Congrès EULAR 2018

Des avancées dans la polyarthrite rhumatoïde et le lupus

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Publié le 04/07/2018
Pr Jacques Morel

Pr Jacques Morel
Crédit photo : DR

La polyarthrite rhumatoïde (PR) reste toujours le sujet phare. Parmi les nombreux abstracts la concernant, les résultats de deux études de phase III portant sur un nouvel inhibiteur des Janus kinases (JAKi), l’upadacitinib, ont été rapportés (1). Elles avaient pour objectif d’évaluer l’efficacité et la tolérance de l’upadacitinib, en monothérapie versus méthotrexate. Le critère principal était l’ACR 20 et le DAS 28-CRP ≤ 3,2 à 14 semaines. « Tous les critères d’évaluation principaux et secondaires ont été remplis pour les deux posologies, 15mg/j et 30 mg/j, avec de meilleurs résultats que le méthotrexate en monothérapie. Quant à la tolérance, les données sont assez similaires à celles des études avec les autres JAKi en particulier en terme de risque d’infections sévères, de zona…) » souligne le Pr Jacques Morel.

De nombreuses présentations ont porté sur les stratégies de traitement. La PR fait l’objet d’une stratégie ciblée avec potentielle intensification thérapeutique (treat-to-target), l’objectif étant l’obtention d’une rémission clinique et l’absence de progression structurale. L’utilisation des scores clinico-biologiques est-elle suffisante pour atteindre cet objectif ou faut-il s’aider de l’imagerie, comme l’IRM ?

Dans l’étude IMAGINE-RA (2), 200 patients en faible activité clinique, traités par DMARDs synthétiques ont été randomisés en deux groupes de stratégie. La première se basait sur le DAS-28-CRP et la deuxième sur une IRM de la main dominante avec pour cible, une absence d’œdème osseux sous-chondral. Les patients étaient suivis tous les quatre mois pendant deux ans et le traitement était majoré tant que la cible n’était pas atteinte selon un algorithme pré-établi. Au terme de ce suivi, il n’existait pas de différence significative entre les deux groupes, en termes de rémission, ni en termes de pourcentage de patients sans progression structurale.

«  Ces résultats confortent les données de l’étude ARTIC qui n’avait pas démontré la supériorité d’une évaluation associée à l’échographie Doppler. La clinique et la VS ou la CRP sont suffisantes pour obtenir l’objectif de rémission » déclare le Pr Jacques Morel. 

La désescalade thérapeutique en question

Une autre question d’actualité, longuement évoquée, est celle de la désescalade thérapeutique dans la polyarthrite rhumatoïde. Que faut-il faire en cas de rémission prolongée ? Les recommandations préconisent tout d’abord la diminution du traitement biologique puis celle du traitement de fond synthétique (pour des raisons entre autre économiques). L’étude TARA (3) avait pour objectif d’évaluer l’efficacité des deux stratégies : réduction première du traitement DMARD synthétique versus réduction de l’anti-TNF. La stratégie de désescalade se faisait en diminuant la posologie de moitié, du quart, puis l’arrêt total sur une période de 6 mois.

Le critère principal était la survenue d’une rechute, définie par un DAS 44 > 2,4 et/ou un nombre d’articulations gonflées > 1. Après un an de suivi, la fréquence des poussées était comparable dans les deux stratégies (45% dans le groupe décroissance du biologique versus 35% dans le bras décroissance du DMARD synthétique, différence non significative). Mais au niveau médico-économique, la différence de coûts directs et indirects est, bien sûr, très importante : près de 10000 €/an/patient (4). « Cependant, il ne faut pas oublier la préférence du patient ou ses comorbidités dans le choix de la stratégie de décroissance » précise le Pr Jacques Morel.

Lupus : baricitinib et vaccination VZV

Le baricitinib est un inhibiteur de JAK 1 et JAK 2 récemment commercialisé dans la PR. Il a été testé dans le lupus érythémateux systémique. Dans cette étude de phase II (5), 314 patients atteints de lupus systémique actif sur le plan cutané ou articulaire ont été randomisés pour recevoir du baricitinib 2 ou 4 mg/j ou un placebo en plus de leur traitement habituel. Les taux de réponse du bras baricitinib étaient significativement plus élevés que sous placebo : réduction des manifestations articulaires ou cutanées du score SLEDAI (67% versus 53%). « Compte tenu de la positivité de cet essai, une étude de phase III est en train d’être mise en place » ajoute le Pr Jacques Morel.

Une autre étude conduite chez des patients ayant un lupus, traités par immunosuppresseurs à faible dose (6) a montré que le vaccin vivant zona (VZV) pouvait être utilisé, sans effets indésirables majeurs liés au vaccin ou à l’aggravation de la maladie. « Cela était déjà préconisé dans les recommandations américaines et canadiennes pour le méthotrexate avant d’avoir à disposition en 2018 le vaccin inerte contre le zona. Les prochaines recommandations européennes sur les vaccins devraient nuancer la recommandation d’arrêter le méthotrexate 3 mois avant de réaliser ce vaccin ou le ROR » déclare le Pr Jacques Morel.

Enfin, citons encore un essai qui semble indiquer qu’une injection locale de cellules souches mésenchymateuses du tissu adipeux pourrait aider à la cicatrisation des ulcères digitaux ischémiques dans la sclérodermie (7).

(1) Abstracts n° OP 0035 et 0036
(2) Abstract n° OP 0018
(3) Abstract n° OP 0113
(4) Abstract n° OP 0299
(5) Abstract n° OP 0019
(6) Abstract n° OP 0131
(7) Abstract n° OP 0143

Christine Fallet

Source : lequotidiendumedecin.fr