallergéniques » devient donc un argument insuffisant.

Une race qui convient à un allergique ne l’est pas forcément pour un autre patient.

On ne peut défendre l’achat d’un animal à un allergique ou à un atopique mais il faut alors en respecter au mieux les mesures de prévention et un traitement bien suivi. Si malgré cela les symptômes persistent, il faut envisager l’éviction de l’animal en choisissant un autre foyer prêt à l’accueillir.

Pas de conflit d’intérêt

D’après un entretien avec le Professeur Frédéric de Blay, Unité de pneumologie, d’allergologie et de pathologies respiratoires de l’environnement, CHU de Strasbourg

QDr Catherine QUEQUET Allergologue Amiens.

Source : Le Quotidien du Médecin: 8896