Avec 58 000 femmes diagnostiquées chaque année en France et 11 000 décès, le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme et la première cause de mortalité par cancer. Le dépistage organisé (DO) du cancer du sein, généralisé en France en 2004, invite les femmes âgées de 50 à 74 ans à bénéficier, tous les deux ans, d’une mammographie associée à un examen clinique. Or, depuis 2015-2016, une baisse régulière du taux de participation à ce dépistage est constatée dans toutes les tranches d’âges, excepté après 70 ans.
Polémiques mal fondées
Pour le Pr Carole Mathelin, responsable de l’unité de sénologie au pôle de gynécologie-obstétrique du CHRU de Strasbourg, ce sont les « controverses concernant les risques de surdiagnostic et de surtraitement [que le DO] pourrait induire et les doutes sur la baisse réelle de la mortalité » qui ont restreint la participation des femmes à ce dépistage. « Des polémiques mal fondées », estime la sénologue, selon qui « les détracteurs du DO fondent souvent leur argumentaire sur des études anciennes ou des programmes ayant des modalités très différentes de celles du modèle français ».
Pour autant, selon le Dr Bruno Cutuli, président de la Société française de sénologie et pathologie mammaire (SFSPM), « le surdiagnostic représenterait 10 à 15 % maximum des cas ». De plus, « cette maladie étant très hétérogène, il faut faire très attention au risque de sous-diagnostic », indique l’oncologue, qui précise cependant : « Attention à ne pas vouloir trop sous-traiter et entrer dans l’excès inverse. Il faut trouver un juste équilibre. »
Pour pallier la faible participation des femmes au DO, l’INCa a lancé, en septembre dernier, une nouvelle campagne nationale d’information ayant pour objectif de « porter à la connaissance des femmes une information claire et accessible et leur permettre de faire un choix en toute connaissance de cause ».
Améliorer le dépistage
Si les avis sont partagés sur les risques liés au sur- et au sous-diagnostic, l’amélioration du DO reste une question d’actualité. Y compris pour mieux dépister les cancers de l’intervalle, diagnostiqués entre deux examens programmés, qui, selon une étude du « JAMA », publiée en mai 2018, sont à 44 % de mauvais pronostic, tandis que les cancers détectés par le dépistage,ne le sont qu’à 26,9 %.
L’obtention des coupes millimétriques du volume mammaire en sus de l’image classique pourrait améliorer la visibilité des anomalies intramammaires. Leur utilisation dans le DO est en cours d’évaluation par la Haute Autorité de santé. La mise en place d’un dépistage adapté et « stratifié », fondé sur certains facteurs de risque (antécédents familiaux, densité mammaire, facteurs génétiques, mais également consommation d’alcool, obésité, alimentation hypercalorique, etc.) est également à l’étude
Enfin, une grande étude randomisée comparant l’efficacité d’un dépistage personnalisé, fondé sur le score de risque individuel MyPEBS, au DO standard tel qu'il est réalisé dans plusieurs pays (France, Royaume-Uni, Italie, Belgique, Israël) va être lancée en 2019. Elle inclura 85 000 patientes âgées de 40 à 70 ans, dont 20 000 en France. Le score MyPEBS, calculé sur des variables personnelles (âge, poids, taille, antécédents familiaux, etc.), la densité mammaire et le génotypage sur test salivaire, permettra d’adapter la fréquence de dépistage au risque calculé. Avec dans l’idée de renforcer le dépistage chez les femmes à haut risque et d'aller vers une désescalade chez celles à bas risque pour diminuer le surdiagnostic et les faux positifs.
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